Février 67 : Sondage analysant l’évolution de l’opinion publique américaine envers le conflit au Vietnam : pour 52 %, contre 32 %, sans opinion 16 % (Nouilhat in collectif, 1992, p. 60 ; Portes, 2008, p 150).
Les sorties de B-52 passent de 60 à 800 par mois comme le demandent l’amiral Sharp (C.I.N.P.A.C.) et les chefs d’état-major (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 555).
6 février 67 : Le Premier ministre britannique Harold Wilson accueille Alexis Kossyguine (président du conseil des ministres de l'U.R.S.S.) en visite officielle à Londres. Ils discutent de la récente déclaration du ministre des Affaires étrangères n-v, Nguyen Duy Trinh, qui affirme que des pourparlers « pourraient commencer » si les bombardements américains s’arrêtaient.
Wilson avance une formule « phase a-phase b ». Il s’agit d’un retrait des N-V du Sud entraînant un arrêt des bombardements américain. Cette formule n’enchante pas LBJ qui juge que les N-V vont profiter de la trêve pour augmenter les infiltrations. LBJ durcit sa position : il met de côté les 2 phases proposées et fait une nouvelle proposition plus exigeante : les bombardements s’arrêteront si et uniquement si Hanoi stoppe au préalable les infiltrations. Kossyguine demande 48 heures de délai pour intervenir auprès des N-V. Johnson ne lui en accorde que 6. Le président russe est furieux mais poursuit quand même ses démarches. Johnson refuse clairement toute avancée au vu du niveau actuel des infiltrations et demandera la reprise des bombardements dès le 13 (McNamara, 1996, pp. 245-246 ; Le dossier du Pentagone, 1971, p. 557 ; Johnson, 1972, pp. 308-311).
Entretien orageux entre LBJ et le sénateur démocrate Robert Kennedy. Le second accuse le premier de vouloir prolonger indéfiniment la guerre. Les rapports entre les 2 hommes qui n’ont jamais été bons n’ont jamais été aussi tendus (Portes, 2007, pp. 250-251). Robert Kennedy se déclare officiellement pour l’arrêt des bombardements, entraînant avec lui une partie des démocrates (Portes, 2008, p. 161).
7 février 67 : Le pape Paul VI adresse une lettre à LBJ, puis le lendemain à HCM, demandant à l’un et l’autre d’intensifier les efforts de paix. LBJ lui répond immédiatement affirmant être disposé « à tout moment et en tout endroit [à] une réduction des activités militaires, [à] la cessation des hostilités ou […] toute disposition pratique susceptible d’aboutir à un résultat. » Dès le départ de Kossyguine de Londres, Radio Hanoi diffuse une réponse négative d’HCM à la tentative de médiation (Johnson, 1972, p. 308).
8 février 67: Envoi d’une lettre de LBJ à HCM par la voie du canal diplomatique soviétique via Londres. Le président américain se dit prêt à interrompre les bombardements et plafonner le nombre de soldats dès que les infiltrations « par terre et mer [pistes HCM terrestre et maritime] auront cessé. » HCM lui répond le 15. Il exige l’arrêt total des opérations militaires, le retrait de toutes les troupes américaines et dénonce les crimes de guerre américains qui méprisent de la Convention de Genève. LBJ lui répond mais se contente de rappeler sa position antérieure. Poursuite d’un parfait dialogue de sourds (Portes, 2007, p. 250 ; Johnson, 1972, pp. 706-707).
Pour mieux soutenir cette initiative diplomatique, LBJ ordonne pour le Têt une pause dans les bombardements suite à une demande de médiation russe par le biais des Anglais. Demie mesure qui ne sera que de courte durée (voir 13 février) (Francini 2, 1988, p. 319).
8 – 12 février 67 : Dans le cadre d’un arrêt partiel des bombardements (voir 23 décembre), les Américains stoppent une troisième fois totalement les leurs pour une durée de 5 jours et 18 heures (Johnson, 1972, p. 693).
11 février 67 : Début de l’opération Pershing qui durera un an dans la province côtière de Binh Dinh (au nord de Nha Trang). Elle vise à développer une politique de pacification (mais voir sa mise en sourdine dès fin 1965).
13 février 67 : Après une période de trêve de 6 jours durant les négociations (voir 8 février), les bombardements au N-V reprennent. LBJ dit avoir donné leur reprise car les N-V en profitaient pour acheminer des hommes et du matériel militaire au Sud. Harold Wilson (premier ministre britannique) accuse dans ses mémoires le président américain d’avoir provoqué la rupture des pourparlers en faisant de la cessation des infiltrations une condition sine qua non de l’arrêt des bombardements. Or selon lui, il avait été prévu chronologiquement dans les accords secrets avec Kossyguine ni d’arrêter les bombardements ni que les N-V stoppent les infiltrations. Par la suite, LBJ donnera l’ordre d’intensifier à nouveau les bombardements (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 557).
15 février 67 : HCM répond à la lettre de LBJ du 8 par une fin de non-recevoir. Il n’entend pas discuter de paix avant la fin des bombardements (Johnson, 1972, p. 311 ; lettre cité in extenso in Johnson, 1972, pp. 708-709). LBJ lui réécrira le 6 avril (lettre cité in extenso in Johnson, 1972, p. 710).
20 février 67 : La voiture du vice-président Humphrey est prise à partie par des manifestants pacifistes devant l’université de Stanford située au sud de San Francisco (Prados, 2015, p. 330).
22 février - 14 Mai 67 : Opération Junction City 1. Vaste opération aéroportée américano-vietnamienne visant à s’emparer du quartier général Vietcong appelé Central Office of South Viet-Nam (C.O.S.V.N. ou, côté vietnamien, Truong Uong Cuc ou front B-3, c'est-à-dire un état-major orchestrant les actions militaires et politiques au sud du pays). Sans être vraiment sûr de son existence, les Américains le considèrent comme « un Pentagone de bambou » mais qui s’avère être dans les faits aussi dispersé que mobile. L’opération regroupe côté américain les 1st, 9th, 25th divisions et les 173rd et 11th à Tay Ninh (nord-ouest de Saigon) et dans les provinces frontalières avec le Cambodge. Bien que durement touchée, la 9e division vietcong résiste et ne sera pas détruite (2 700 morts estimés). Une seconde opération s’avérera donc nécessaire en vue d’achever l’opération (voir 24 mars - 14 mai) (Burns Sigler, 1992, pp. 37-38 ; Tucker, 2000, pp. 198-199).
Intensification des bombardements au N-V : des raids sont lancés sur 5 centrales thermiques urbaines (sur dans le secteur Hanoi-Haïphong). Des mines sont posées dans les rivières et estuaires (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 557).
24 février - 3 mars 67 : Au Cambodge, des troupes américano-sud-vietnamiennes occupent le village de Chrak Kranh (province de Kompong Cham) et en chassent les habitants.
28 février 67 : De retour d’un voyage au Vietnam accompli du 13 au 23 février, Robert W. Komer, conseiller spécial à la Maison Blanche chargé des questions de pacification, produit un mémorandum adressé à LBJ : « Je reviens plus optimiste que jamais […] A grand frais, certes, mais sans discussion possible, nous sommes en train de gagner la guerre au Sud. Peu de nos programmes – civils ou militaires – sont efficaces, mais nous écrasons l’ennemi par le seul effet de notre masse. » (Le dossier du Pentagone, 1971, pp. 581-582).
29 février 67 : McNamara qui ne croit plus au bienfondé ni au succès de l’intervention américaine au Vietnam envisage de démissionner.