Août 64 : Daniel Ellsberg entre au Pentagone au poste d’analyste.
Le secrétaire général de l’O.N.U., U Thant, entame une tournée internationale à Paris, au Caire et à Moscou. L’U.R.S.S. et la France ne croient guère dans le rôle conciliateur de l’O.N.U. que par ailleurs la R.D.V.N. ne reconnaît pas. La démarche aboutira cependant à un résultat (voir septembre).
1er – 2 août 64 : Dans le cadre des opérations clandestines 34 A, des pilotes thaïs volant sur des chasseurs américains T-28 bombardent et mitraillent des villages n-v près de la frontière du Laos. Ces opérations demeurent secrètes mais donneront naissance à une plainte du N-V devant la commission internationale de contrôle (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 290 et pp. 329-333).
2 août 64 : Incidents du Golfe du Tonkin. Au cours d’une patrouille De Soto, le commandant du destroyer Maddox déclare que son bâtiment change 2 fois de route dans les eaux internationales pour éviter 3 vedettes lance-torpilles n-v et une flottille de jonques présentes sur place suite à l’affaire du 30 juillet. Des appareils du porte-avions Ticonderoga situé plus au sud ripostent en endommageant deux des trois vedettes. Puis une troisième vedette est coulée par un tir direct du Maddox (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 288). On apprendra par la suite que la riposte n-v a été ordonnée par un commandant local, sans consultation des hautes autorités politiques et militaires n-v (Journoud, 2011, p. 182).
3 août 64 : LBJ donne l’ordre de faire renforcer le Maddox par le C. Turner Joy. Un autre porte-avions, le Constellation, est détourné et doit désormais faire route de Hong Kong vers le golfe du Tonkin.
Dans la nuit, 2 nouvelles attaques clandestines 34-A sont déclenchées par des patrouilleurs s-v. Elles visent l’estuaire du fleuve Rhon et un poste de radar à Vinhson. Les vaisseaux américains ont été mis au courant de ce raid et ont reçu l’ordre de se tenir à l’écart de l’opération s-v (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 289).
Selon Johnson, McN décrit au cours d’une réunion où sont présents des membres de la commission des Relations extérieures du Sénat les opérations secrètes intitulées « Plan 34-A ». Dans ses mémoires, LBJ affirme que « les sénateurs et députés chargés de nos opérations de renseignement furent pleinement informés des actions des Sud-Vietnamiens et de notre appui en janvier 1964, puis en mai, à deux reprises en juin et de nouveau début août. » (Johnson, 1972, p. 146).
4 août 64 : Selon des sources américaines, lors d’une seconde attaque, deux destroyers le Maddox et le C. Turner Joy sont prises à partie nuitamment par des vedettes lance-torpilles nord-vietnamiennes. Dans les faits, les recherches historiques approfondies de John Prados ont montré que cette attaque n’a jamais eu lieu (https://nsarchive2.gwu.edu/NSAEBB/NSAEBB132/index.htm , consulté 13/03/22)
L’information est transmise à Washington à 9 h 20 heure locale. Les 2 navires interceptent des messages radio n-v indiquant qu’une nouvelle attaque est en préparation. L’information est transmise à Washington à 11 heures.
McN provoque une réunion au Pentagone où sont présents Rusk (Secrétaire d’État), McGeorge Bundy (Sécurité nationale) et les chefs d’état-major. Puis on se rend à la Maison Blanche pour un C.N.S. durant lequel McCone (directeur de la C.I.A.) est également présent. Des raids de représailles sont soumis à la décision présidentielle, appuyée par les conseillers présents.
A 13 h 25, heure de Washington, les chefs d’état-major désignent des objectifs de bombardement sur 4 bases n-v de vedettes lance-torpilles (Hongaï, Lochau, Phucloi et Quangke) ainsi que sur les dépôts de carburant de Vinh. Lors d’une seconde séance du C.N.S. tenue à 18 h 15, LBJ donne un ordre de représailles et envisage une campagne de bombardement sur le N-V. A 19 h 00, il rencontre des membres du Congrès à la Maison Blanche et décide alors de proposer le vote d’une résolution au Congrès. Il obtient une réponse positive (Johnson, 1972, p. 148).
Grande confusion au niveau des informations qui sont transmises à la Maison Blanche, l’amiral Sharp doutant que l’attaque ait réellement eu lieu. Pour autant est donné l’ordre de représailles avec le déclenchement de l’opération Pierce Arrow (« flèche pénétrante ») validée dès 15 heures par McN.
A 16 h 49, moins de 6 heures après la réception des informations sur l’éventuelle attaque, sans attendre la confirmation de Sharp, ordre est donné pour que les porte-avions croisant au large du Tonkin de répliquer. Ce n’est qu’à 17 h 23 que Sharp confirme que l’attaque a bien eu lieu.
A 18 h 45, LBJ rencontre 16 leaders du Congrès et les informe de cette deuxième attaque. Il leur demande de passer à un projet de résolution permettant un engagement américain. Il se garde bien de les informer de l’existence préalable des opérations clandestines du plan 34-A exécutées le 30 juillet et le 3 août (quoiqu’il en dise dans ses mémoires, voir 3 août).
De retour au Pentagone à 20 h 30, McN après plusieurs échanges téléphoniques avec l’amiral Sharp apprend que l’ordre d’attaque des porte-avions a été donné à 22 h 43 heure locale. Avant même leur exécution, à 23 h 36, LBJ fait une intervention télévisée pour informer la nation de l’existence de ces raids de représailles. Il les présente comme des opérations limitées, déclarant : « Nous ne cherchons pas à élargir la guerre. » McN, de son côté, fait une courte déclaration publique (McNamara, 1996, pp. 131-145 ; Halberstam, 1974, pp. 429-438 ; Le dossier du Pentagone, 1971, pp. 288-293).
Westmoreland commence à demander des renforts terrestres (Halberstam, 1974, p. 511). Cette demande sera une constante chez lui. Pour autant, lorsqu’il se plaindra des restrictions qui lui sont imposées (bombardements, incursions au Laos ou au Cambodge, refus de renforts, etc…), il ne mettra jamais dans la balance sa démission pour les contrer (Portes, 2008, p. 118).
5 août 64 : McGeorge Bundy (Sécurité nationale) réunit ses collaborateurs à la Maison Blanche pour leur annoncer que Johnson a décidé de demander une résolution au Congrès réclamant un engagement dans l’Asie du Sud-Est. Un des participants, Cater, lui fait remarquer qu’il n’a pas encore réfléchi à cette proposition. Bundy lui répond de ne pas le faire. C’est sénateur Fulbright qui est chargé d’en faire la demande auprès du Congrès (Halberstam, 1974, p. 432).
McN donne une seconde conférence de presse annonçant que 25 patrouilleurs n-v ont été détruits ou endommagés et que 90 % des réserves de carburant de Vinh sont en flammes (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 293).
6 août 64 : Au cours d’une séance secrète de la commission des Affaires étrangères au Sénat et à la Chambre des Représentants, le sénateur Wayne Morse (Orégon) qui ne votera pas la résolution du Tonkin apprend que des bateaux avec des équipages s-v ont attaqué deux îles n-v le 30 juillet. Un second sénateur, Gruening (Alaska), avance que McN était au courant de l’existence de ces raids et que la marine américaine les accompagnait, ce que ce dernier nie. De la même manière, Rusk, questionné, élude sur sa connaissance de l’implication des U.S.A. dans les opérations clandestines. Ces mensonges de McN, de Rusk et, plus généralement, de l’administration Johnson ne seront dévoilés qu’en 1970, au moment de la publication des Pentagon Papers par le New York Times (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 294).
Avant le vote de la résolution du Tonkin (date non précisée, peut-être 6 août ?) : Selon les mémoires de Johnson, ce dernier réunit 9 sénateurs et 7 députés (liste des participants in Johnson, 1972, p. 149, note) dans la salle du Cabinet à la Maison Blanche. McN leur expose sa version des faits sur les récents incidents. Il est alors question d’une riposte « limitée ». LBJ précise : « Nous voulons qu’ils [les Nord-Vietnamiens] sachent que nous n’allons pas fermer les yeux mais que nous n’avons pas non plus l’intention de bombarder les villes et nous pouvons les préparer à ce que nous avons projeté. » Rusk va dans le même sens. Le sénateur Bourke Hickenlooper estime qu’il est dans les attributions du président de proposer une résolution. Le Congrès jugera de sa pertinence. Chacun des représentants présents dont les sénateurs Mansfield (leader de la majorité démocrate) et Fullbright (président de la commission relations extérieures) exprime un avis favorable à la proposition présidentielle. L’heure est donc au consensus.
LBJ a prévu de faire une déclaration publique à 21 h 00 mais celle-ci a dû être repoussé de 2 h 30 pour assurer la sécurité de l’action des avions américains actuellement en opération (Johnson, 1972, pp. 149-151).
7 août 64 : Résolution du Golfe du Tonkin : Elle spécifie « que le Congrès approuve et soutient la détermination du président, en tant que commandant en chef, à prendre toutes les mesures nécessaires pour repousser toute attaque armée contre les forces des États-Unis et pour empêcher toute nouvelle agression [...] les États-Unis sont, par conséquent, prêts à prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l'utilisation de la force armée, pour aider tout membre ou État signataire du Traité de défense collective de l'Asie du Sud-Est qui demande de l'aide pour défendre sa liberté, si le Président le décide. »
Le texte rappelle donc les engagements pris dans le cadre de l’O.T.A.S.E. et estime que le maintien de la sécurité en Asie du Sud-Est fait partie des intérêts nationaux américains. Cette résolution est votée par 88 voix contre 2 (Wayne Morse et Ernest Gruening) au Sénat et à l’unanimité des 416 voix à la Chambre des Représentants après seulement 40 minutes de débats.
Mais beaucoup d’orateurs insistent sur le fait que cette résolution n’est pas pour autant un blanc-seing donné au président. Le sénateur Sherman Cooper demande : « Si le président Johnson décidait qu’il était nécessaire d’employer une force telle qu’elle nous entraîne dans la guerre, lui en donnerons-nous l’autorisation par cette déclaration ? » Le sénateur Fulbright qui dirige le sénat lui répond : « C’est ainsi que je l’interprète. » Déclarations de pure forme qui n’empêcheront pas le pays d’entrer progressivement dans un conflit qui n’a pas pris la forme d’une déclaration de guerre et dont on pense – à tort – qu’il sera court. C’est aussi un moyen, comme l’avait préconisé la précédente conférence d’Honolulu (voir 1er – 2 juin) et par la suite William Bundy (voir 3 juin), de préparer l’opinion publique américaine à une forme d’escalade (Le dossier de Pentagone, 1971, p. 293 et pp. 296-297 ; Halberstam, 1974, pp. 426-438).
LBJ dispose à ce moment précis d’un soutien de l’opinion publique. Selon un sondage Harris, 85 % de la population approuve les raids. En juillet, 58 % critiquaient la manière dont LBJ menait la guerre. Après l’affaire du Golfe du Tonkin, 72 % l’approuve (Halberstam, 1974, p. 439 ; Prados, 2011, p. 184). De son côté, la presse n’est pas en reste. Le Washington Post titre alors : « Le président a mérité la reconnaissance du monde libre ! »
Le Comité militaire révolutionnaire (C.M.R.) instauré par la junte après la chute de Diem adopte une nouvelle charte modifiant le régime républicain. Elle instaure un régime purement militaire, décrète l’état d’urgence sur tout le territoire s-v et s’arroge les pleins pouvoirs. Khanh devient président de la République, évinçant ainsi le général Minh.
Ce coup d’État interne provoque immédiatement des manifestations urbaines à Saigon, Danang et Hué des soutiens de Minh (bouddhistes et étudiants) qui réclament le retour à un régime civil et la préparation d’élections d’une assemblée constituante. Ces manifestations prennent une tournure anti-américaine : bâtiments mis à sac, notamment à Danang où le mess des officiers du M.A.C.V. est saccagé.
8 août 64 : Note des États-Unis à J. Blair Seaborn, ambassadeur canadien à Washington et membre de la C.I.C. Elle vise à justifier la réaction des États-Unis lors des incidents du golfe du Tonkin (Bodard, 1971, doss. Pentagone, pp. 197-200).
10 août 64 : Le général Taylor (ambassadeur), de retour de sa première mission à Saigon, estime dans un rapport adressé à McN que le gouvernement Khanh n’a pas plus de 50 % de chance d’être encore en place à la fin de l’année. Il est donc nécessaire d’exécuter au plus vite, avant le 1er janvier 1965, les plans militaires contre le N-V (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 298). Le récent rapport des chefs d’état-major ne reflète pas la réalité : « En gros, on peut dire que l’optimisme que l’on ressent à la lecture des résultats de cette enquête n’est pas partagé par les responsables américains les plus au fait de la situation au Vietnam. Les rapports ultérieurs nous diront qui est dans le vrai. » Par ailleurs, « la tactique du Vietcong est de harceler, d’user, de terroriser la population vietnamienne et ses dirigeants et de les plonger dans un état de démoralisation, sans même essayer de vaincre l’aviation sud-vietnamienne ou de conquérir du terrain par des moyens militaires. » La campagne contre-insurrectionnelle et le gouvernement de Khanh sont faibles, quitte à utiliser le thème de la « Marche vers le Nord » pour masquer ses dissensions et son « manque d’efficacité » car « ses ministres sont inexpérimentés et se jalousent ouvertement. » En conséquence, « la population est troublée et apathique. » (Le dossier du Pentagone, 1971, pp. 319-321 ; Bodard, 1971, doss. Pentagone, pp. 200-203).
Le représentant canadien de la C.I.C., Blair Seaborn, revoit le premier ministre Pham Van Dong (voir 30 avril et 18 juillet). Après les incidents du Golfe du Tonkin, ce dernier ne s’illusionne pas sur les intentions américaines et demeure résolu à poursuivre une politique militaire dure. LBJ écrit : « Nous ne pouvions que conclure à leur refus de limiter leurs actions ou à entamer des négociations. Seule une victoire obtenue sur le champ de bataille les intéressait. » (cité in Francini 2, 1988, p. 284).
11 août 64 : William Bundy (secrétaire d’État adjoint aux Affaires d’Extrême-Orient), dans un mémorandum adressé à la Défense et au département d’État, confirme la date avancée par Taylor du 1er janvier 1965 pour activer au plus vite le plan de bombardement contre le N-V (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 321-325). Mais ce délai ne pourra être respecté, faute de stabilité politique au S-V.
Concernant le Laos et les négociations de Paris en cours (voir mi-octobre), William Bundy souhaite « freiner tout ce qui pourrait conduire à une conférence » et souhaite « tenir Souvanna dans la position la plus ferme possible » (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 345). Les États-Unis sont plongés, plus que jamais, dans une logique guerrière.
12 août 64 : Giap déclare que « seule la lutte violente permettra aux peuples d’Indochine d’anéantir les plans agressifs des impérialistes américains. » (cité in Chaffard, 1969, p. 384). A son habitude, le VM alterne paroles violentes et mesurées, reflétant le vieux conflit entre la ligne dure du Parti (Giap) et celle qui est plus modérée (HCM).
Johnson prononce un discours à New York devant l’Association du Barreau américain. Il réaffirme l’importance de l’engagement militaire américain pour aider le S-V. Il argumente contre ceux qui critique cet engagement et prônent une forme d’isolationnisme : « […] Les États-Unis peuvent faire face à d’autres défis, ils n’y hésiteront pas, mais notre but au Vietnam, comme dans le reste de l’univers, est de contribuer à restaurer la paix et rétablir l’ordre […] Nul ne doit imaginer que nous nous laisseront décourager, ou repousser, ni provoquer à des réactions brutales ; mais nous continuerons à répondre à l’agression par la fermeté et aux attaques non provoquées par la mesure [...] » (extraits in Johnson, 1972, pp. 689-690).
13 août 64 : Seconde visite de Blair Seaborn (membre canadien de la C.I.C.) à Hanoi. Il rencontre à nouveau le premier ministre Vietnamien Pham Van Dong. La négociation n’aboutit pas plus que leur de leur entrevue du 18 juin. Seaborn reviendra à Hanoi en décembre mais ne rencontrera pas cette fois son interlocuteur (Lacroix in collectif, 1992, p. 212, note 13).
14 août 64 : Mémorandum de William Bundy (secrétaire d’État adjoint aux Affaires d’Extrême-Orient) à Taylor (ambassadeur au S-V), Unger (ambassadeur au Laos) et à l’amiral Sharp (C.I.N.P.A.C.). L’auteur se félicite du soutien de l’opinion américaine auprès de l’administration dont bénéficie l’annonce et la réalisation des représailles en cours (voir 7 août) (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 298).
Mi-août 64 : Westmoreland envoie un câble à l’amiral Sharp (C.I.N.P.A.C.) craignant une réaction du Vietcong qui se manifesterait par des attaques ouvertes du fait de l’escalade en cours (Halberstam, 1974, p. 511).
16 août 64 : Khanh promulgue la « Charte de Vung Tau », une disposition constitutionnelle qui renforce encore plus sa position à la présidence (cumulant les postes de chef d’État, de premier ministre et commandement de l’armée) sans toutefois la faire approuver par un référendum populaire. Cet acte heurte la communauté bouddhiste et les intellectuels qui descendent immédiatement dans la rue. Des manifestations urbaines éclatent à Saigon, Danang, Hué. Elles manifestent les soutiens de Minh (bouddhistes et étudiants) qui réclament le retour à un régime civil et la préparation d’élections à une Assemblée constituante. Ces manifestations prennent à nouveau une tournure anti-américaine : bâtiments mis à sac, notamment à Danang pour le mess des officiers du M.A.A.G. Le consul de France constate non sans une certaine satisfaction qu’une hostilité « apparaissait enfin au grand jour. Nombreux étaient ceux qui affirmaient préférer les Vietcongs aux alliés d’Outre-Pacifique et se déclaraient prêts à rejeter les Américains à la mer. » (cité in Journoud, 2011, pp. 189-190 ; Truong Vinh Le, 1989, pp. 125-126) S’ensuit une période de troubles intenses (voir 27 août).
17 août 64 : Dans un message, l’amiral Sharp (C.I.N.P.A.C.) confirme l’engagement américain : « Une fois déclenchée la pression sur le camp opposé, il ne sera plus question de la relâcher en aucune façon pour ne pas perdre le bénéfice des mesures prises. » (cité in Francini 2, 1988, pp. 283-284)
18 août 64 : L’ambassadeur Taylor câble de Saigon un message indiquant que face à la guérilla vietcong, on ne pourra se contenter, côté américain, de simples actions de contre-guérilla : « Il est certain qu’il faudra faire autre chose de plus dans les mois prochains. » Il préconise aussi le débarquement des Marines à Da Nang pour défendre la base aérienne (Le dossier de Pentagone, 1971, pp. 339-340). C’est le signal pour l’arrivée de troupes terrestres américaines au Vietnam.
23 août 64 : Le rapport d’un analyste de la C.I.A., William Matthias, préconise un règlement par la négociation basée sur une neutralisation jugée par lui comme inéluctable (Journoud, 2011, p. 175).
24 août 64 : Annulation de l’élection de Khanh suite à son récent coup d’État feutré. C’est un triumvirat composé des généraux Duong Van Minh, Nguyen Khanh et Tran Thiem Khiem qui prend sa succession (Toinet, 1998, p. 212). C’est le début d’une situation politique plus que confuse au S-V mise en place par une junte militaire dans laquelle il n’y a absolument aucune entente…
25 août 64 : Face à l’ampleur des manifestations, Khanh est obligé de démissionner.
26 août 64 : L’état-major américain valide l’avis de l’ambassadeur Taylor (voir 18 août), et notamment la nécessité de bombarder le Nord pour sauver le Sud (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 340). Quoi qu’en dise Johnson dans ses mémoires lorsqu’il affirme « […] je ne reçus, au cours de ma première année à la Maison Blanche, aucune proposition formelle de campagne aérienne contre le Nord-Vietnam émanant de l’accord de mes principaux conseillers. » (Johnson, 1972, p. 153)
Le président américain demeure cependant prudent, du moins en paroles, quant à l’engagement de son pays dans le conflit : « Nous ne sommes pas à la veille d’envoyer des garçons américains à 9 000 ou 10 000 miles loin de chez eux pour faire ce que des garçons d’Asie doivent faire pour eux-mêmes. » (cité in Nouilhat in collectif, 1992, p. 56)
27 août 64 : Mémorandum des chefs d’état-major à l’intention de McGeorge Bundy (Sécurité nationale) et McNaughton (vice-secrétaire d’État à la Défense) sur les opérations 34-A. Elles comportent 3 volets : les prises de renseignements, les opérations psychologiques et les opérations maritimes (Le dossier de Pentagone, 1971, pp. 327-329 ; Bodard, 1971, doss. Pentagone, pp. 205-207).
Nouvelle tentative de coup d’État. C’est le putsch des intellectuels (étudiants) et des bouddhistes (Toinet, 1998, p. 211). Cette tentative est liée à la promulgation par Khanh, le 16 août, d’une charte qui n’a pas été pas soumise à un référendum populaire. La foule encercle la résidence de Khanh aux cris de « A bas le pouvoir, à bas l’armée, à bas la dictature. »
Selon Truong Vinh Le, la prise de pouvoir de Khanh « n’avait jamais été approuvée par les bouddhistes qui voyaient en lui un « homme de Ngo Dinh Diem et de son Gouvernement, un gouvernement Diem sans Diem. » Khanh fait face dans un premier temps puis se retire à Dalat où il parle de prendre une retraite définitive. Il reçoit cependant l’appui des Américains qui voient en lui le seul recours politique du moment. Il reprend donc les rênes du pouvoir « timidement, fatigué, écœuré ». Il s’enferre dans la passivité et laisse ainsi la main à toutes les ambitions et il n’en manque pas (voir 13 septembre) (Truong Vinh Le, 1989, pp. 125-126).
29 août 64 : A l’occasion d’un barbecue organisé pour son 56e anniversaire dans son ranch de Stonewall (Texas), Johnson déclare aux journalistes présents : « il s’agit bien d’une guerre et d’une grande guerre et nous le reconnaissons » tout en affirmant avoir « soigneusement essayé de nous [les U.S.A.] contenir nous-mêmes et de ne pas étendre la guerre. » (Le dossier de Pentagone, 1971, p. 339).
Mise à l’écart de Nguyen Khanh qui est placé officiellement en « observation médicale » (Toinet, 1998, p. 212).
C’est toujours en théorie un « triumvirat » constitué de Duong Van Minh (bouddhistes), Tran Thien Khiem (anciens diémistes), Nguyen Khanh (catholiques et Américains) qui dirige tant bien que mal le pays, mais sans Khanh… Le Comité militaire révolutionnaire (C.M.R.) est dissous et se transforme en « Comité directeur provisoire de la nation et de l’armée », une vague tentative pour sauver un régime qui se liquéfie de jour en jour (Journoud, 2011, p. 190).