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par Jean-François Jagielski

Octobre 1962

Automne 62 : La situation de l’armée s-v s’améliore sous l’impulsion des conseillers américains dont le nombre a fortement augmenté. Le matériel américain (hélicoptères) permet une plus grande mobilité des troupes. L’armée de l’air s-v bénéficie elle aussi d’une instruction. Selon le vice-président LBJ, « même s’il n’y avait pas retournement complet de situation, on allait dans la bonne direction. » (cité in Johnson, 1972, p. 82).

Selon le dossier du Pentagone, la décision d’envoyer des missions de soutien au combat et des conseillers militaires n’a jamais vraiment été réfléchie par l’administration américaine. A cette époque, selon la même source, cette décision est « prise par défaut », Kennedy étant surtout obsédé par la question de devoir ou non envoyer des troupes combattantes au sol (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 141).


Octobre 62 : Contrairement aux affirmations de désengagement futur émises par McN (voir 23 juillet), le nombre de militaires américains au Vietnam atteint 16 732 hommes. Un retrait théorique de 1 000 hommes est prévu pour octobre mais n’aura lieu qu’en décembre (Les Dossiers du Pentagone, 1971, p. 140).

Au S-V, tentative par l’assemblée nationale de libéraliser le régime en amendant la constitution afin que les parlementaires puissent reprendre la main. Les ministres seraient désormais admis à l’assemblée pour s’expliquer. Ni Diem ni les ministres n’y sont favorables. Cette mesure est rapidement mise dans les cartons et n’aboutira que lors de la crise de 1963 (Truong Vinh Le, 1989, pp. 72-73).

Le dirigeant du F.N.L., Nguyen Huu Tho, réaffirme l’indépendance de son mouvement par rapport au Nord : « […] nous ne saurions admettre que nos compatriotes du Nord nous imposent ou nous suggèrent tel ou tel régime économique et social […] Aucune des deux zones ne doit chercher à peser sur les décisions de l’autre, à s’immiscer dans les affaires intérieures de l’autre, sous quelque forme que ce soit. » (cité in Chaffard, 1969, p. 285).


1er octobre 62 : 7 mois après le plan de pacification mis en place autour des « hameaux stratégiques », Diem annonce à l’assemblée nationale : « […] actuellement, la population vivant en sécurité et dans l’esprit de la révolution à l’intérieur des hameaux stratégiques déjà édifiés (3 074) ou prêts à être terminés (2 679), se monte à 7 267 517 âmes. La réalisation a été fixée à 600 hameaux par mois. Ainsi, à la fin de 1962, 9 253 000 personnes, soit les deux tiers de l’ensemble de la population, vivront dans des hameaux stratégiques. » L’annonce de ces chiffres est, selon une habitude établie au S-V, totalement déconnectée de la réalité et clairement falsifiée (voir 11 avril 1963) (Fall, 1967, p. 428).


2 octobre 62 : Aux Nations Unies, le représentant de la Thaïlande revendique les provinces cambodgiennes de Battambang, Kompong Thom et Siem Reap. Poursuite d’un long litige frontalier entre le Cambodge et la Thaïlande.


6 octobre 62 : Au Cambodge, dix-neuvième gouvernement du Sangkum : gouvernement Norodom Kantol qui demeurera en place jusqu’au 25 décembre 1964 (Jennar, 1995, p. 159).


9 octobre 62 : Nouvelle déclaration aussi optimiste que mensongère de McN à la presse : « Je pense qu’il est trop tôt pour dire que la situation s’est retournée, ou pour prédire l’issue finale, mais des progrès impressionnants ont été faits au cours de l’année écoulée […] Nous sommes enchantés des avancées qui nous ont été rapportées. Qu’on les mesure en termes de comparaison entre le pourcentage de pertes subies par les forces sud-vietnamiennes et par les agresseurs communistes, ou à l’aune de tous les autres critères que nous avons utilisés, ces progrès sont absolument manifestes. » Même rétrospectivement, dans ses mémoires, McN prétend avoir cru au contenu des déclarations d’Harkins confirmées par la C.IA., le département d’État et les médias… (McNamara, 1996, p. 58)


13 octobre 62 : Le chef de l'état-major interarmées sud-vietnamien, le général Le Van Ty, ordonne à tous les correspondants américains visitant les unités sur le terrain de soumettre leurs questions par écrit aux commandants des unités s-v. Ceux-ci doivent fournir des réponses écrites approuvées par leur hiérarchie. Certains commandants militaires s-v feront du zèle et interpréteront cette directive comme interdisant l’accès des journalistes de la presse internationale aux terrains d’opérations. Ce sera le cas pour la 7e division qui sera engagée à Ap Bac début 1963. Le département d’État réagit et demande à l’ambassadeur Nolting la suspension de cette directive qui sera finalement abrogée le 11 décembre par Ty (Hammond, 1990, p. 29).


10 octobre 62 : Diem déclare devant l’assemblée nationale s-v : « Ce n’est plus devant une guérilla que nous nous trouvons, mais devant une véritable guerre […] » (cité in Lacouture, 1965, p. 83)


20 octobre 62 : Un article du New York Times remet en cause l’optimisme officiel prôné par Saigon et Washington (voir 6 février) : « Dans l’effort continuel pour juger de la bonne marche de la guerre et des résultats obtenus par l’aide américaine toujours croissante, il semble qu’il y ait tendance à prendre pour acquis des résultats encore non obtenus et à discréditer les rapports pessimistes. Après tout, déclare-t-on, comment peut-on vraiment juger ce genre de guerre ? En même temps, cette tendance amène à choisir les preuves capables d’attester que tout va bien. Ainsi, au cours des derniers mois, un flot de VIP a si bien humé les directives officielles de prudent optimisme que chacun de ces personnages, soutenu par l’optimisme de son voisin, a trouvé le moyen de se montrer toujours plus optimiste que son prédécesseur. Disons toute suite que, sur le théâtre des opérations, l’optimisme est infiniment plus réduit qu’à Saigon et Washington et que plus on est proche de la guerre, plus on s’éloigne de l’optimisme officiel. » (cité in Halberstam, 1966, pp. 137-138)


25 octobre 62 : Diem et Nhu s’en prennent à un nouveau journaliste américain, James Robinson de NBC News, considérant qu’il offense la famille Ngo. Le frère du président déclare  à un visiteur américain peu de temps après le départ forcé de Robinson pour Hongkong que « le régime de Diem avait l'intention d'expulser tout correspondant qui oserait dénigrer soit la famille Ngo ou la capacité du Sud-Vietnam à gagner la guerre. » (Hammond, 1990, pp. 24-29)

Au Cambodge, l'aviation s-v bombarde certains villages frontaliers.

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