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par Jean-François Jagielski

Décembre 1951

Décembre 51 : Au Cambodge, l’armée nationale khmère atteint 10 680 hommes (Cadeau, 2019, p. 367).

L’armée nationale du Laos comprend quant à elle 9 461 combattants. Elle a doublé ses effectifs depuis le début de l’année (Cadeau, 2019, p. 367).


1er décembre 51 : La commission générale du Parti dans l’armée adopte un plan d’opération. Il faut d’abord couper la ligne de ravitaillement française par la rivière du Day en concentrant les attaques sur la ligne Song Da-Ba Vi afin de couper par la suite les approvisionnements français par la R.C. 6. On attaque les zones de défense françaises constituées de points d’appui en attaquant nuitamment les points les plus faibles. La tâche est confiée à la 308e division (Giap 2, 2004, p. 198).


2 décembre 51 : Attaque par le 66e régiment sur le tronçon Cau-Du-Hang Da (15 km au nord-ouest d’Hoa Binh) d’un convoi de 30 camions français venus à la rencontre de 4 camions chargés de soldats venant de Hoa Binh. Selon Giap, les 34 camions sont détruits (Giap 2, 2004, pp. 205-206).


7 décembre 51 : Attaque par le VM d’un convoi de 10 véhicules français dont 2 chars à Giang Mo (8 km à l’ouest de Hoa Binh). Selon Giap, les Français déplorent 200 morts (Giap 2, 2004, p. 206).

Une convention d’aide économique est signée entre le Vietnam et les États-Unis (Tran Van Don, 1985, p. 220).


9 décembre 51 : Le VM lance ses attaques contre les postes français (Giap 2, 2004, p. 199). Ces attaques par submersion seront souvent coûteuses en vies, un aspect sur lequel Giap se garde d’insister dans ses mémoires. Il évoque souvent les pertes franco-« fantoches » mais beaucoup moins celles de son propre camp…


10 - 11 décembre 51 : Le VM attaque Tu Vu (ouest d’Hanoi) où se trouve un important poste français tenu par le 1er bataillon du 2e régiment de tirailleurs marocains. Ce poste est implanté sur la rive gauche de la rivière du Day. Il contrôle l’acheminement des renforts et des moyens militaire français par la voie fluviale. Malgré un important barrage d’artillerie, le poste tombe le 11 du fait d’attaques par submersion humaine (Giap 2, 2004, pp. 201-203).


11 décembre 51 : La 320e division progresse dans la région de Ninh Binh en s’infiltrant au travers des postes (Giap 2, 2004, p. 203).

Attaque par le 375e bataillon de 2 sections à Doc Kem (col de Kem) et destruction de 11 camions du génie (Giap 2, 2004, p. 206).

Au matin, le 84e bataillon du 36e régiment attaque au niveau de Doan Ha un convoi de canots sur la rivière Day. Une embarcation coulée et l’autre endommagée. L’après-midi, le 16e bataillon du 141e régiment attaque à Lac Son 2 autres canots (Giap 2, 2004, p. 206).


12 décembre 51 : Le 48e régiment (320e division) reprend Phat Diem (sud de Ninh Binh) (Giap 2, 2004, p. 203).


15 décembre 51 : Pour se rapprocher de Hoa Binh, déplacement du Q.G. vm de Duong Luong à Tan Lap (7 km à l’ouest de Tu Vu). Lors d’une réunion, le commandement estime que la première phase de la campagne est un succès. L’attaque sur Hoa Binh a permis d’immobiliser les forces françaises et a favorisé la relance de la guérilla à l’arrière de ces forces. Ce qui affaiblit les Français en les obligeant à devoir être partout (Giap 2, 2004, p. 209).

Selon Giap, les Français sont écartelés entre la nécessité de tenir les postes statiques et devoir mener en même temps une guerre de mouvement où le VM a toujours l’initiative. Il constate : « Faiblement supérieurs en nombre et moins bien équipés et armés, nous n’étions pas en mesure d’anéantir la totalité des forces ennemies à Hoa Binh mais le seul fait de retenir plus de vingt bataillons dans cette étroite cuvette durant l’hiver et le printemps, favorisant ainsi nos activités sur les autres fronts, était déjà une victoire importante. » (Giap 2, 2004, p. 211)

En moyenne région, le 174e régiment doté d’artillerie de montagne de 75 mm pénètre dans la zone occupée de Bac Ninh (nord-est d’Hanoi) et s’en prend au poste de Pho Moi (Giap 2, 2004, pp. 213-214).


19 décembre 51 : De Lattre entre dans une clinique à Neuilly pour y subir une intervention chirurgicale.


22 décembre 51 : Giap est informé de la réussite d’une interception de bateaux sur la rivière Day à 10 km d’Hoa Binh dans la zone Lac Song-Dong Viet par les hommes de 36e régiment. Un bâtiment de guerre est coulé, 4 canots et une dinassaut sont endommagés. Salan envoie des renforts (1er et 4e G.M.) autour du mont Ba Vi pour protéger les renforts fluviaux qui sont de plus en plus menacés. Il envisage un pont aérien entre Hanoi et Hoa Binh car la R.C. 6 est de plus en plus menacée d’être coupée (Giap 2, 2004, p. 212).


25 décembre 51 : Un bataillon du 98e régiment enlève le poste de Cau Nga (nord-est de Saigon) (Giap 2, 2004, p. 214).


28 décembre 51 : Ouverture des débats à l’Assemblée nationale française sur les crédits militaires attribués aux États associés. Le projet du gouvernement est adopté mais violemment attaqué par les communistes qui demandent à nouveau le retrait du corps expéditionnaire d’Indochine. La guerre coûte de plus en plus cher : 261 milliards de francs en 1951, 326 milliards sont prévus en 1952 pour les seules forces terrestres. Soit une dépense de près d’un milliard par jour. Le conflit indochinois est de plus en plus gourmand en effectifs, au moment même où l’O.T.A.N. demande à la France 10 divisions pour la défense de l’Europe. Depuis le milieu de l’année, il n’y a plus de majorité pour décider de la politique indochinoise. C’est donc De Lattre qui, de Saigon, avait dû prendre les initiatives. Une belle cacophonie reflètent la teneur des débats à l’Assemblée : Daladier demande un repli sur la Cochinchine ; Pleven (président du Conseil)  reprend les paroles de Gallieni et déclare : « Qui tient le Tonkin, tient l’Indochine ». C’est ce que pense De Lattre. Le gaulliste Gaston Palewski (R.P.F.) déclare de son côté : «  La route de la négociation, c’est la route de la capitulation. C’est la route du Munich asiatique, la route qui mènera de Mao Tse Tung à Ho Chi Minh. C’est le retrait larvé qui n’ose pas dire son nom. » (cité in Ruscio, 1992, p. 108) Coste-Floret (ancien ministre de la F.O.M., M.R.P.) songe lui à une internationalisation du conflit par le biais de l’O.N.U. dans laquelle il faudrait faire entrer le Vietnam comme nation. Les socialistes demandent quant à eux un armistice… Côté gouvernement, Pleven (président du Conseil) et Letourneau (États associés), ne sont pas hostiles à une forme d’internationalisation du conflit mais le président du Conseil la trouve trop précoce tant que l’armée vietnamienne ne sera pas plus solide pour négocier en position de force. Il y a au moins un point d’accord : à peu près tous sont persuadés qu’il n’y a pas de solution militaire en Indochine (Gras, 1979, pp. 436-437).


29 décembre 51 : Le 141e régiment (312e division) attaque les cotes 400 et 600 sur les hauteurs du mont Ba Vi. La cote 400 tombe rapidement. La résistance française est plus prononcée sur la cote 600 qui est reprise par les Français le 30 mais reperdue par la suite. Le contrôle de l’approvisionnement par la rivière Day est de plus en plus compromis (Giap 2, 2004, pp. 212-213).

Dans la nuit, le 57e régiment (304e division) enlève le poste de Do Moi dans le secteur de Cho Ben sur la route provinciale 21 (Giap 2, 2004, p. 213).

La R.D.V.N. demande à intégrer l’O.N.U. L’U.R.S.S. ne soutient pas cette demande et ne le fera que 9 mois plus tard,  lorsque la France fera la même démarche en faveur du Vietnam de Bao Daï et des royaumes du Laos et du Cambodge (Marangé, 2012, p. 193).


31 décembre 51 (jusqu’au 31 janvier 52) : Offensive vietminh sur la R.C. 6 dans le secteur de Xom Pheo (Sud-est de Hoa Binh) où se trouve un centre de résistance français tenu par des légionnaires. Le but est d’isoler Hoa Binh et d’amener les réserves françaises en terrain défavorable pour les anéantir. Attaques massives des postes français, par vagues de submersion humaine qui se prolongeront jusqu’aux 7 et 8 janvier 1952. La plupart des postes résistent aux attaques. Les pertes du VM sont lourdes : 800 morts. Les centres de résistance français se maintiennent. Cette résistance préfigure Na San et la future stratégie des camps retranchés, les « hérissons » chers à Salan.

Dans la nuit, Le 57e régiment (304e division) enlève le poste de Do Moi dans le secteur de Cho Ben. Cette perte menace de plus en plus l’utilisation de la R.C. 6 pour les Français (Giap 2, 2004, p. 213).

Selon Salan, les pertes françaises du 23 septembre 1945 au 31 décembre 1951 sont de 26 000 tués dont 1 000 officiers, 36 000 blessés (Salan 2, 1971, p. 279).


Fin 51 : Les divisions VM sont ramenées en théorie de 15 000 à 13 500 puis à 12 000 hommes triés sur le volet. Dans la réalité, du fait des pertes, des malades, une division a un effectif réel de 9 à 10 000 hommes (Toinet, 1998, p. 97 ; Vanuxem, 1977, p. 143).

La ligne de défense fortifiée voulue par De Lattre autour du Delta est en voie d’achèvement. Elle devait être constituée de 1 200 bunkers au Nord dont 800 sont construits. 500 autres sont prévus dans le Centre et le Sud. Selon Giap, « le système diversifié de défense ennemie constituait non seulement un obstacle pour nos troupes faiblement équipées mais encore un défi pour nos divisions régulières, dotées essentiellement d’armes légères dans le Nord. » (Giap, 2004, pp. 183-184)

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