Forrestal Michael : Né à New York le 26 novembre 1927. Son père a servi comme secrétaire de la Marine avant de devenir premier secrétaire à la Défense en 1947. En 1946, il est diplômé de la Phillips Exeter Academy. Il a travaillé dans la marine américaine et a été nommé attaché naval adjoint à Moscou sous W. Averell Harriman, alors ambassadeur en Union soviétique. Plus tard, il est nommé secrétaire de la Direction navale quadripartite faisant partie du Conseil de contrôle allié de l'après-Seconde Guerre mondiale qui administrait Berlin. De 1948 à 1950, il a été directeur adjoint de la Division du commerce Est-Ouest de l'Administration américaine de coopération européenne. Forrestal a étudié à l'Université de Princeton et est diplômé de la Harvard Law School en 1953. Il exerce dans le cabinet d’avocats de New York Shearman & Sterling dont il est devenu un associé en 1960.
De 1962 à 1965, Forrestal a été membre de la haute direction du C.N.S. où il s'est spécialisé sur l’Asie et a participé aux délibérations et aux décisions qui ont conduit à une présence militaire accrue des États-Unis au Vietnam. Il l’est à ce titre l’un des principaux adjoints de McGeorge Bundy, conseiller à la Sécurité nationale. Le 11 février 62, il produit un rapport adressé à Kennedy qui indique que le président doit s’attendre « à une guerre longue et coûteuse » et que « personne ne sait combien des 20 000 Vietcongs tués l’an dernière étaient d’innocents ou du moins de récupérables villageois ni si le programme des hameaux stratégiques procure suffisamment d’avantages au gouvernement pour contrebalancer les sacrifices qu’il réclame ou si la masse silencieuse réagit aux entraves imposées au népotisme dictatorial de Diem. » Le recrutement du Vietcong est si important au S-V que la guerre peut se prolonger dans le secours des infiltrations venant du Nord (Les Dossiers du Pentagone, 1971, p. 140).
Le 15 janvier 1963, Hilsman et Forrestal, de retour du Vietnam, rapportent des avis négatifs tant sur le régime de Diem que sur le nombre de tués dans les rangs vietcong ou la question du bilan des hameaux stratégiques. Forrestal prévoit une guerre longue et coûteuse (Halberstam, 1974, pp. 245-246). Les deux membres de l’administration estiment, dans une annexe ajoutée au rapport adressé à Kennedy, que la politique américaine est une politique du pas à pas qui n’est fondée sur aucun dessein politique. Ils constatent également les malentendus entre civils et militaires américains et le manque de coordination entre les différents départements et agences. Face à la répression bouddhiste en 1963, Forrestal, Harriman et Hilsman font partie des hauts fonctionnaires du département d'État qui estiment que Diem doit être démis de ses fonctions. Le 24 août 1963, un samedi, ce sont eux qui rédigent le télégramme (« le câble 243 ») intimant à Lodge (ambassadeur américain à Saigon) d’agir contre Diem en court-circuitant les véritables décideurs en congés : McN, Rusk, McCone et Kennedy. Lors de la réunion du 26 août 1963, le président, indécis et tergiversant, qui plus est, confronté à des conseillers divisés sur le sort de Diem et Nhu, ne cherchera pas à rattraper la bévue des subalternes. Sachant que Forrestal est le principal initiateur du « câble 243 », bien que furieux à son égard, le président refusera sa proposition de démission.
Après la mort de Kennedy, Forrestal fera donc temporairement partie de l’administration Johnson. En juillet 1964, il quitte la Maison Blanche pour un poste au Vietnam qui doit lui permettre de travailler sur des détails concrets en occupant le poste de chef du comité interministériel pour le Vietnam. Il élabore le plan Sullivan-Forrestal pour dissuader les militaires de bombarder le N-V, ce qui lui vaudra une disgrâce et son évincement progressif de l’administration Johnson (Halberstam, 1974, pp. 408-409).