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par Jean-François Jagielski

Mai 1993

3 mai 93 : Les KR attaquent Siem Reap et occupent brièvement l’aéroport. 8 soldats et 4 civils sont tués. Ils s’en prennent de plus en plus régulièrement aux fonctionnaires de l’O.N.U. dans tout le Cambodge (Bui Xuan Quang, 2000, p. 770).

De New-York, le Secrétaire général de l’O.N.U. déclare que « l’importance des Khmers rouges est exagérée. » Nouvelle preuve de la déconnexion de l’O.N.U. des réalités cambodgiennes…


4 mai 93 : Les KR tirent des obus sur une unité chinoise de l’APRONUC à Kompong Thom. Ils tendent une embuscade à un convoi. Un soldat est tué.


5 mai 93 : Les KR attaquent un train dans le district de Mong Russey dans la province de Battambang occasionnant 19 tués et 80 blessés.


6 mai 93 : A Pékin, réunion informelle de certains membres du C.N.S. (dont Sihanouk) ou de leurs délégués. Les KR sont désormais totalement absents de l’instance. Les trois autres factions se mettent d’accord sur la tenue des élections. 5 jours plus tard, Son Sann qui adhère aux thèses des KR à leur sujet veut que son parti, le Parti libéral démocratique bouddhiste (P.L.B.D.), se retire également du processus électoral mais ne sera pas suivi.


12 mai 93 : Les émissions de Radio UNTAC sont diffusées en direct à raison de 15 heures par jour.


14 mai 93 : Ordre d’évacuation des familles du personnel de l’O.N.U. face au climat de violence à la veille des élections entretenu par les KR.


16 mai 93 : Des membres de la police civile de l’APRONUC désertent suite à l’affichage par les KR de textes appelant à les éliminer physiquement. Philippe Coste, ambassadeur de France, estime que « le niveau des violences et des intimidations reste trop élevé. »


17 mai 93 : Hun Sen déclare aux diplomates que, selon ses informations, les KR risquent de passer à l’action entre le 20 et le 23 pour enrayer le processus législatif. Le taux de participation risque d’être contrarié par cette menace. Or rien ne se produira  (Coste, 2022, pp. 159-160).


18 mai 93 : Fin de la campagne électorale. Selon l’APRONUC, l’ensemble des partis ont tenu 1 589 meetings et rassemblements qui ont réuni 800 000 personnes. Il y a eu au moins 19 assassinats politiques. Depuis le 1er mars, les KR sont responsables de 131 morts, 250 blessés et 53 enlèvements. A cette date, 25 000 résidents vietnamiens ont quitté le pays. Selon Coste, 4 700 000 Cambodgiens se sont fait inscrire sur les listes électorales, soit 97 % des électeurs potentiels. Les KR, opposés au processus électoral, sont donc désavoués par la population. Toutefois, nombre d’indices montrent qu’ils se préparent à saboter les élections mais sans y parvenir véritablement (Coste, 2022, pp. 153-154).


20 – 28 mai 93 : Élections générales au Cambodge sous contrôle de l’O.N.U. (Bui Xuan Quang, 2000, p. 770). A l'exception de quelques cas isolés, les actions violentes des KR craintes par l’APRONUC ne se produisent pas.


21 mai 93 : Les KR s’en prennent à un bataillon de génie chinois. La Chine saisit le Conseil de sécurité de l’O.N.U. (Coste, 2022, p. 159).


22 mai 93 : Sihanouk quitte la Chine et revient à Phnom Penh pour assister au scrutin.


26 mai 93 : Sihanouk déclare : « Je renonce définitivement à ma proposition d’un gouvernement quadripartite de réconciliation nationale comportant la participation du P.K.D. [KR]. » (voir 28 février) Il s’en remet désormais au seul verdict des urnes.


28 mai 93 : Boutros Boutos-Ghali déclare du siège de l’O.N.U. à New-York que les élections  ont été libres et équitables (Coste, 2022, p. 160).


29 mai 93 : Début du dépouillement et centralisation du résultat des élections. L’APRONUC jugera ses résultats fiables. Malgré les menaces et le climat de violence, le taux de participation est important : 89,56 %.

Le F.U.N.C.I.P.E.C. du prince Ranariddh obtiendra 45,47 % des voix (58 députés), le P.P.C. de Hun Sen 38,22 % (51 députés), le Parti démocratique libéral et bouddhique (P.D.L.B., ex-F.N.L.K.P.) de Son Sann 3,81 % (10 députés), le Moulinaka de Prun Neakaarech 1,37 % (aucun siège). Bien que réticent parce que déçu par le résultat de ces élections, Hun Sen se résoudra tant bien que mal à accepter la formation d’un gouvernement provisoire présidé finalement par Sihanouk lui-même (Férier, 1993, p. 166 ; Richer, 2009, p. 98). A l’issue de ces élections, personne ne sait si Sihanouk va accepter de prendre la tête d’un gouvernement (voir 26 mai). En fait, les résultats mitigés de ces élections, qui plus est, contestés par certaines factions, n’éclaircissent guère la situation politique.

Réunion du C.N.S., sans les KR. Akashi estime que les élections ont été « libres et équitables ». Les trois parties loyalistes déclarent en accepter le futur résultat qui, pour l’instant, n’est pas connu. Le représentant de l’O.N.U. propose la création d’une « table ronde » réunissant des représentants du C.N.S., de l’APRONUC et de la nouvelle assemblée nationale.

Les KR ne sont finalement pas parvenus à enrayer le processus électoral. Il ne s’agit pas d’un manque de volonté de leur part mais plutôt d’un manque de moyens. Selon Coste, « rétrospectivement, il apparaît que leur capacité de nuisance avait été surévaluée : c’était leur intérêt d’y faire croire, c’était aussi celui de Ranariddh, pour faire pression sur le P.P.C. et c’était même celui de Hun Sen, pour faire pression sur la communauté internationale. » (Coste, 2022, p. 161)


​31 mai 93 : Poursuite du dépouillement. Les résultats donne une légère avance au P.P.C. mais qui est loin de la majorité des deux tiers escomptée (voir 1er juin) (Coste, 2022, p. 162).

De Tokyo, le premier ministre japonais invite les partis politiques cambodgiens à « associer les Khmers rouges à l’édification de la nation. » Un nième vœu pieu totalement irréaliste…

Les diplomates onusiens se réunissent avec Akashi pour préparer une réunion prévue pour les 17 et 18 juin. Trois points à l’ordre du jour : déterminer la manière dont serait utilisée pratiquement l’aide internationale pour le relèvement du Cambodge ; fixer le calendrier de retrait de l’APRONUC ; préciser les tâches complexes qu’il restait à accomplir dans l’intervalle (assistance à apporter à la future assemblée pour élaborer et rédiger la future constitution et, dans la crainte d’une future désagrégation de l’armée et l’administration, nécessité de déterminer le format d’une nouvelle armée et d’assumer le financement de l’administration qui désormais, ni l’une ni l’autre, n’appartiennent plus à une seule faction) (Coste, 2022, p. 166).

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