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par Jean-François Jagielski

Juin 1960

5 juin 60 : Au Cambodge, suite au décès de son père le 3 avril, Sihanouk organise un référendum populaire visant à se faire réélire roi, fonction qu’il avait volontairement abandonnée. Les électeurs ont en fait à se prononcer moins sur la question royale et dynastique que sur le genre de politique extérieure que le pays doit suivre : une politique de neutralité (déjà inscrite dans la Constitution), un politique pro-occidentale (celle de Son Ngoc Thanh, en exil) ou une politique procommuniste (celle du Pracheachon).

La procédure est, une fois de plus, entachée d’irrégularités : les électeurs doivent remettre aux membres du Sangkum (scrutateurs), les bulletins de vote qui n’ont pas été utilisés ; les bulletins de vote ne comportent aucun texte mais des photographies où le portrait de l’ex-roi est privilégié (les bulletins du Pracheachon ne comportent qu’une bande rouge placée en travers du bulletin de vote). Sihanouk est élu avec deux millions de voix (99,98 %), l’opposition pro-occidentale n’ayant obtenu que 133 voix et l’opposition procommuniste 128… Cette dernière se disperse pour poursuivre la lutte (Richer, 2009, p. 30 ; Jennar, 1995, p. 132 ; Tong, 1972, pp. 139-140).


9 juin 60 : Lors de l’inauguration d’un camp de jeunesse à Kep, Sihanouk, fort du récent plébiscite organisé par ses soins, déclare qu’il accepterait de devenir « chef de l’État » si le peuple le lui demandait. Les termes « chef de l’État » apparaissent alors pour la première fois dans le royaume du Cambodge (Tong, 1972, p. 140).


12 juin 60 : Au Cambodge,  Sihanouk est nommé « chef de l'État » par le Parlement. Ces termes ne sont pas prévus par la Constitution de 1947. Sihanouk invite donc l’institution à la modifier. Un article additionnel, le 122e, est donc voté par 47 voix sur 92. Il précise que « les 2 Chambres réunies sur la convocation du président de l’assemblée nationale, peuvent, conformément à la volonté exprimée par le peuple, confier les pouvoirs et prérogatives de chef de l’État à une personnalité incontestée expressément désignée par le suffrage de la Nation. » C’est une manipulation : l’expression « les suffrages de la Nation » suppose une élection par les députés et non par voie de référendum qui, par ailleurs, ne portait nullement sur cette question (voir 5 juin). Sihanouk devient donc chef de l’État « pendant toute la vacance du Trône », c'est-à-dire de manière illimitée… (Tong, 1972, pp. 140-142)

Quelques jours après son investiture, Sihanouk déclare que si les États-Unis ne revoient pas leur politique militaire au S-V, il fera appel à l’U.R.S.S. pour obtenir des armes et des avions (Van Geirt, 1972, p. 199).


17 juin 60 : Au Cambodge, les 2 assemblées votent à l’unanimité la désignation de Sihanouk au poste de « chef de l’État ». La monarchie est toutefois conservée. Sihanouk ayant refusé de remonter sur le trône, c’est la reine-mère Kossamak qui prend le rôle de « suprême gardienne du trône ». Le pays devient donc une monarchie avec un chef d’État à sa tête et ce, jusqu’au coup de force du 18 mars 1970 (Cambacérès, 2013, p. 115).


20 juin 60 : Au Cambodge, Sihanouk prête serment au poste de « chef de l’État » et déclare devant l'assemblée nationale que la reine Kossamak incarne et représente désormais la dynastie cambodgienne.


Été 60 : Au S-V, des manifestations de paysans ont lieu dans la province de Mytho contre la répression menée par l’armée diémiste qui brûle les villages jugés tenus par le VC. Des femmes marchent sur la capitale provinciale. Cette manifestation est réprimée : 3 femmes sont abattues au lieu-dit du « carrefour des Oiseaux ». La résidence du gouverneur locale est cernée. Les manifestantes réclament des dédommagements pour les familles des victimes et les villages détruits (Burchett, 1960, pp. 224-225).

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