Juillet 70 : Du fait du retrait américain en cours, les derniers soldats chinois quittent le territoire n-v. En 1970, l’aide chinoise baisse à nouveau temporairement de 50 % par rapport à l’année 1968. Mais ce n’est que temporaire : les niveaux records de dotation en armement russe et chinois seront atteints en 1971-1972 (Marangé, 2012, p. 336 et 341).
Les Américains découvrent que le rôle de la piste HCM est relativement faible dans l’acheminement de l’armement en provenance de Chine. C’est le port de Sihanoukville qui a assuré jusque-là environ 70 % des livraisons. Le Cambodge est donc la clé du conflit et doit devenir le cœur de cible des frappes aériennes. En découvrant cela, Nixon devient livide et s’en prend sévèrement aux services de la C.I.A. pour leur notoire incompétence à n’avoir pas saisi plus tôt l’importance de cette question (Coppolani, 2018, p. 71).
2 juillet 70 : Au Cambodge, expulsion de la reine Kossomak du palais Khemarin. Elle est mise en résidence surveillée.
4 juillet 70 : Après New York (voir 20 mai), 250 000 personnes défilent à Washington pour soutenir la guerre du Vietnam et la politique de Nixon. La journée correspondant à la fête nationale est baptisée Honor America. Sont présents les ouvriers du bâtiment qui avaient réprimé une manifestation étudiante le 7 mai dans la capitale. Ont été invités le très conservateur pasteur Billy Graham et le comique Bob Hope.
5 juillet 70 : Kissinger se propose de rencontrer Le Duc Tho le week-end du 25 à Paris. Sa proposition demeure sans réponse avant le 13 août. Le projet de rencontre traîneront jusqu’au 7 septembre du fait de la récente intervention américaine au Cambodge (Kissinger 2, 1979, pp. 1 029- 1 030).
Au Cambodge, Norodom Sihanouk est condamné à mort par contumace par un tribunal militaire institué par application de la loi martiale (voir 1er juin). Les biens de Sihanouk sont saisis et il est déchu de la nationalité cambodgienne (Sihanouk, 1979, p. 255).
L’actuel gouvernement cambodgien ne contrôle plus que quelques centres urbains. La route reliant Phnom Penh à Sihanoukville est coupée au niveau de Kirirom (ex-Tioulong-ville) (Sihanouk, 1979, p. 255).
11 juillet 70 : Laurence Picq, épouse du Suong Sikoeun, le rejoint à Pékin. Elle quitte la France « non sans appréhension » sous une fausse identité. Elle occupera aux côtés de son mari un poste de secrétaire pour la publication du bulletin d’information hebdomadaire puis bi-hebdomadaire du F.U.N.K. Puis le couple sera nommé au sein du Bureau d’information en Chine créé par Thiounn Mumm. Il sera dirigé par Suong Sikoeun et son épouse assurera le secrétariat (Sikoeun, 2013, p. 145).
16 juillet 70 : Thieu se rend au Cambodge à Neak Luong pour rencontrer Lon Lol et le vice-premier ministre Sirik Matak (cousin de Sihanouk qui a participé directement au coup de force). Selon Nguyen Phu Duc, présent, « Lon Lol, qui prenait maintenant le titre de Maréchal, semblait en mauvaise santé. Il était timide et mal à l’aise. » On convient de renforcer la faible armée cambodgienne sachant qu’il y a urgence au vu de la situation actuelle (Nguyen Phu Duc, 1996, p. 281).
19 - 29 juillet 70 : Haig (conseiller militaire de Kissinger) et une équipe d’analystes se rendent au S-V dans 9 provinces clés. Ils confirment le pessimisme ambiant qui règne à Washington. L’amélioration de la situation a diminué depuis les derniers mois de 1969. Le retrait américain complexifie le tout, diminue l’efficacité des forces territoriales s-v et invite les populations à lâcher le gouvernement. Une étude de la C.I.A. arrive aux mêmes conclusions : les dirigeants s-v font état d’un pessimisme croissant car ils craignent un retrait trop hâtif des Américains. Nixon, intraitable, entend lui mettre les S-V face à ce défi (Kissinger 1, 1979, p. 454).
20 juillet 70 : Au Cambodge, Duch Kang Khek Leu (futur dirigeant de S-21 à partir du 8 mars 1976) prend la direction du camp d’internement M-13 situé à Omelang dans la province de Kompong Speu qui existe depuis 1967. Un Français, François Bizot, membre de l’École française d’Extrême-Orient, y sera incarcéré trois mois à partir d’octobre 1971, interrogé puis relâché par Duch à la fin de l’année (Bizot, 2000, pp. 53-205).
Premier remaniement gouvernemental du G.R.U.N.K. avec l’entrée de Thioum Prasith et Keat Chhon (Sihanouk, 12979, p. 254).
21 juillet 70 : Kissinger écrit à Nixon pour le mettre en garde contre l’idée d’un retrait unilatéral qui affaiblirait le « marchandage » en cours car « il nous faudrait choisir entre la vietnamisation et la négociation. » D’où l’idée en août de promouvoir un cessez-le-feu sur place (sans retrait ni regroupement des forces), ce qu’avait préconisé Cyrus Vance avant de quitter son poste de négociateur à la conférence de Paris. Harriman et Mike Mansfield abondaient eux aussi dans le même sens. C’était, selon Kissinger, une manière de renoncer pour les deux parties à une victoire militaire (Kissinger 2, 1979, p. 1 027). La question est débattue ce jour-même en C.N.S. : tout le monde est d’accord pour penser qu’Hanoi refusera cette proposition (Kissinger 2, 1979, p. 1 028).
22 juillet 70 : Au cours d’un dîner avec Kissinger, David Bruce (qui vient d’être nommé à la tête de la délégation américaine dans les négociations de Paris) et Bunker (ambassadeur américain à Saigon), Nixon déclare : « Je crois profondément que la façon dont nous mettrons fin à cette guerre déterminera l’avenir des États-Unis dans le monde. Nous pouvons maintenir la position de l’Amérique en Europe et en Asie si nous en sortons bien. Le peuple américain est divisé en deux parties égales. L’establishment marche contre moi, mais j’en viendrai à bout car je suis, dans le tout le pays, la seule personne capable de nous tirer d’affaire. » (Kissinger 2, 1979, p. 1 024)
Lon Lol se rend en visite officielle en Thaïlande (Sihanouk, 1979, p. 255).
23 juillet 70 : Lon Nol sollicite l'aide militaire de la Thaïlande.
31 juillet 70 : Des chasseurs américains bombardent au napalm le plateau et la ville de Kirirom, confirmant ainsi la poursuite d'un engagement militaire américain au Cambodge malgré l’adoption de l’amendement Cooper-Church (voir 30 juin).