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par Jean-François Jagielski

Août 1945

Début août 45 : Reconstitution de l’unité du Vietminh par le ministre des Affaires étrangères, Tran Van Chuong.

D’entrée, pour le VM, la décision de lancer l’insurrection générale s’élabore, sans consulter ni les Russes ni les Chinois. Cette pratique a un double avantage. Celle d’être diplomatiquement autonome et indépendant. Elle permettra également aux communistes vietnamiens de toujours entretenir de plus ou moins bonnes relations avec ces deux pays et d’obtenir une aide des deux parties, y compris lorsque les relations entre la Chine et l’U.R.S.S. se dégraderont.

Les Japonais qui mesurent la popularité grandissante du VM dans la population agissent de moins en moins contre lui. On négocie pour ménager l’ordre et soutenir ainsi Bao Daï et son gouvernement projaponais (Pedroncini, 1992, p. 41).

Le corps expéditionnaire français est constitué de deux divisions. La 9e D.I.C., équipée d’un matériel usagé, peut être envoyée en Indochine dans un délai de un mois. La 1ère D.I.C.E.O., qui sera transformée en 3e D.I.C. le 14, doit l’être quant à elle pour le 1er octobre (Bodinier, 1987, p. 32). Elle sera renforcée par des éléments la 2e D.B. à partir du 16.


1er août 45 : Sainteny, ayant fait le point sur les demandes du VM (voir 25 juillet), demande à Calcutta d’agir sur Paris pour que De Gaulle désigne un représentant de la France capable de lui indiquer les limites à accorder dans les concessions et quels sont les engagements pouvant être considérés par lui comme acceptables (Devillers, 1988, p. 64).

L’attitude de la population française en Indochine à l’égard de la Résistance française antijaponaise demeure dans une expectative attentiste. Une note de situation sur l’Indochine issue de la plume de Jean Royère à Kunming observe : « Dans l’ensemble, 80 % de la population française se dit « gaulliste », mais d’un gaullisme un peu particulier. En effet, d’une part, l’action des « partisans » se borne à des discussions sous le manteau, d’autre part, bon nombre d’entre eux approuvent toujours la politique intérieure de Pétain et considèrent avec méfiance le Gouvernement d’Alger (pour des éléments de gauche) […] La plupart des « gaullistes » se trouvent parmi les non-fonctionnaires. Dans l’administration, la majorité reste neutre et se trouve placée entre la crainte d’être révoquée après la libération et celle d’être internée si elle manifeste des sentiments anti-vichystes. Parmi les hauts-fonctionnaires, une minorité apparaît collaborationniste […] La Légion est toujours active […] Le sentiment général est plutôt pro-américain. » (cité in Turpin, 2005, p. 61) Selon Turpin, « le problème fondamental que devait résoudre le G.P.R.F. est qu’il y avait indéniablement une étroite communauté de vue entre l’amiral Decoux et les Français d’Indochine quant à la politique à mener vis-à-vis des Japonais. » (ibid.)

De son côté, Paul Mus (agent des services spéciaux de la France libre qui connaît parfaitement l’Indochine pour y avoir vécu) écrit une « Note sur la crise morale indochinoise » encore plus pessimiste : « Malaise, reconnaît-on mais ce terme est un euphémisme quand les nationaux de ce pays que nous venons de perdre nous réclament l’indépendance totale ou ne désavouent pas ceux qui la réclame et quand ils se refusent à nouer des relations avec l’administration française. Nous sommes devant une crise de croissance et, ce qui la caractérise, c’est que l’élite indochinoise s’en est aperçue plus vite et plus complètement que nous. » (citée in Isoart, 1982, p. 50)


2 août 45 : Fin de la Conférence de Postdam (Francini 1, 1988, p. 202). La partition du Vietnam en 2 zones d’occupation est actée : au Nord par les Chinois, au Sud par les Britanniques. Le Français n’ont pas été invités et, pour l’instant, n’ont pas été mis au courant de cette partition.


6 août 45 : Première bombe atomique américaine sur Hiroshima.

Sainteny n’ayant obtenu satisfaction à sa demande du 1er revient à la charge. Les dirigeants du VM sont « désireux d’avoir affaire à des négociateurs habilités à discuter avec eux les bases d’un accord qu’ils souhaitent définitifs. » Il espère la venue d’administrateurs de la mission coloniale de Calcutta (De Raymond, Pignon ou Messmer) car il a le sentiment que des portions du territoire tonkinois vont être libérées et que des décisions rapides, énergiques et grosses de conséquences vont devoir être prises sans retard  (Devillers, 1988, p. 64).


7 août 45 : Le vice-amiral Thierry D’Argenlieu apprend de la bouche de Gaston Palewski l’intention de De Gaulle de le nommer haut-commissaire en l’Indochine (voir 13 août). Ce poste est demeuré vacant depuis le 9 mars avec la capture de l’amiral Decoux par les Japonais. D’Argenlieu acceptera dès le lendemain de cette annonce.

Le général américain Chennault, commandant la 14e armée de l’air basée en Chine, et qui a toujours adopté une position francophile contre l’avis de son supérieur le général Wedemeyer et des Chinois, est contraint de quitter l’Indochine (Sainteny, 1953, p. 30, note 1). Les Français perdent avec lui l’un de leur très rare appui américain.

HCM rejette définitivement les derniers liens avec le « Gouvernement Républicain provisoire du Vietnam » basé en Chine (voir 25-28 mars 1944). Sous l’effet d’un « noyautage » progressif, 11 de ses membres sur 14 appartiennent désormais au VM ou au P.C.I. Il contrôlera tout le N-V dès la défaite des Japonais (voir 13 août) (Fall, 1960, p. 38).


8 août 45 : D’Argenlieu accepte le poste de « haut-commissaire » en Indochine. Il a refusé l’appellation de « gouverneur général » qui symbolise trop, selon lui, la période coloniale. Selon Cadeau, le titre de « haut-commissaire a l’avantage de signifier une relation directe avec le chef du gouvernement. » (Cadeau, 2019, p. 139).

Le gouvernement nationaliste de Tran Trong Kim, qui n’a pas su faire face au chaos (voir 9 - 10 mars) et s’est avéré rapidement dépassé par la situation alors que les Japonais sont en pleine déroute, présente sa démission.

Bao Daï obtient des Japonais la rétrocession de la Cochinchine, ce qui rétablit l’unité du Vietnam (Marangé, 2012, p. 145). Des gouverneurs sont nommés pour le Nord et le Sud. Il y a donc un retour de la réunification du pays mais octroyée par des Japonais qui sont en train de perdre la guerre. Pour autant, Bao Daï n’oubliera jamais ce don des Japonais et demeurera à jamais intransigeant sur la question de la réunification de son pays.

L’U.R.S.S. déclare la guerre au Japon.


9 août 45 : Deuxième bombe atomique américaine sur Nagasaki.

Au Cambodge, après le coup de force des Japonais du 9 mars, la situation est demeurée calme. Le pays ne connaît pas les passions nationalistes de son voisin vietnamien et vit dans une forme d’attentisme. Les Japonais ont transféré le pouvoir à Sihanouk qui doit l’exercer avec un gouvernement sous le contrôle d’un « conseiller suprême » nippon. Les Japonais ont cependant fait nommer au poste de ministre des Affaires étrangères un khméro-vietnamien de la communauté Khmère Krom (minorité cambodgienne de Cochinchine), Son Ngoc Thanh. Ce dernier avait dû se réfugier en 1942 à Tokyo tant il s’était compromis avec les Japonais. Par un coup d’État, à la veille de leur capitulation, les Japonais obligent Sihanouk à remettre le pouvoir aux nationalistes sous la direction de leur protégé qui fait arrêter le premier ministre Ung Hy et le remplace. Ses partisans se rendent en force chez Sihanouk qui doit renoncer à toute forme de pouvoir. Sentant le danger lié à la situation précaire des Japonais, le roi temporise (Gras, 1979, pp. 54-55 ; Cambacérès, 2013, pp. 49-50).

Au Vietnam, les Japonais libèrent un grand nombre de prisonniers politiques que les Français avaient emprisonnés ou envoyés au bagne. Ces derniers reprennent rapidement leurs activités subversives en se dirigeant vers les villes, ce qui va sérieusement compliquer la tâche des autorités coloniales (Devillers, 1988, p. 69).

Malgré les demandes pressantes de Sainteny pour obtenir de nouveaux interlocuteurs audibles côté français (voir 1er août) et des instructions claires pour négocier, le colonel Roos (commandant la D.G.E.R. à Kunming) se contente de lui donner l’ordre « de descendre si possible sur Hanoi. » (Turpin, 2005, p. 118) C’est faire preuve d’un optimisme exagéré car les Chinois ne l’entendent pas de cette oreille.


10 août 45 : HCM lance un ordre d’insurrection général qui n’est pas contré par les Japonais. Il n’y a pas à proprement dire de bain de sang (Cadeau, 2019, p. 122), même si des morts et des blessés sont à déplorer dans les jours à venir (Ngo Van Chieu, 1955, pp. 34-35).

Les Français sont tardivement mis au courant des décisions de la Conférence de Postdam et les accueillent avec stupeur (Francini 1, 1988, p. 224). Un rapport de l’état-major de Leclerc en date du 25 septembre spécifiera : « C’est en arrivant ici que le général [Leclerc] a appris les clauses de Postdam et la coupure de l’Indochine en deux, de la bouche de Mountbatten. Et ce dernier lui a même confié : si Roosevelt vivait encore vous ne rentreriez pas en Indochine. » (cité in Turpin, 2005, p. 115, note 9)

Archimedes Patti (major dans l’O.S.S.) déclare à ses subordonnés : « Les Chinois ont toute latitude pour rentrer en Indochine quand il leur semblera bon. Ne vous en mêlez pas. Notez qu’en tant qu’Américain, il est dans notre intérêt de rester impartiaux. » (cité in Pedroncini, 1992, p. 60)

Lettre de Georges Bidault (Affaires étrangères) à René Massigli (ambassadeur de France à Londres) : « L’emploi de la bombe atomique et l’entrée en guerre de l’U.R.S.S., en faisant prévoir une fin très prochaine du conflit, ont donné à cette préoccupation [retour d’une souveraineté française en Indochine] un caractère d’extrême urgence. Il importe donc que vous fassiez valoir chaque fois que vous en aurez l’occasion que la rapide reprise en main administrative de l’Indochine par les autorités françaises permettra seule d’éviter des désordres préjudiciables à la conduite des opérations de guerre en Extrême-Orient […] Il serait d’un égal intérêt pour le fondement d’une paix durable en Asie, qu’une administration compétente et forte, agissant en coopération complète avec les Alliés, y fut réinstallée […] Un effort particulier sera tenté auprès des Américains, en vue de la résolution la plus rapide de ces problèmes à l’occasion de la prochaine visite du général De Gaulle à Washington. » (cité in Turpin 2005, p. 114, note 8)

Au Cambodge, Son Ngoc Thanh est nommé premier ministre de par la volonté de l’occupant japonais (Sihanouk, 1979, p. 231).


11 août 45 : Leclerc est mis au courant par Juin (chef d’état-major) de sa nomination comme commandant supérieur des troupes en Indochine (Pedroncini, 1992, p. 88).

HCM fait savoir qu’il est prêt à se rendre à Kunming pour entrer en contact avec les Français et leur demander de préciser leur position. Une équipe américaine se charge de rapporter à Kunming les demandes des Vietnamiens pour les transmettre à Sainteny à Mission 5. Ils demandent le suffrage universel pour l’élire un parlement, l’indépendance dans laps de temps de 5 à 10 ans, que l’on accorde aux Indochinois les libertés définies par la récente charte des Nations Unies (Devillers, 1988, p. 63).

Le colonel Roos, commandant la D.G.E.R. à Kunming, informe Mountbatten de l’envoi de 6 équipes de reconnaissance clandestines sur Hanoi (dirigée par Messmer), Saigon (dirigée par Cédile), Vinh, Sept Pagodes, Hué et Phnom Penh. Ces opérations, menées avec des « bouts de chandelles » et une bonne dose d’improvisation, faute de mieux, se solderont toutes par des échecs (Turpin, 2005, p. 118-119, note 35). Messmer sera très critique sur les compétences de son supérieur et de son équipe. Ils pensent, à tort, appliquer au Tonkin où les populations sont hostiles au retour des Français, ce qui avait fonctionné au moment de la Libération en métropole (Turpin, 2005, p. 120, note 49).


12 août 45 : Après son échec à rencontrer des autorités compétentes lors de sa visite à Paris, Sainteny adresse aux autorités françaises un nouveau télégramme d’alerte : « En fait Chinois préparent nettement curée au Tonkin et multiplient embûches pour s’opposer à l’intervention des troupes Alessandri et nos commandos […] Suis inquiet constater Calcutta comme Paris ne semblent pas comprendre gravité situation. Je répète Chinois soutenus par certains grands chefs américains s’évertuent à nous éloigner Indochine. » (cité in Sainteny, 1967, p. 49). Il réitèrera son alerte le 13, toujours en vain.


13 août 45 : Le Parti communiste indochinois (P.C.I.) organise une « conférence nationale » dans le village de Tran Tao (Moyenne Région, près de Tuyen Quang) et décide de s’emparer du pouvoir du fait du départ éminent des Japonais, avant l’arrivée des Alliés, afin que ceux-ci se trouvent devant un fait accompli. A cette époque, le P.C.I. n’est constitué que de 5 000 membres pour une population de 23 millions d’habitants au Vietnam. C’est dire sa faiblesse, d’autant plus qu’il ne bénéficie d’aucun soutien communiste étranger. De plus, il a également été victime de la répression coloniale depuis ses débuts. Dans un premier temps, il a beaucoup de mal à réunir ses membres et à les faire communiquer entre eux. HCM n’en constitue pas moins un « Comité de libération du peuple vietnamien » constitué de 14 membres tous communistes : Giap, Pham Van Dong, Chu Van Tan, Nguyen Luong Bang, Duong Duc Hien, Cu Huy Can, Nguyen Van Xuyen en font partie (Deroo, Dutrône, 2008, p. 16 ; Francini 1, 1988, pp. 202-203). Le Comité décide de « s’emparer du pouvoir des mains des fascistes japonais avant l’arrivée des Alliés » et lance un appel à l’insurrection générale. Les Japonais, soucieux de contrecarrer le retour des Français et de pratiquer le politique du pire, sont tout disposés à lui céder le pouvoir (Deroo, Dutrône, 2008, p. 16).

La mission Thomas (groupe de résistance français) accompagne, sans prendre part aux combats, des troupes vietminh conduites par Giap. Elles s’emparent de la garnison japonaise de Thaï Nguyen (Deroo, Dutrône, 2008, pp. 15-16).

De Gaulle reçoit D’Argenlieu et lui annonce sa nomination officielle au poste de « haut-commissaire » et non de « gouverneur général », fonction qui l’aurait obligé de passer ses communications avec le gouvernement par le biais du ministère des Colonies. Il lui confie qu’il ne veut pas nommer Leclerc commandant en chef autonome. Même si ce dernier est plus prestigieux dans sa carrière militaire, c’est l’amiral qui doit occuper cette fonction pour « prévenir tout conflit d’autorité en rassemblant tous les pouvoirs en la personne du Haut-commissaire » (voir 15 août) (D’Argenlieu, 1985, p. 29). Ce choix assez maladroit de De Gaulle au niveau des prérogatives n’empêchera pas l’existence rapide de fortes tensions entre les deux hommes.

Un document non retrouvé dans les archives et fixant les attributions de chacun a été rédigé le 13 par Leclerc et d’Argenlieu. L’expression « commandant en chef » y figurait-elle ? Probablement. Ce qui est sûr, c’est que ce document a été retoqué par De Gaulle dès le lendemain de sa rédaction. Une copie du décret du 2 mai 1939 a été retrouvée dans les papiers de Leclerc. Elle précise que « les commandants en chef sur les théâtres d’opérations coloniaux [reçoivent] directement du gouvernement leurs directives pour la conduite des opérations militaires. » (Pedroncini, 1992, pp. 89-90)


14 août 45 : Le 11 mars, Bao Daï a proclamé l’indépendance de l’Annam et du Tonkin. La Cochinchine est demeurée jusqu’alors sous domination japonaise. Cette fois, avec l’accord des Japonais (voir 11 juin), Bao Daï annonce l'annexion de la Cochinchine, colonie française, à une république du Vietnam  qui est proclamée ce jour à Saigon. Le chef de l’État y nommera le 19, soit 4 jours après la capitulation japonaise, Nguyen Van San, au rang de vice-roi. Le gouverneur japonais Fujio Minoda lui transmettra brièvement les pouvoirs, avant l’arrivée en force du Vietminh ce même jour (Pedroncini, 1992, p. 40). Par le bais de cette passation de pouvoir, les Japonais tentent de rallier, malgré leur départ inéluctable, tous les pronippons : Caodaïstes, Hoa Hao et même les trotskystes (Devillers, 2010, p. 54).

De Gaulle déclare à nouveau vouloir « rétablir la souveraineté de la France dans les territoires de l’Union indochinoise » (De Folin, 1993, p. 128).

En Cochinchine, les Japonais cèdent le pouvoir à des organisations anticoloniales qui leur étaient auparavant hostiles, notamment aux nationalistes du Front national unitaire (F.N.U.). Celui-ci appelle à une vaste manifestation prévue pour le 21 en faveur de l’indépendance. Pour rallier ces forces nationalistes tout en leur mentant, Tran Van Giau, chef du Comité exécutif provisoire et futur dirigeant le Comité du Nam Bo (voir 25 août), cherchera à les convaincre du fait que les alliés ont reconnu le VM et que l’arrangement conclu avec les Japonais ne peut que nuire à l’indépendance (Marangé, 2012, p. 150-151).

A Kandy (Ceylan), le général américain McArthur est investi du commandement suprême des forces alliées (Pedroncini, 1992, pp. 35-36).

Le général Donovan, dirigeant l’O.S.S. à Washington, donne l’ordre d’envoyer 6 équipes au N-V placées sous la responsabilité du major Archimedes Patti. Du fait de tergiversations, ordres et contre-ordres, ces équipes ne partiront au final que le 22 août (Pedroncini, 1992, p. 60).

Au Cambodge, Son Ngoc Thanh devient président du conseil des ministres. Son gouvernement pro-japonais demeurera en place jusqu’au 16 octobre (Jennar, 1995, p. 141).


Deuxième quinzaine d’août 45 : Le G.P.R.F. soumet aux Britanniques plusieurs memoranda portant sur les affaires civiles relatifs au stationnement des troupes britanniques au sud de 16e parallèle. Ils seront approuvés par De Gaulle le 29 septembre (voir 8 octobre) (Turpin, 2005, p. 153).


15 août 45 : Reddition du Japon qui signe un armistice. A ce moment, environ 70 000 Japonais occupent l’Indochine.

Le Vietminh lance immédiatement un ordre de soulèvement général qui sera surtout suivi dans les grandes villes. Hanoi et Saigon sont aux premières loges.

La présence française en Indochine se résume à 22 groupes de résistance disposant d’environ 3 200 partisans et 21 stations-radio basées dans les hautes régions du Laos et du Tonkin (Turpin, 2005, p. 92).

L’ambassadeur des États-Unis à Paris informe officiellement (mais tardivement…) le ministre des Affaires étrangères Georges Bidault de la décision majeure de la conférence de Postdam concernant le Vietnam, à savoir son partage en deux parties au niveau du 16e parallèle, avec une zone d’occupation chinoise au Nord et une autre britannique au Sud (Pedroncini, 1992, p. 92, texte cité p. 367).


16 août 45 : Capitulation du Japon (De Folin, 1993, pp. 125-126). Le général japonais Tsushihashi remet ses pouvoirs politiques au délégué impérial tonkinois Phan Ke Toai, un personnage tout acquis au VM. Le général Terauchi, commandant en chef de l’armée du Sud, donne l’ordre à toutes les troupes japonaises d’Asie du Sud-est de cesser le combat (Pedroncini, 1992, pp. 41-42).

Création en métropole d’un groupement de la 2e D.B. sous le commandement du lieutenant-colonel Massu (2 200 hommes avec un escadron équipé de blindés légers et d’automitrailleuses). Cette unité ne sera débarquée en totalité que le 15 septembre.

Un « Congrès national du peuple » se réunit à Tan Trao (Tonkin). Des centaines de délégués du VM convoqués, seule une soixantaine arrive à destination. Ils élisent un Comité de Libération nationale, véritable gouvernement provisoire. HCM est élu président à l’unanimité (Francini 1, 1988, p. 203). C’est le signal pour lancer l’insurrection générale préparée de longue date et entamer une marche sur Hanoi où le VM espère s’emparer du pouvoir et négocier en position de force avec les Alliés. Des ordres sont envoyés en ce sens aux membres du VM et du P.C.I. au Tonkin, en Annam et en Cochinchine (Marangé, 2012, p. 146).

Sainteny ne parvient pas à rejoindre Hanoi par avion comme le lui avait demandé le colonel Roos, commandant la D.G.E.R. Les Américains de l’O.S.S. et les Chinois le bloqueront d’un commun accord jusqu’au 22 (Francini 1, 1988, pp. 225-226 ; Sainteny, 1967, pp. 60-69).

Bien qu’averti depuis fin juillet de la partition de l’Indochine en deux zones d’occupation, De Gaulle réagit tardivement pour constituer une équipe de gouvernance pour l’Indochine. Après une révision laborieuse des textes d’attribution de fonctions (voir 13 et 14 août) et une réunion du Comité de Défense, il nomme l’amiral Thierry D’Argenlieu au poste de haut-commissaire en Indochine et commandant en chef du C.E.F.E.O. L’instruction précise :   « Il a pour première mission de rétablir la souveraineté française dans les territoires de l’Union indochinoise. » Du faite de son titre de Haut-commissaire, il dépend dans ses attributions uniquement du seul chef du gouvernement (D’Argenlieu, 1985, p. 27). Il entrera en fonction le 31 octobre et occupera le poste jusqu’au 5 mars 1947. L’homme connaît la région puisque De Gaulle l’avait nommé haut-commissaire pour le Pacifique dès 1941.

De Gaulle nomme également ce même jour le général Leclerc au poste de « général commandant supérieur des troupes en Extrême-Orient […] chargé, sous l’autorité du haut-commissaire, de prendre toutes les mesures tendant au rétablissement de cette souveraineté. » Leclerc n’accepte cette fonction qu’à contre-cœur, il aurait préféré être nommé au Maroc. Il est pour l’instant le plus haut gradé et a d’entrée du mal à accepter ce statut de subalterne. De plus, leur conception de la mission qui leur est confiée diffère. Le général, contrairement à D’Argenlieu, comprendra vite que la solution est de trouver un compromis politique avec les Vietnamiens. D’Argenlieu lui s’en tiendra aux paroles de De Gaulle, à la déclaration du 24 mars qui entend mettre en œuvre le strict rétablissement de la souveraineté française. Pour complexifier encore un peu plus les choses, jusque-ici, les deux hommes ignorent l’un comme l’autre les décisions qui ont été prises à Postdam et qui sont restées secrètes jusqu’au 15, notamment la partition en deux zones d’occupation, chinoise au Nord du 16e parallèle et britannique au Sud. Ils ne découvriront cette situation que le 22 août (De Folin, 1993, pp. 95-96). Dans sa Chronique d’Indochine, évoquant sa conception des choses, D’Argenlieu écrit : «  Il y faut […] inaugurer la pensée politique, administrative, économique, sociale, enclose dans la déclaration du Gouvernement provisoire du 24 mars 1945 ». « Pensée politique » que les mémoires de l’amiral énoncent « nouvelle [car] pour ces motifs sérieux et concrets, je ne suis pas d’humeur à assumer un gouvernement général de l’Indochine dans le style d’un passé révolu. » (voir 8 août) (D’Argenlieu, 1985, pp. 27-28). Dans les faits, il demeurera quand même l’homme d’un « passé révolu » qui saisit mal l’ampleur des bouleversements qu’ont introduit en Indochine la défaite française de 1940, l’occupation de la péninsule et la proclamation japonaise d’indépendance de l’Indochine. A sa décharge, il est vrai que D’Argenlieu ne fait qu’appliquer strictement les ordres qu’il reçoit de De Gaulle (Cadeau, 2019, p. 142). Mais il ne fait et ne fera rien pour les contrarier lorsque ceux-ci s’avèreront peu en phase avec la réalité indochinoise du moment.

Pour bien marquer la hiérarchisation des rôles entre l’amiral et le général, De Gaulle ne recevra pas Leclerc qu’il n’a pourtant pas vu depuis le 18 juillet mais le seul D’Argenlieu. Il l’avait d’ailleurs nommé vice-amiral en décembre 1944, c'est-à-dire l’équivalence dans la Marine des quatre étoiles de Leclerc (Pedroncini, 1992, p. 90).

Création d’un « groupement de la 2e D.B. » sous les ordres du lieutenant-colonel Massu qui est destiné à constituer l’avant-garde du futur corps expéditionnaire français (voir début août). Il comprend un escadron de chars légers, un escadron d’automitrailleuses, un bataillon d’infanterie et une compagnie du Génie (2 200 hommes) (Bodinier, 1987, p. 32).

Après les parachutages ratés de représentants par la D.G.E.R. en Indochine (Messmer et Cédile), la série des tentatives ratées du retour des Français prend une nouvelle forme avec l’envoi d’une jonque armée sur Haïphong, le Frézouls. Les Japonais s’opposent purement et simplement à son débarquement (Turpin, 2005, p. 120).


16 - 22 août 45 : Boqué un temps par les Chinois et les Américains, Sainteny ne renonce pourtant pas et parvient à rejoindre tant bien que mal Hanoi en trompant la vigilance des uns et des autres. Suite à la capitulation japonaise, son équipe navale sous les ordres du lieutenant de vaisseau Blanchard est présente à Haiphong avec deux patrouilleurs pour y montrer les couleurs françaises (Sainteny, 1967, pp. 77-78).

L’O.S.S. accepte finalement d’intégrer quatre Français (dont Sainteny) dans la Mercy Team de Patti (officiellement venue avec une mission de recherche des corps des Américains tués en Indochine mais qui est, dans les faits, une organisation d’espionnage). Ils sont sous uniforme américain et ont pour consigne de ne pas aider à une reprise par la force de l’Indochine. Leur départ a lieu le 22 août (Francini 1, 1988, p. 226).


17 août 45 : Retour discret d’Ho Chi Minh A Hanoï en vue de former un gouvernement. Une manifestation de 20 000 personnes, théoriquement appelée à soutenir le gouvernement Tran  Trong Kim mis en place par les Japonais, se transforme en manifestation de soutien au VM. Depuis le balcon du théâtre d’Hanoï, le drapeau impérial est jeté à bas et remplacé par celui du VM (Deroo, Dutrône, 2008, p. 16 ; Francini 1, 1988, p. 203). Les différentes manifestations qui suivront entraîneront la mort de 15 Français, d’autres seront blessés, molestés ou pillés (Gras, 1979, p. 33).

Bao Daï fait une déclaration dans laquelle il proclame que « l’empereur se déclare toujours prêt à mettre les intérêts de son peuple au-dessus de son trône. Il invite donc les chefs du front du Vietnam à former un nouveau gouvernement. » (voir 25 août) (Cadeau, 2019, pp. 123-124)

Le Comité de Défense nationale français décide d’envoyer un corps expéditionnaire de 55 000 hommes accompagnés ultérieurement de troupes supplémentaires, non comprises les troupes qui sont déjà en Extrême-Orient : le 5e R.I.C. à Ceylan et les 5 000 hommes d’Alessandri repliés en Chine (Bodinier, 1987, p. 32). Il aurait dû débarquer en théorie en trois échelons : entre le 1er et le 15 septembre, pour le 15 octobre et pour le 15 novembre. Mais, dans les faits, ce débarquement sera reporté de 6 mois, faute de moyens de transport et des dotations matérielles nécessaires. Seuls deux groupes de transport et un groupe de chasse sont envoyés sur place, ainsi qu’une escadre commandée par l’amiral Auboyneau.

Première lettre de D’Argenlieu à Leclerc : « La volonté du gouvernement provisoire de la République française est de faire du neuf, mais dans l’ordre et selon la raison. La déclaration du 24 mars 1945 et le message du général De Gaulle du 14 août doivent être compris et interprétés en ce sens […] La réorganisation administrative nécessite de l’épuration. Vous estimerez comme moi qu’elle doit frapper haut, fort, vite et peu […] Vous aurez à vous assurer de la personne des amiraux Decoux et Béranger, du général Aymé et de leur retour en France sans délai par avion. » (D’Argenlieu, 1985, pp. 32-33 ; Pedroncini, 1992, p. 93) Cette missive montre combien l’amiral, qui n’arrivera que le 31 octobre en Indochine, perçoit mal la réalité des choses. D’une part, la déclaration du 24 mars est un texte complètement dépassé au vu de ce qui se passe en Indochine. D’autre part, en s’en prenant à Decoux, l’amiral semble vouloir y mener une épuration à la française, mesurant mal combien l’occupation japonaise a exacerbé  le nationalisme du peuple vietnamien, rendant ainsi les choses bien plus complexes et différentes qu’elles le sont en métropole.


18 août 45 : Leclerc quitte la France pour l’Indochine. Il connaît mal la situation, n’a jamais entendu parler du VM que les Français eux-mêmes cernent mal, pensant même pouvoir atterrir à Saigon alors que la ville est en pleine ébullition (De Folin, 1993, p. 96).

Bao Daï fait parvenir au président Henry Truman une lettre dans laquelle il stipule que « […] le peuple vietnamien ne veut plus, ne peut plus supporter aucune domination ni aucune administration étrangère […] » Il demande aux Américains de faire passer ce message auprès de De Gaulle qui doit se rendre sous peu aux États-Unis et y rencontrer le président américain (Brocheux, 2003, p. 164).

Le même jour, par l’entremise de Sainteny (délégué de De Gaulle au Tonkin et dans le Nord-Annam) et de Léon Pignon (son conseiller politique), HCM envoie, selon une source chinoise, un second message aux Français abordant 5 points qui lui paraissent cruciaux :

- Le gouvernement français doit reconnaître le gouvernement vietminh.

- Le gouvernement vietminh doit reconnaître l’autorité de la France sur le Vietnam pour une durée de 5 ans au-delà de laquelle le gouvernement français concédera l’indépendance au pays.

- Pendant cette période de transition, le Vietnam sera autonome pour gérer ses affaires intérieures.

- La France jouira de privilèges dans le domaine de l’industrie et du commerce.

- Les Français pourront avoir un rôle de conseillers des Vietnamiens au niveau des relations extérieures (Devillers, 1988, pp. 383-384, note 28).

A Hanoï, ne pouvant tenir le rapport de force, les nationalistes remettent entièrement le pouvoir au VM (Deroo, Dutrône, 2008, p. 16 ; Cadeau, 2019, p. 123).

Le général japonais Tsuchihaschi, commandant la 38e armée à Saigon, fixe le début du cessez-le-feu au 21 à 6 h 00 (Pedroncini, 1992, p. 42). Il retoque la demande de l’amiral Decoux, détenu à Loc Ninh depuis le 9 mars, demandant à rejoindre Saigon au plus vite et pouvoir y rejouer un rôle politique. Le Japonais se réfugie derrière « l’absence d’instructions du commandant en chef du Théâtre d’opérations, l’amiral Mountbatten ». Ce dernier ordonne de laisser les choses en état jusqu’à l’arrivée des Alliés (Turpin, 2005, p. 131).


18 - 20 août 45 : Différents messages pressants de Bao Daï et de l’impératrice Nam-Phuong sont adressés à Truman, Georges VI, Tchang Kaï Chek et De Gaulle. Ils demandent tous la reconnaissance de l’indépendance du Vietnam. L’empereur s’adresse aux Français dans un message radio diffusé puis par le biais d’une lettre adressée à De Gaulle le 19.


19 août 45 : Le Vietminh entre à Hanoï et prend le pouvoir. La République démocratique du Vietnam est proclamée au Nord. Les bâtiments publics occupés par le gouvernement de Bao Daï sont pris d’assaut, à l’exception de la Banque d’Indochine gardée et protégée par les Japonais. Le 38e armée japonaise envoie des blindés et des soldats pour maintenir l’ordre mais se garde bien d’intervenir dans le déroulement des événements.

Le gouvernement révolutionnaire est proclamé dans le palais du résident général. Le Vietminh revendique le soutien des Alliés, tout en jouant habilement une politique de division : les Américains contre les Français, les Français contre les Chinois, les Chinois contre les Américains. Il a obtenu l’abdication mais aussi le soutien de Bao Daï qui déclare :             « Mieux vaut être citoyen d'un pays indépendant que d'être roi d'un pays esclave. » Le gouvernement d’HCM lui attribue à Hanoï un rôle de « conseiller suprême », sous le simple nom de « citoyen Vinh Thuy ». Sa nomination sera officiellement entérinée le 10 novembre. Mais Bao Daï sait aussi se méfier d’HCM dont il écrit dans ses mémoires : « C’est un très grand comédien ! Tour à tour paternel, affectueux, jouant de son aspect fragile […] J’avais en face de moi derrière le masque, un militant marxiste endurci par trente ans de lutte […] Un combattant plein de ruse. Capable de toutes les patiences et de toutes les duplicités, apte à toutes les feintes, implacable à l’heure de la décision. Toujours prêt aux embrassades pour mieux vous étouffer. » (Bao Daï, 1980, pp. 85-86)

La Radio du Vietnam diffuse trois messages de Bao Daï : tous les fonctionnaires doivent préserver l’indépendance ; une proclamation au peuple vietnamien où l’empereur déclare préférer perdre son trône plutôt que de le garder dans un pays asservi ; une adresse à De Gaulle. Dans son message à ce dernier, il demande « de reconnaître franchement l’indépendance du Vietnam et de renoncer à toute idée de rétablir ici la souveraineté ou une administration française sous quelque forme que ce soit. Nous pourrions si facilement nous entendre et devenir des amis si vous vouliez cesser de prétendre redevenir nos maîtres. » (cité in extenso in Devillers, 2010, pp. 417-418 ; Devillers, 1988, pp. 69-70)

Des mouvements populaires antifrançais voient le jour lors des mouvements de manifestations vietnamiennes (Francini 1, 1988, pp. 203-204). Toutefois, en Cochinchine, bien qu’ayant organisé des manifestations les 19 et 20 août, le VM doit composer avec les mouvements nationalistes et leur assise populaire, appuyés par les Japonais (voir 21 août). Le VM se fond dans Front national unifié, tout en s’efforçant grâce à l’action de Tran Van Giau (chef du Comité exécutif provisoire au Sud) de se distinguer des nationalistes (Cadeau, 2019, p. 124).

Le général américain MacArthur nouvellement investi du commandement suprême des forces alliées (voir 14 août) demande de surseoir à tout débarquement de forces dans les territoires encore tenus par les Japonais jusqu’à leur reddition. Il craint que certains grands responsables militaires nippons ne déposent pas les armes sans la certitude d’un accord de leur empereur. Cet ordre américain imprévu met le général Mountbatten en fureur et va peser très lourd pour l’avenir de l’Indochine en laissant la place au VM (Pedroncini, 1992, pp. 35-36).


20 août 45 : Le consul général japonais Nishimura rencontre un délégué du VM et lui déclare que son mouvement succède au gouvernement Bao Daï pour exercer l’autorité administrative au Nord-Vietnam. Ce délégué vietnamien demande aux Japonais de céder tous les pouvoirs émanant du gouvernement général et de fournir des armes et des munitions aux troupes du nouveau gouvernement démunies (Pedroncini, 1992, p. 42).

Sainteny et 4 membres de Mission 5 (dont Sainteny) accompagnent la première mission de l’O.S.S. à Hanoi en présence du major Patti (Devillers, 1988, p. 68).

Bao Daï adresse un message à Truman. Il affirme que le Vietnam ne peut, sans risque pour la paix du monde, être replacé sous un régime colonial. Le président américain doit exercer une pression sur De Gaulle. Il demande à son interlocuteur de transmettre son message à Staline, Attlee (Grande Bretagne, nouveau premier ministre) et Tchang Kaï Check (Devillers, 1988, p. 71).

De Kunming, le général Alessandri (délégué du gouvernement) informe le gouvernement français sur la situation et demande, en l’absence de De Gaulle parti pour les U.S.A., des éclaircissements au Quai d’Orsay, notamment sur le mot « indépendance » sachant « qu’aucun autre mot ne peut le remplacer » aux yeux des Vietnamiens. De Gaulle et Bidault seront mis au courant de cette demande le 26 (Devillers, 1988, p. 72).


21 août 45 : A Saigon, grande manifestation organisée par les mouvements nationalistes (pro-japonais, trotskystes, sectes, etc…) auquel s’est joint le VM au sein d’un Front national unifié. Ce dernier essaie, sous la houlette de Tran Van Giau, de se distinguer du reste en arguant de son intégrité : il n’a jamais collaboré ni avec les Japonais ni avec les Français. Il se vante de plus de bénéficier de l’appui des Américains au Tonkin qui auraient vendu des centaines d’avions de guerre, de blindés et de navires (Cadeau, 2019, pp. 124-125). La fausse propagande et le noyautage, notamment des Jeunesses d’avant-garde (embryon de la future armée au Sud), faisant le reste…


21 août – 2 septembre 45 : 8 trains spéciaux acheminent 2 200 hommes de la 2e D.B. dans 5 camps situés dans la région de Marseille d’où ils seront embarqués pour l’Indochine (Bodin, 1996, p. 15).


21 – 22 août 45 : Le Vietminh parvient à mettre la main progressivement sur le sud et le centre de la péninsule indochinoise (voir septembre).


21 ou 23 août 45 : Après avoir quitté Tran Tao, HCM arrive clandestinement à Hanoï où il est presque un inconnu. Ce n’est que le jour de la proclamation officielle d’indépendance du 2 septembre que cet homme de l’ombre entrera vraiment dans la vie publique vietnamienne (Deroo, Dutrône, 2008, p. 17 ; Francini 1, 1988, p. 207 ; De Folin, 1993, p. 88).


22 août 45 : Leclerc arrive à Kandy (Inde, Ceylan) au Q.G. de l’amiral britannique Mountbatten commandant le South East Asia Command (S.E.A.C.). Rongeant son frein, il y demeurera toutefois jusqu’au 29 septembre. Leclerc n’approuve ni ne désapprouve le projet français de retour en Indochine. Il le trouve irréaliste au vu de ce que les Anglais sont en train de faire avec leurs propres anciennes colonies mais également du fait des moyens assez dérisoires dont disposent les Français tant en hommes qu’en matériels. C’est de la bouche de Mountbatten que Leclerc apprend l’issue de la conférence de Postdam, à savoir le partage de l’Indochine entre Chinois et Britanniques au niveau du 16e parallèle. Il sait également plus ou moins qu’une très grande confusion y règne actuellement. Il demande à De Gaulle, en route pour les U.S.A., d’intervenir auprès des Américains pour s’opposer à ce partage. Mais ce qu’il ignore pour l’instant, c’est que ces derniers refuseront pour ne pas mécontenter Tchang Kaï Chek. C’est également lors de cette entrevue avec Mountbatten que Leclerc découvre l’existence de l’ordre du général américain MacArthur du 19 qui interdit tout débarquement de troupes étrangères avant la signature de la capitulation japonaise (voir 2 septembre). Dès le soir de son arrivée, Leclerc envoie à De Gaulle un message le mettant au courant des problèmes du moment et à venir : la coupure de l’Indochine en deux zones d’occupation, l’entrée des Chinois au Nord, les grands retards à prévoir pour un retour de la France en Indochine. Pour lui compliquer encore un peu plus la tâche, il ne dispose pour l’instant sur place d’aucun moyen de transmission propre. Ses messages transitent par le War Office, puis le Foreign Office à Londres avant d’atteindre le ministère des Affaires étrangères français qui transmet à De Gaulle… S’il obtient d’ailleurs une réponse à ses questions, ce qui ne sera pas toujours le cas. Notamment pour ce message du 22 qui restera sans réponse… (Pedroncini, 1992, p. 113)

En Chine, Hurley (ambassadeur américain) et Wedemeyer (chef d’état-major de Tchang Kaï Chek, commandant des forces américaines) sont pour l’instant ignorants du relatif revirement de l’administration Truman à l’égard du rôle des Français en Indochine. Ils ne le découvriront que le 5 octobre. Ils poursuivent donc sur place, à l’image du major Patti et de l’O.S.S., la politique intransigeante de Roosevelt. Staline, lui, ne trouve rien à redire au retour des Français.


Au N-V, les Français sont persuadés que leur retour sera bien accueilli. Ils vont vite déchanter. Sainteny et sa mission française arrivent à Hanoi dans un avion affrété par l’O.S.S. au sein d’un groupe de 16 personnes dirigées par le major Archimedes Patti. Officiellement, en guise de couverture, l’Américain vient pour s’occuper du sort des sépultures de soldats américains. Sainteny quant à lui vient pour mener une mission humanitaire concernant les prisonniers et apporter son soutien aux populations françaises durement éprouvées depuis des semaines. Ce dernier n’a aucun titre officiel, aucune lettre de créance ni même un ordre de mission précis. Les Japonais comprennent mal les prétentions de cette délégation, et ce d’autant plus que le Japon n’a jamais été officiellement en guerre contre la France. Ils emmènent les Français vers le centre-ville d’Hanoi où les accueille une foule hostile. Les rues de la ville sont recouvertes de calicots proclamant en plusieurs langues : « L’Indépendance ou la mort », « Le Vietnam aux Vietnamiens », « Mort à l’impérialisme français », « A bas le colonialisme français » (Sainteny, 1967, p. 76 et  p. 100). Sainteny se rend à l’hôtel Métropole pour y rencontrer des Français qui vivent depuis des semaines dans la terreur. Bien qu’il sache qu’il va être enfermé dans ce qu’il nomme une « cage dorée », il parvient à s’installer au palais du Gouverneur général d’où il sera étroitement surveillé et même retenu, d’abord par les Japonais puis par les Vietnamiens. Son équipe a toutefois emmené quelques moyens de transmission. Ce qui est sûr c’est que les Japonais entendent laisser la France à l’écart du jeu politique qu’ils veulent conduire avec le VM (Deroo, Dutrône, 2008, pp. 17-18). Hanoi est plongé en pleine révolution vietminh. Plus de 20 000 Français sont en quelque sorte pris en otages, « menacés, maltraités, assaillis, assassinés parfois ». Sainteny s’assigne pour but de les défendre, d’affirmer en même temps la présence officielle de la France. Au vu de la faiblesse de ses moyens, il tente de s’entendre, autant que faire se peut, et avec le VM et avec les Américains. Le chef de l’O.S.S. pour le nord de l’Indochine, le major Patti, soutient quant à lui ouvertement l’insurrection vietminh. Il aurait peut-être même prêté sa main à la rédaction de la future déclaration d’indépendance du 2 septembre dans la partie où elle s’inspire de la constitution américaine. Mal informé des nouvelles directives de l’administration Truman à l’égard des Français, il est le représentant d’un anticolonialisme cher à Roosevelt qui prédomine toujours à cette époque. Patti applique à la lettre les accords de Postdam. Ils ne reconnaissent aucunement la souveraineté française en Indochine. A Hanoi, le major a donc à l’égard de Sainteny une attitude plus qu’équivoque voire même hostile (Sainteny, 1967, pp. 59-74).

Au Sud, création du comité du Nam Bo à Saigon par le Vietminh. La situation en Cochinchine est sans doute encore plus complexe qu’ailleurs. Les mouvements nationalistes soutenus par les Japonais comptent sauvegarder l’indépendance, mais à leur profit. Puissants, ils devancent ici le VM qui est divisé et ne comprend pas forcément les démarches des Nordistes (Francini 1, 1988, p. 205).

Côté vm, HCM quitte Tran Tao pour arriver clandestinement à Hanoï où il forme le gouvernement provisoire. Il commence à rédiger la future déclaration d’indépendance (voir 2 septembre). Giap quitte Hanoi et se rend à Hué pour participer au coup de force visant à destituer Bao Daï.

Un rapport de William J. Donovan, directeur de l’O.S.S. à Washington, précise que « le Vietminh est un parti communiste à 100 % » (Ruscio, 1985, p. 64). Cette observation n’interrompt nullement pour l’instant les bonnes relations entre les Américains et le VM.


22 – 25 août 45 : De Gaulle arrive le 22 aux U.S.A. pour y rencontrer Truman. Ils auront plusieurs entretiens durant ce séjour. Le deuxième, celui du 24, portera principalement sur la question de l’Indochine qui fait débat entre les deux pays depuis l’ère Roosevelt. Évoquant l’avenir de l’Indochine, le Général affirme sa volonté « d’acheminer ces pays vers la libre disposition d’eux-mêmes ». Mais, à ses yeux, la France reste et entend rester seule juge du bon moment. Truman lui assure « que son gouvernement ne fera pas opposition au retour de l’autorité et de l’armée française en Indochine. » Entendant cela, De Gaulle répond   sèchement : « Bien que la France n’ait rien à demander en une affaire qui est la sienne, je note avec satisfaction les intentions que vous exprimez. » On aborde la question du transport des troupes françaises vers la colonie qui pose toujours problème. Le journal Le Monde du 24 rapporte les désidératas français : « Une très haute personnalité française de Washington a déclaré : « En, fait, nous avons les forces et le personnel nécessaires pour occuper et administrer l'Indochine dès que le pool allié de navigation voudra bien mettre à notre disposition nos propres navires. » »

Dans ses mémoires, suite à la conférence de Postdam (voir 17 juillet – 2 août 45), De Gaulle reviendra sur ce qui achoppe. Il déplore devant Truman « des dispositions que nos alliés sont en train de prendre sans nous avoir même consultés ». Les points de discorde sont évoqués : les futures occupations britannique et chinoise du Vietnam, le rôle ambigu des chargés de mission du général Weldemeyer (commandant les forces américaines en Chine) qui sont plus que disposés à « prendre contact avec le pouvoir révolutionnaire. » On se sépare en bon terme, même si, selon De Gaulle, « l’Amérique suivait une route qui n’était pas identique à la nôtre. » (De Gaulle, 2000, pp. 799-800) Pour les Français, les résultats de cette rencontre demeurent très mitigés car De Gaulle sait que les U.S.A. ne contribueront jamais qu’a minima au retour de la France en Indochine et ce, avant que n’émerge clairement conflit entre l’Est et l’Ouest en Corée en 1950 (De Folin, 1993, pp. 71-72 ; Nguyen Phu Duc, 1996, p. 37). La visite du chef de l’État français se clôt le 25, avant qu’il ne se rende au Canada. Il sera de retour en France le 31.


23 août 45 : Au Sud, Tran Van Giau (commissaire à la guerre communiste) constitue le « Comité territorial du Nam Bo » issu d’un P.C.I. affaibli car ayant subi la répression de la Sûreté française dès 1940. Le Duan, récemment libéré du bagne de Poulo Condore, en est l’un des dirigeants. Il est épaulé par Pham Hung pour les affaires policières. Le Comité dépend du jeune gouvernement central d’Hanoi mais demeure faible en effectif et surtout divisé entre communistes, trotskystes et nationalistes. Ces derniers seront progressivement éliminés physiquement par les communistes (Goscha, 2002, pp. 33-34).

Tran Van Giau se charge d’autre part de constituer une armée nationale populaire, pour l’instant embryonnaire, mal armée, surtout divisée et bien incapable de faire face aux franco-britanniques. Il fait feu de tout bois en acceptant  dans ses rangs 1 200 hommes des Binh Xuyen et leurs chefs : Duong Ba Duong, Duong Van Ha, Muoi Tri et Bay Vien qui avaient leur part de responsabilité dans les troubles apparus depuis le 15 août (Gras, 1979, p. 56).


24 août 45 : De Gaulle, sur le point de quitter les U.S.A., donne une conférence de presse à Washington. Il reprend, sans la citer explicitement, une partie du contenu de sa déclaration du 24 mars : « L’Indochine doit avoir un Gouvernement indochinois, composé d’Indochinois et aussi de Français d’Indochine et présidé par le Représentant de la France. L’Indochine doit avoir un Gouvernement composé de représentants des pays variés qui composent l’Indochine qui ne sont pas tous de la même race, de la même religion ni au même degré de développement. Néanmoins, cet ensemble de pays qui composent l’Indochine doit avoir un Parlement qui vote un budget de l’Indochine et l’Indochine doit avoir une vie économique propre et régler elle-même ses questions de douane. En résumé, il y aura un Gouvernement indochinois, un Parlement indochinois et un régime économique propre à l’Indochine. » (cité in Turpin, 2005, p. 136 ; Le Monde du 27 août 1945)

Le colonel Jean Cédile est parachuté en Cochinchine, près de Saigon. Représentant du Gouvernement provisoire de la République française (G.P.R.F.), il a été nommé commissaire de la République pour la Cochinchine et a en charge de remettre en place les structures administratives et politiques de la colonie française. Il est immédiatement fait prisonnier par les Japonais qui l’humilient en le dépouillant de ses vêtements et le ramènent à Saigon (Francini 1, 1988, p. 228). Il arrive en Indochine sans la connaître. Il y arrive également avec l’esprit d’un résistant quelque peu borné qui préfère mener une épuration dans l’administration Decoux plutôt que de tenir compte des compromis que l’amiral a dû faire face aux Japonais. Ses premiers contacts avec les milieux français considérés par lui comme potentiellement collaborationnistes ne seront donc pas bons (De Folin, 1993, pp. 94-95). Il mettra en place, avec de faibles moyens, un Comité d’accueil et de défense des intérêts français au rayonnement limité (Cadeau, 2019, p. 144 et p. 589, note 14).

Seconde rencontre De Gaulle-Truman à Washington (voir 22 août). Le premier réaffirme la volonté de la France de recouvrer tous ses droits en Indochine (Francini 1, 1988, p. 210 et 229).

Le général Leclerc se rend de Kandy (Ceylan) à Calcutta (Inde) où se trouve un poste de la Direction Générale des Études et Recherches (D.G.E.R., sous les ordres de De Gaulle). Il y étudie la reprise en main de la situation au S-V (débarquement anglais), le parachutage au Tonkin et en Annam des futures troupes françaises. Celles-ci sont plus que dispersées. Il y a le Corps léger d’intervention de Blaizot, les troupes d’Alessandri stationnées en Chine (Yunnan), des troupes se trouvant encore à Madagascar ou en métropole mais aussi à Shangaï, à Tianjin, à Kandy même. Leclerc demeure conscient que la reconquête ne pourra être accomplie que par des troupes françaises car il considère qu’« aucun allié ne nous aidera réellement à réoccuper l’Indochine. » (cité in Bodinier, 1987, p. 153). Il doit par ailleurs négocier leur venue avec les Britanniques qui sont les seuls à posséder les moyens de transport nécessaires (Francini 1, 1988, p. 234). Durant le séjour de De Gaulle à Washington, Leclerc lui fait parvenir ce 24 août le télégramme suivant : « Je demande que ce télégramme soit transmis d’extrême urgence au général De Gaulle à Washington pour que les États-Unis prennent position avant l’armistice. Je peux vous assurer que la non-acceptation par toutes les nations unies des mesures suggérées pourrait entraîner les conséquences les plus graves, en particulier un conflit armé avec les troupes chinoises installées en territoire français. En tout état de cause, si le président des États-Unis ne croit pouvoir obtenir du maréchal Tchang Kaï Chek ce que nous demandons, il est nécessaire que les nations reconnaissent la souveraineté française sur toute l’Indochine. Il appartiendra alors au Gouvernement français de faire valoir ses droits par les moyens qui conviendraient. » (cité in Turpin, 2005, p. 115) Or de Gaulle n’est pas parvenu à convaincre Truman de modifier les clauses de l’accord de Postdam concernant l’Indochine.

Une note de la direction d’Asie du Quai d’Orsay montre à quel point les autorités gouvernementales françaises ignorent la situation en Indochine et s’illusionnent par excès de confiance : « […] il existe des mouvements sérieux d’indépendance locale de tendances antifrançaises et proaméricaines. Ces mouvements céderont naturellement devant un retour de représentants d’une France victorieuse, puissante et riche au moins de la considération de ses grands alliés ! » (citée in De Folin, 1993, p. 98) Selon De Folin, l’illusion se prolongera jusqu’au 30 septembre comme le montre un ensemble de télégrammes échangés entre le ministère des Affaires étrangères et celui des Colonies. Seul La Laurentie (directeur des Affaires politiques au ministère des Colonies) joue (comme Sainteny, voir 5 septembre) la carte de la modération. En cela il s’oppose à De Gaulle et D’Argenlieu. La Laurentie écrit alors : « Sans prétendre qu’il faille dès aujourd’hui prononcer le mot indépendance […], il est possible d’admettre qu’avant même l’arrivée du Haut-Commissaire, nos représentants reçoivent pour instructions de poursuivre les entretiens avec le Viet-Minh et s’engagent à ne rien faire contre lui, charge pour lui de n’entreprendre aucune négociation avec nos alliés. Je pense que c’est le minimum que nous devrons faire pour sauvegarder notre position et je suis persuadé que l’on commettrait une faute grave en n’agissant pas ainsi. »  (cité in Turpin, 2005, p. 151)

Tchang Kaï Check exprime dans une déclaration la position de la Chine. Cette dernière ne revendique aucune visée territoriale au Vietnam et souhaite que le peuple vietnamien accède progressivement à l’indépendance conformément à la Charte des Nations Unies (Pedroncini, 1992, p. 175). Mais, derrière cette déclaration de bonnes intentions, se dissimulent en fait les faiblesses d’un pouvoir central confronté à des exécutants militaires particulièrement indociles.


25 août 45 : A Hué, abdication de Bao Daï.  2 représentants officiels du VM, Tran Huy Lieu et Cu Huy Can, arrivent de Hanoi et se rendent au palais impérial. Lors d’une brève cérémonie, Bao Daï leur remet les sceaux impériaux. Au sommet de la citadelle, le pavillon impérial du palais est remplacé par le drapeau rouge avec au centre une étoile d’or à 5 branches (Fall, 1960, p. 39 ; Dang Van Viet, 2004, pp. 81-84). L’empereur accepte la démission du cabinet de Trong Kim et demande au VM de former un nouveau gouvernement (Pedroncini, 1992, p. 42). Il rédige alors son acte d’abdication : « […] Nous ne pouvons nous empêcher d’éprouver un certain regret à la pensée de Nos vingt ans de règne, durant lesquels Nous avons été dans l’impossibilité de rendre aucun service appréciable à Notre pays. Malgré cela, et fort de Nos convictions, Nous avons décidé d’abdiquer et nous passons le pouvoir au gouvernement républicain démocratique […] » (cité in extenso in Devillers, 2010, pp. 419-420)

L’édit d’abdication de Bao Daï est affiché dans la ville (Marangé, 2012, p. 148). HCM fait preuve d’habilité pour légitimer le nouveau gouvernement. A cette époque, le leader vietnamien ratisse large et tente de concilier tous les courants favorables à l’indépendance. L’ex-empereur deviendra « conseiller suprême » de ce nouveau gouvernement, avec le titre de « citoyen Vinh Tuy ». Il déclarera ultérieurement dans une publication américaine : « Indépendance pour la Patrie, Bonheur pour le Peuple. Pour ces huit mots, et pendant quatre-vingts ans, tant de nos frères et sœurs ont sacrifié leur vie dans la jungle, les forêts ou les prisons que, comparée aux sacrifices de ces milliers de héros et d’héroïnes, mon abdication n’est qu’une très petite chose. » (cité in Fall, 1960, p. 40) Le VM proclame alors l’établissement d’un nouveau gouvernement provisoire : le gouvernement de la République démocratique du Vietnam (R.D.V.N.) (Pedroncini, 1992, p. 42).

En Cochinchine, Bao Daï reconnaît le Comité de Libération du Nam Bo (émanation du P.C.I.) sous la direction de Tran Van Giau qui prend possession avec habilité de Saigon et d’une bonne partie du S-V (voir 23 août). Le comité s’installe dans le palais du gouverneur général à Saigon. 7 de ses 9 membres sont communistes. En fait, ce comité est d’entrée noyauté par le P.C.I. : Tran Van Giau est nommé président et chargé des affaires militaires, Duong Bach Mai de la Sécurité d’État et Nguyen Van Tao de l’Intérieur. Les sectes n’y sont pas représentées, pas plus d’ailleurs que les trotskystes. Une énorme foule nationaliste défile en ordre dans les rues de Saigon (De Folin, 1993, p. 89). Comme le remarque Marangé, dans l’ancienne colonie française, « la prise de pouvoir fut plus violente, plus précaire et plus éphémère » car le VM y est moins implanté qu’au Nord. D’abord du fait de la répression coloniale en 1940-1941 mais également parce qu’il doit composer avec le Front national unitaire (F.N.U., nationaliste, qui a reçu le pouvoir des Japonais), les trotskystes, les Caodaïstes et les Hoa Hao qui ont tous un poids politique en Cochinchine (Marangé, 2012, pp. 150-151).

Les Américains désireux de voir Sainteny quitter Hanoi au plus vite l’invitent à rejoindre Kunming en empruntant un de leur avion. Celui-ci, lucide, et y voyant clairement une volonté de l’écarter, décline l’invitation (Sainteny, 1967, p. 81).

Pierre Messmer, qui a été nommé commissaire de la République pour le Tonkin et l’Annam, est parachuté mais est fait immédiatement prisonnier par le Vietminh dans la région d’Hanoi. Selon Sainteny, Messmer et ses deux compagnons (dont l’un, le capitaine Brancourt, décédera) ne doivent leur vie sauve qu’à leur capacité à marcher plus de quarante heures dans le Delta inondé. Toujours selon Sainteny, « ils furent sauvés par les troupes chinoises descendant sur Hanoi qui les recueillirent exténués. » (Sainteny, 1967, p. 85). Messmer parviendra à s’enfuir ultérieurement. De retour en France, il confiera à De Gaulle que la situation en Indochine n’est guère rattrapable, à l’exception de Saigon (Francini 1, 1988, p. 205). Il constate rapidement combien la situation a changé avec la prise de pouvoir du VM : « Dans les villages où nous sommes passés, le Vietminh, efficace et bien organisé, est le maître. Crainte ou conviction, la population lui obéit sans murmure. Il a suffi de quelques semaines pour effacer soixante ans de colonisation française dont l’empreinte semble n’avoir été ni profonde ni solide. Sur le terrain, une chose est certaine, la déclaration gouvernementale du 24 mars 1945 qui définit la nouvelle politique française est complètement dépassée. » (Messmer, 1992, p. 157)

Fin du séjour de De Gaulle à Washington. Il n’a rien obtenu de Truman concernant la division de l’Indochine en deux zones d’occupation décidée à Postdam, chinoise au nord et britannique au sud. Lors d’une conférence de presse avant son départ, il déclare cependant :    « La position de la France en Indochine est très simple. La France entend retrouver sa souveraineté sur l’Indochine. Bien entendu, ce rétablissement sera accompagné d’un régime nouveau, mais pour nous cette souveraineté est une question capitale. » (cité in Ruscio, 1992, p. 50) ll quitte alors les États-Unis pour se rendre au Canada et sera de retour à Paris le 31.


26 août 45 : HCM qui vient d’arriver à Hanoi secrètement rencontre pour la première fois discrètement Archimedes Patti. Ils auront ensemble  5 entretiens durant toute la durée du séjour de Patti. Ho désire connaître les dispositions américaines envers le nouveau pouvoir vietnamien. Patti lui explique qu’il n’est pas diplomate, ce qui est aussi une manière de lui signifier que le soutien américain à l’égard du VM ne peut être que mesuré. Mesuré mais cependant réel du point de vue de Patti (Deroo, Dutrône, 2008, p. 18). L’important étant à cette époque, alors que ces militaires américains ne sont nullement habilités à traiter officiellement avec le nouveau gouvernement vietnamien, que ceux-ci donnent l’impression aux populations locales d’asseoir la réputation du nouveau régime d’un faire-valoir du gouvernement américain.

Le général chinois Lou Han, futur responsable militaire de l’occupation du Tonkin (voir 28 août), demande à l’état-major japonais d’envoyer une délégation à son Q.G. situé dans le Yunnan (voir 2 septembre) (Pedroncini, 1992, p. 43).

Sainteny et sa délégation sont étroitement pris en charge par les Japonais. Selon un câble de sa main, « conduits à la liaison qui prétend nous protéger contre armée Jap et population annamite. Bien traités mais aucune liberté. Après négociations laborieuses conservons la disposition, nos armes et transmission. » (cité in Bodinier, 1987, p. 156)


27 août 45 : La présence de Sainteny à Hanoi (sous protection rapprochée japonaise) préoccupe suffisamment le VM pour qu’HCM lui envoie pour un premier contact une délégation dirigée par Nguyen Vo Giap (nouveau ministre de l’Intérieur) et Duong Duc Hien (ministre de l’Éducation nationale). L’entretien a lieu en présence de Patti, initiateur de cette rencontre, qui a lieu à la demande d’HCM mais sans que ce dernier soit présent. Cédile assiste peut-être à cet entretien (Turpin, 2005, p. 160). Giap fait part des aspirations du peuple vietnamien. Il évoque l’arrivée de ses troupes en ville et la nécessité de devoir installer un gouvernement dont les aspirations ne sont pas excessives. Sainteny trouve en effet les demandes de son interlocuteur raisonnables et réaffirme que les anciennes pratiques coloniales sont révolues. Il demande un retour à l’ordre, rappelle que le pays est toujours sous souveraineté française et précise que si les Vietnamiens veulent se débarrasser trop rapidement des Français, ils auront les Chinois. Selon lui, Paris jugera ce « gouvernement provisoire » sur ses actes. Pour Sainteny et les Français, le temps presse, sachant que depuis l’abdication de Bao Daï, c’est le Vietminh soutenu par les Américains qui a la réalité du pouvoir (Francini 1, 1988, pp. 228-229 ; Sainteny, 1970, pp. 69-70 ; Sainteny, 1967, pp. 81-85 ; compte rendu succinct de cette entrevue dans un câble de Sainteny cité in Bodinier, 1987, p. 154).

Le soir, le VM proclame à Hanoi la création d’un « gouvernement provisoire de libération nationale » dont la composition sera rendue publique le 29. Presque tous ses membres sont communistes. Sainteny rend compte par radio à Calcutta (D.G.E.R.) et demande des instructions qu’il n’obtiendra pas.

Une note de Pleven, qui assure l’intérim de De Gaulle à Paris depuis son départ le 22 pour les U.S.A., juge que la lettre adressée au chef du gouvernement provisoire par Bao Daï est celle d’un monarque discrédité qui « cherche une réhabilitation tardive en faisant le jeu des Japonais ». Tout en ajoutant cependant qu’il fallait « permettre à un personnage comme Bao Daï de reculer sans perdre entièrement la face. » On ne doit pas continuer « à l’employer » mais on doit toutefois laisser une porte ouverte (voir 28 août). Selon cette note, « il serait mauvais de laisser Bao Daï et le gouvernement annamite s’enfermer dans des formules sans échappatoire possible car, en pareil cas, le conflit entre eux et nous serait ouvert sur le plan le plus dangereux pour notre action future. » (cité in Pedroncini, 1992, p. 149 ; message de Pleven cité in extenso in Bodinier, 1987, p. 159). Bao Daï, discrédité par son attitude envers les Japonais, n’obtiendra aucune réponse de De Gaulle.


28 août 45 : Les troupes chinoises du général Lou Han pénètrent au Tonkin en vue d’occuper le nord du 16e parallèle selon trois axes : celui de Langson-Hanoi, celui de la Rivière Claire et celui de Laokay-Hanoi (Pedroncini, 1992, p. 174). Pas moins de 180 000 hommes ont pour mission de désarmer les 70 000 Japonais comme l’a prévu la conférence de Postdam (voir 17 juillet – 2 août 45). Elles appartiennent à l’armée de Tchang Kaï Chek, mais ce dernier les contrôle mal. La nomination de Lou Han, et non celle du général Zhang Fa Kui, bon connaisseur des affaires vietnamiennes, n’est en fait qu’un moyen pour Tchang Kaï Check pour se débarrasser des troupes yunnanaises qui soutiennent le gouverneur Long Yun, lui-même récalcitrant aux ordres du gouvernement central chinois. Au Tonkin comme au Laos, l’attitude de ces troupes est d’entrée plus qu’ambiguë voire même hostile à l’égard des Français (voir 6 mars 1946) car elles se comportent immédiatement plus comme une troupe d’occupation que comme une armée venue désarmer les Japonais. Les Chinois viennent avec dans leurs bagages le chef de leurs services secrets, Siao Wen, un fidèle du Guomintang particulièrement anticommuniste. Il est l’adjoint de Lou Han et un fervent soutien du V.N.Q.D.D., du D.M.H. et du Daï Viet, les trois principaux partis nationalistes prochinois. Wen va mener avec leur aide une lutte féroce contre le VM à Hanoi : recrutement dans la pègre, assassinats, enlèvements, extorsion de fonds (De Folin, 1993, pp. 119-120). L’occupation, qui ne devait être que temporaire, ne se terminera au N-V officiellement que par les accords de Chongqing du 28 février 1946 et par un autre pour le Laos qui sera signé le 15 mars de la même année. Mais, dans les faits, le dernier régiment chinois ne quittera le Vietnam que le 18 septembre 1946. L’armée d’occupation chinoise est nationaliste et soutient ouvertement les partis nationalistes vietnamiens prochinois. Au retour des Français après mars 1946, le général Salan entendra à de nombreuses reprises les slogans de cette armée d’occupation prononcés « chaque lundi à 11 heures » devant la citadelle d’Hanoi : « Nous sommes un peuple fier et indépendant, la première race du monde, nous avons chassé les diables d’étrangers. Notre gouvernement est celui du peuple. Tout doit être subordonné à la subsistance du peuple en toute égalité. » (cité in Salan 1, 1970, p. 242)

Un Gouvernement provisoire est formé qui remplace le Comité de Libération nationale, le Gouvernement révolutionnaire annamite (G.R.A.). Il est présidé par HCM. La domination vietminh y est écrasante : Giap est nommé à l’Intérieur, Pham Van Dong aux Finances, Chu Van Cau à la Défense, Pham Huy Lien à la Propagande (Francini 1, 1988, p. 207 et pp. 228-229).

Le retour clandestin des Français en Indochine est toujours aussi mal improvisé. Un commando français de 6 membres de la Force 136 mandatés par Paris, la mission Lambda, est parachuté près de Hué. Il a pour mission de rencontrer Bao Daï et de lui demander de ne prendre aucune décision avant d’avoir reçu des agents français. Mais ce commando arrive trop tard (voir 25 août). De plus, 4 de ses membres ont été tués et 2 arrêtés (Pedroncini, 1992, pp. 148-149 ; Devillers , 1988, p. 73).

Sainteny, toujours surveillé de près par les Japonais, assaille la D.G.E.R de Calcutta de télégrammes désespérés : « Nous sommes devant une manœuvre conjuguée alliée en vue d’évincer les Français d’Indochine […] Il faut qu’enfin on comprenne que l’Indochine du Nord à cette heure n’est plus française. » (cité in Devillers, 1988, p. 79)

Dans un rapport rédigé à Kandy et adressé à D’Argenlieu, constatant que la situation est « mauvaise » tant au Tonkin qu’en Cochinchine, Leclerc écrit : « L’idée principale que vous avez d’ailleurs pu lire dans tous mes télégrammes est que nous n’avons qu’un moyen et un seul de restaurer la souveraineté française en Indochine, c’est d’avoir sur place une force armée. Ne voyez pas là le réflexe du militaire uniquement militaire, jamais je n’ai senti mieux que ces jours derniers combien toutes les arguties et discussions diplomatiques se ramènent en fait à l’absence ou la présence des forces. » (cité in Bodinier, 1987, pp. 150-151). Si cette conception toute militaire effraie pour l’instant D’Argenlieu, De Gaulle lui la partage tout à fait (voir 27 octobre). D’ailleurs sur le fonds, Leclerc, D’Argenlieu et De Gaulle sont pour l’instant sur une même longueur d’onde. Leclerc pose alors la question de la présence de l’amiral en Indochine : « Il y a deux solutions : ou vous arrivez le plus tôt possible ou seulement quand nous aurons pris pied solidement en Cochinchine. » Il évoque les avantages d’une présence de l’amiral : « Les Alliés constatent au plus tôt que le Général De Gaulle tient à être représenté non seulement par un chef militaire mais aussi pas un haut-commissaire politique. » Mais aussi les inconvénients et notamment la faiblesse de l’organisation matérielle qui font « que vous ne serez plus à Paris pour arracher les décisions […] ». Et de conclure : « A vous, Amiral, de peser le pour et le contre et de choisir. » (cité in Bodinier, 1987, p. 153).

Leclerc apprend la nouvelle de l’embarquement de la 2e D.B. de Massu (qui n’aura lieu en fait que le 15 septembre) et précise au colonel de Guillebon (chef de l’état-major du corps expéditionnaire des forces d’Extrême-Orient) : « C’est bien TOUT le corps expéditionnaire qu’il faut. Faites ce qui est possible pour obtenir à tout prix le shipping sinon nous perdons l’Indochine. » (cité in Turpin, 2005, p. 120)

Note interrogative du ministère de l’Information : « De qui dépendra l’Information en Indochine ? Nous entendons bien que notre Département devra lui faire tenir un matériel aussi abondant que possible. Mais sous quelle autorité seront placés là-bas les différents organismes d’Information et de Propagande ? Les Colonies ? L’information ? L’autorité militaire ? Il nous semble que l’Armée prétendra commander la première, et que les Colonies demanderont à prendre la suite […] » (cité in Villatoux, 1994, p. 104)


29 août 45 : Sous la pression de l’arrivée imminente des Chinois, formation à Hanoï d’un second « gouvernement provisoire de la République démocratique du Vietnam ». Il est politiquement plus représentatif que l’ancien Comité de libération du peuple vietnamien mais demeure présidé par HCM qui s’est également arrogé les Affaires étrangères. Les postes stratégiques, Défense, Intérieur, Propagande, Éducation et Jeunesse, sont aux mains de communistes (composition de ce gouvernement in Fall, 1960, p. 69, note 46). Le Vietminh est, dès cette époque, majoritairement contrôlé et dominé par les communistes. Sur les 10 ministres du Comité de libération du peuple vietnamien, il y avait au moins 7 communistes et sur les 15 membres de ce deuxième gouvernement provisoire, 9 au moins le sont également. De timides ouvertures ont cependant dû être ménagées aux nationalistes indépendantistes et à leurs protecteurs chinois : branche indochinoise du Parti socialiste français, un membre du V.N.Q.D.D. et certains membres non affiliés à un parti (Fall, 1960, pp. 38-39).

Dans un souci de se rendre populaire, le nouveau gouvernement abolit ce jour la taxe sur les produits vendus. Il prendra d’autres mesures de ce type : abolition de l’impôt sur le revenu (7 septembre), abolition des impôts professionnels (14 septembre). Ces mesures mettront rapidement le gouvernement face à une situation financière désastreuse qui ne sera redressée et corrigée que par la suite (Fall, 1960, p. 43).

Bao Daï vêtu à l’impériale lit à Hué devant une assemblée réunie pour l’occasion par le VM l’édit de son abdication. Il déplore que son règne n’ait apporté « aucun service appréciable » et termine sa déclaration par un « Vive l’indépendance du Vietnam ! Vive notre république démocratique ! » (Marangé, 2012, p 148). Puis dans une proclamation adressée « au monde entier », il déclare : « Dorénavant, nous sommes heureux d’être un citoyen libre dans un pays indépendant ! » Le VM transformera cette phrase en slogan : « Nous préférons devenir simple citoyen indépendant que roi esclave. » (Sainteny, 1967, p. 110 et p. 276)

Sainteny, aux abois mais bien seul, estime que « l’attitude alliée à l’égard de la France nous mène à une perte de face totale […] Je dois passer par Patti pour tout […] J’insiste sur le fait  qu’à l’heure actuelle l’attitude alliée est plus nuisible que celle du Viet-Minh. » (cité in Turpin, 2005, p. 120)


30 août 45 : Le secrétaire d’État Dean Acheson indique à l’un de ses correspondants diplomatiques en poste à New Dehli : « Ce n’est pas la politique de ce gouvernement que d’aider les Français à rétablir par la force leur contrôle sur l’Indochine. Nous ne sommes prêts à voir la France rétablir son contrôle dans ce pays que si les affirmations françaises d’obtenir le soutien des populations d’Indochine s’avèrent justes. » (cité in Pedroncini, 1992, p. 223).

HCM entame la rédaction du texte de la déclaration d’indépendance qui sera prononcé le 2 septembre.


31 août 45 : Retour de De Gaulle à Paris après son voyage aux U.S.A. et une visite au Canada (Le Monde du 31 août et 1er septembre 1945).

Sainteny continue à se débattre dans son dialogue de sourds avec la D.G.E.R. de Calcutta : « Je vous demande de comprendre la chance exceptionnelle que nous avons d’être en place au cœur même de l’administration française en Indochine. Ma mission doit être officialisée et non désavouée comme elle paraît l’être actuellement, ce dont le Vietminh, les Japs et les Alliés s’empressent de tirer avantage aux dépens de la France. La question de personne n’importe pas : si vous me jugez non qualifié, dites-moi à qui je dois repasser le commandement. Il faut tout faire pour qu’une situation acquise et maintenue difficilement ne soit pas abandonnée. » (cité in Devillers, 1988, p. 80)

Cédile et le capitaine de frégate Jolivet de Riencourt se rendent à Loc Ninh où Decoux est détenu. L’entrevue est orageuse, notamment lorsqu’on évoque avec lui le précédent malheureux de la libération de la Syrie. Selon Cédile, l’amiral était « combatif, interrompant sans cesse  nos explications  par des remarques plus que désobligeantes sur la France libre et le général De Gaulle, les Anglais, les retards des forces alliées à intervenir en Indochine (il insista beaucoup sur ce dernier point, accusant l’E.M. de Kandy d’incompétence, de désordre, etc.). Il attaqua violemment la Résistance en Indochine, notamment Mordant, De Langlade, Mus. » Le représentant du G.P.R.F. voit là un homme « déçu de ne pas recevoir des félicitations (qu’il pensait que nous devions lui apporter de la part du gouvernement) […] » (cité in Turpin, 2005, p. 132 ; voir également D’Argenlieu, 1985, pp. 423-424 et Decoux, 1949, pp. 342-347). Decoux demande à nouveau à pouvoir rejoindre Saigon et ne reçoit, selon ses mémoires, qu’une réponse « évasive et équivoque ». Discrédité, il ne sera pas entendu et ce, jusqu’à son rapatriement en France, le 1er octobre.

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