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par Jean-François Jagielski

Janvier 1953

Début 53 : L’U.R.S.S. fournit du matériel pour équiper 6 bataillons de canons anti-aériens de 37 mm.


Janvier 53 : Opérations de nettoyage dans le delta du Fleuve Rouge : opérations Normandie, Nice et Bretagne.

Au Cambodge, une grenade est lancée au lycée Sisowath, un bastion de l’opposition au pouvoir royal (Cambacérès, 2013, p. 85).

Réunion du Politburo. Les stratèges vietnamiens concèdent qu’ils sont toujours beaucoup plus faibles que l’armée française qui contrôle le Delta et est toujours présente dans le Nord-Ouest (Na San, Lai Chau). HCM explique qu’il ne faut pas attaquer les points forts du dispositif ennemi car ces attaques ont jusqu’alors toutes échouées. Il faut s’en prendre aux points faibles, pratiquer la guérilla et  chercher à disperser les forces dans le Delta (Goscha, 2003, p. 51). Un mot d’ordre prudent mais efficace ressort de cette réunion : « […] Principe directeur opérationnel : attaquer à coup sûr, progresser à pas sûrs. Si nous ne sommes sûrs de gagner, nous combattrons jusqu’au bout, si nous ne sommes pas sûrs de la victoire, nous refusons résolument le combat. » (cité in Rocolle, 1968, p. 194, note 116)


1er Janvier 53 : Le G.C.M.A. du lieutenant-colonel Trinquier implante des antennes au Nord-Laos pour rallier les maquis méo. En échange, l’aviation française est mise à contribution pour acheter puis rapatrier sur Cholon la récolte d’opium. Là, il est pris en charge par la régie des douanes tout comme le tabac où l’alcool. Salan donne son accord avant d’en référer à son ministre. Le trafic d’opium lui permettant de lever des troupes et sachant que si ce n’est lui, c’est le VM qui prendra l’affaire en main. Toutefois l’affaire s’ébruite dans la presse et provoque des remous (Gras, 1979, p. 494 ; Salan 2, 1971, pp. 384-386).

Selon Navarre (futur commandant en chef), il existe dans le delta du Fleuve Rouge « 917 postes dont 80 modernes, 25 modernisés et 810 démodés ». Ces postes mobilisent un effectif de pas moins de 100 000 hommes. Selon le même, ces « positions-statiques » mobilisent « les neuf dixièmes des effectifs ». Il estime que sur un effectif de 500 000 hommes pour toutes les forces pro-françaises en Indochine, seul « un quart à peine était tactiquement mobiles et un dixième seulement l’était stratégiquement. En face de l’effectif de 9 divisions, auquel s’élevait le corps de bataille vietminh, le nôtre n’alignait que la valeur de 3 (7 groupes mobiles et 8 bataillons paras). » (Navarre, 1956, pp. 46-47)


6 janvier 53 : René Mayer obtient l’investiture à l’Assemblée nationale avec 389 voix contre 203. Parmi ces voix, la majorité d’entre elles sont socialistes et communistes.


7 janvier 53 : Instruction secrète de Salan à De Linarès (commandant les F.T.V.N.) : « […] l’opération de Dien Bien Phu, prévue par l’I.P.S. du 17 décembre et prescrite par la directive 40 du 31 décembre est essentielle. Nous devons empêcher le V.M.  de contaminer le pays thaï et de s’organiser aux frontières du Laos. Dien Bien Phu est une base rebelle importante qu’il est souhaitable d’éliminer aussi rapidement que possible […] » (cité in Rocolle, 1968, p. 150, note 82) Salan y reviendra plus en détails le 22 janvier.


8 janvier 53 : René Mayer (radical-socialiste) devient président du Conseil (jusqu’au 28 juin 1953). Dans son discours d’investiture, il évoque assez peu l’Indochine. Il ne croit pas plus que ses prédécesseurs en une solution militaire mais poursuit le conflit.

Gouvernement : Armées : René Pleven  (M.R.P.) ; Affaires étrangères : Georges Bidault (M.R.P.) ; France d’Outre-mer ; L. Jacquinot (Républicains indépendants) ; Relations avec les États associés et haut-commissaire en Indochine : Jean Letourneau (M.R.P.) (Bodin, 2004, p. 125).


11 janvier 53 : Transfert à l’armée vietnamienne au Sud des secteurs de My Tho et de Vinh Long.

Au Cambodge, Sihanouk demande des pouvoirs spéciaux à l'assemblée nationale sans toutefois les obtenir.


13 janvier 53 : Au Cambodge, le régime dirigé par Sihanouk se raidit encore. Il prononce la dissolution de l’assemblée nationale (qui lui avait refusé les pleins pouvoirs) par ordonnance et promulgue une loi d’exception permettant d’arrêter les dissidents (Gras, 1979, p. 501 ; Cambacérès, 2013, p. 85). Sihanouk décide d’un nouvel exil à l’étranger, non sans avoir nommé un conseil de régence et proclamé la loi martiale (Tong, 1972, p. 62).

Retour de France de Saloth Sar, le futur Pol Pot, qui accoste à Saigon avant son retour au Cambodge. Il rejoint rapidement les rangs du P.C.I. (Deron, 2009, p. 154 et p. 262).


19 janvier 53 : Au Cambodge, Sihanouk installe une véritable autocratie. Il déclare que          « désormais, tout individu ou tout parti politique qui travaillera contre MA politique et contre MON programme national sera déclaré traître à la Nation et comme tel puni conformément à la loi du pays. » (cité in Tong, 1972, p. 47).


20 janvier 53 : Le président américain Dwight D. Eisenhower (Républicain) prend ses fonctions. Il enverra 800 conseillers militaires au Vietnam pour épauler les Français.

Un compte rendu d’une réunion interministérielle (Affaires étrangères, Défense, ministère des États associés, ministère des Finances, présidence du Conseil) intitulé « Études des possibilités de présentation au gouvernement américain d’une demande d’augmentation de l’aide financière pour soutenir notre effort en Indochine » laisse apparaître qu’aucun des ministères n’est capable de donner un seul et même montant (David, 2007, p. 7). Les choses traînent à n’en plus finir jusqu’au mois d’août…


22 janvier 53 : Dans une directive, Salan compte à nouveau réoccuper la plaine de Dien Bien Phu afin d’y installer une base aéroterrestre complétant celles de Laïchau et de Na San : « Ce système [défensif du pays thaï] doit être constitué essentiellement par trois bases aéroterrestres installée à Na San, Laïchau, Dien Bien Phu, autour des terrains d’aviation et dont la défense rapprochée sera confiée à des bataillons d’intervention. Ces unités auront également la charge d’épauler l’action des unités supplétives et des formations d’autodéfense mises en place dans le triangle délimité par ces trois bases pour assurer la pacification intérieure […] » (cité in Rocolle, 1968, pp. 150-151, note 83).


24 Janvier 53 : Au Cambodge, avènement d’un gouvernement Sihanouk qui demeurera en place jusqu’au 28 juillet (Jennar, 1995, p. 146).


27 janvier 53 : Au Cambodge, Sihanouk crée un conseil consultatif constitué d’anciens parlementaires pour contrer le nouveau Parlement. Il a pour attributions l’examen du projet de budget (rejeté par l’Assemblée nationale en décembre 1952) et l’élaboration de projets de loi présentés par le gouvernement (Cambacérès, 2013, p. 85).


27 – 28 janvier 53 : En mission d’inspection, le maréchal Juin (chef d’état-major de la Défense nationale), accompagné de Jean Letourneau (États associés et haut-commissaire), visitent Na San puis poursuivent vers Phnom Penh et Vientiane.

29 janvier - 6 février 53 : En Annam, une opération combinée (infanterie et marine) est montée aux environs de Qui Nhon pour soulager les Hauts Plateaux, notamment An Khe et sa région. Évacuation de populations civiles « dans un grand état de misère » vers la Cochinchine (Gras, 1979, p. 493 ; Salan 2, 1971, pp. 376-378).


Fin janvier 53 : Au Cambodge, Sihanouk remanie son gouvernement. Il a nommé Penn Nouth premier ministre et confié la charge du trône à un conseil de régence présidé par son père, le prince Suramarit. Il se rend en effet en France, officiellement dans un hôtel de La Napoule sur la Côte d’Azur pour se reposer. En réalité, il s’y rend pour faire avancer les discussions avec la France sur la question de l’indépendance (voir 5 mars) (Cambacérès, 2013, p. 86).

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