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par Jean-François Jagielski

Décembre 1952

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Décembre 52 : En métropole, création du Comité d’étude et d’action pour le règlement pacifique de la guerre du Vietnam. Il est constitué de membres issus d’un très large éventail d’horizons marqués à gauche (radicaux, communistes, catholiques, protestants). Selon Sabine Rousseau, « […] il ne s’agit plus de dénoncer les causes du conflit mais d’y remédier. La solution prônée est celle de négociation directe avec l’adversaire : Ho Chi Minh. Le comité se veut un lieu de propositions émanant d’experts. L’influence protestante se lit aussi dans la forme même du comité de personnalités qui permet l’implication personnelle et l’exercice de ses responsabilités individuelles. » (Rousseau, 2000, article en ligne, § 38 et 39 ; Ruscio, 1985, p. 305).


Nuit du 30 novembre au 1er décembre 52 : Le VM attaque Na San par submersion avec des forces nettement supérieures se concentrant sur deux postes d’appui extérieurs : le P.A. 22 bis à l’ouest et P.A. 24 au nord-est (carte in Salan 2, 1971, p. 352). C’est le moment le plus critique de la bataille. Les contre-attaques et l’aviation rétabliront la situation dans l’après-midi du 1er.


Nuit du 1er au 2 décembre 52 : Nouvelle attaque généralisée sur Na San : les assauts des VM sur les divers points d’appui sont repoussés (P.A. 21 bis au sud-ouest, P.A. 26 à l’est). Les Dakota lucioles éclairent au moyen d’artifices le champ de bataille, permettant à l’artillerie française de concentrer ses tirs sur les colonnes d’assaut. C’est la première fois que le VM est confronté à un type de défense en « hérisson ». La technique v-m d’attaques par vagues de submersion sur des positions aussi bien fortifiées est très coûteuse en vies humaines. Le colonel Féral, chef d’état-major du camp retranché, a pu observer que dans une brèche de 20 mètres, on dénombre « un amas de 700 cadavres empilés les uns sur les autres » (Féral, 1994, p. 67).


1er - 4 décembre 52 : Opération Bretagne dans le Delta entre Nam Dinh (sud d’Hanoi) et la mer. Deux régiments vietminh sont disloqués à Nghia Xa. Mais une partie des combattants, déguisée en paysans, parvient à s’échapper vers le sud (Gras, 1979, p. 492).


2 - 3 décembre 52 : Le VM tente un ultime effort contre Na San avant que Giap ne décide de lever le siège au vu des lourdes pertes qu’il a subies (3 000 tués et blessés). Salan qui rencontre le général Dulac qui a « un sourire ample et radieux, plus que rare chez cet homme froid et réservé ». Pour autant, le général Gilles, commandant le camp retranché, tire les leçons de son expérience et confie à son entourage : « Jamais, jamais plus, se mettre dans des conditions semblables, à celles de Na San. » (cité in Féral, 1994, p. 67) En mars 1953, le maréchal Juin déclarera : « Si la brillante défense de Na San a incontestablement fait subir de lourdes pertes au Vietminh sur le plan tactique, sur le plan stratégique l’organisation de ce camp retranché ne constitue qu’un expédient. » (cité in Cadeau, 2019, p. 439). Devenu inutile, le camp sera d’ailleurs abandonné en mai 1953.


4 décembre 52 : Réponse du général De Linarès (responsable militaire du projet) au gouverneur du N-V sur l’utilité des G.A.M.O. que ce dernier a mis en doute. Il cite les termes mêmes d’un rapport du VM : « Les G.A.M.O. constituent une forme politique très efficace créée par les fantoches pour servir la pacification menée par les pirates français et tromper les pacifistes, les mécontents [...] » Commentant cette phrase, le général ajoute seulement : « Il m’apparaît que l’opinion de l’adversaire est un facteur important dans le jugement que l’on doit porter sur le principe même des G.A.M.O. » (cité in Le Page, 2007, p. 5).


8 décembre 52 : Tout contact vietnamien a disparu aux abords du camp retranché de Na San. Les Français en sortent pour reprendre le contrôle d’une partie de la région du pays thaï. C’est une victoire mais à nouveau purement défensive.


10 décembre 52 : Les instances politiques du VM annoncent la fin de la campagne dans le Nord-Ouest (Cadeau, 2019, p. 439).


11 décembre 52 : Le gaulliste Jacques Foccart, conseiller de l’Union française et vice-président de la commission de la Défense de cette assemblée se rend à Na San. Satisfait de sa visite, il assure Salan de son appui au niveau du budget des États associés (Salan 2, 1971, pp. 368-369).


15 décembre 52 : Après son échec sur Na San, Giap lance une offensive sur Luang Prabang au Laos. La menace sur cette région se précise à nouveau (voir 30 novembre).

Après avoir subi des critiques (voir 24 novembre), la réorganisation des G.A.M.O. devient effective. La nature civile et administrative, sous la dépendance du gouverneur et des chefs de province, est réaffirmée. Le personnel est épuré. Le problème des soldes est résolu : le personnel est rattaché au service de l’administration régionale et le mandatement est effectué par l’agent de paiement de la province sur le territoire duquel opère le G.A.M.O. La direction des G.A.M.O. à Hanoi fortement critiquée est supprimée et une inspection instituée. L’inspecteur établit la liaison avec les chefs de province et les autorités militaires, il rend compte au gouverneur et surtout contrôle la valeur du personnel employé, notamment civil. Il a le pouvoir de licencier les éléments incompétents ou inaptes (Le Page, 2007, p. 6).

Salan reçoit à Bach Mai le secrétaire d’État de l’Air Montel. Il lui souligne l’importance de cette arme dans la bataille en cours et se rend avec lui à Na San. A la fin de sa visite, le 17, Montel assure Salan de son soutien et des renforts en mécaniciens. D’autres visites officielles ont lieu à Na San qui devient le lieu à voir du moment. Salan poursuit, tout comme son prédécesseur, les opérations de communication (Salan 2, 1971, pp. 369-370).

Saloth Sar, le futur Pol Pot, quitte la France après un séjour étudiant de 4 ans amorcé le 1er octobre 1949. Il a en fait perdu ses droits de bourse pour manque d’assiduité et activités politiques subversives contre le régime de Sihanouk (voir 15 juin). Il s’embarque à bord du Jamaïque pour un retour à Saigon (Deron, 2009, p. 154).


Mi-décembre 52 : Salan décide de lancer des sorties offensives à caractère limité à partir de Na San en vue de reconquérir les postes évacués car, dans son esprit, la base aéroterrestre est aussi un point de départ pour la reconquête du pays thaï. Il en sera ainsi jusqu‘en août 1953 (Cadeau, 2019, p. 442).


16 décembre 52 : Au conseil de l’Atlantique Nord (O.T.A.N.), Robert Schuman (Affaires étrangères) en appelle à une plus grande solidarité des États-membres « pour l’Asie comme pour l’Europe » et demande « le témoignage d’une solidarité des peuples libres » pour aider les Français à poursuivre la lutte en Indochine (Ruscio, 1985, p. 205).


17 décembre 52 : Le Conseil de l’Atlantique (O.T.A.N.) réuni à Paris reconnaît que « la campagne menée en Indochine par les forces de l’Union française mérit[e] de recevoir un soutien sans défaillance de la part des gouvernements atlantiques ». Mais seuls les États-Unis apportent une aide efficace, 85 milliards de francs d’aide matérielle pour 1952 et 115 milliards en livraison gratuite de matériel militaire. Les U.S.A. assurent désormais 40 % des dépenses militaires en Indochine car la France a de plus en plus de mal à faire face aux dépenses estimées à un peu moins milliard de francs par jour. Les Français désirent cette aide américaine mais demeurent toujours beaucoup plus réticents à ce que les U.S.A. interviennent plus directement dans le conflit (Gras, 1979, pp. 488-489).

Instruction secrète de Salan à De Linarès (commandant les F.T.V.N.) : « […] Notre réinstallation à Dien Bien Phu constitue l’objectif  à envisager dès que possible. » (cité in Rocolle, 1968, p. 150, note 82)


19 décembre 52 : Démission du gouvernement Pinay.


30 décembre 52 : Instruction personnelle de Salan à De Linarès (commandant les F.T.V.N.) : « La province de Dien Bien Phu représente pour le V.M. une base opérationnelle au même titre que Na San et Laïchau dans notre propre système. Les rebelles sont en mesure, en effet,  de faire vivre sur le pays un bataillon régulier et d’y organiser des unités régionales. » (cité in Rocolle, 1968, p. 150, note 82)


31 décembre 52 : Les effectifs de l’A.N.V. qui avaient doublé entre 1951 et 1952 (voir janvier) passent à 145 000 hommes (73 000 hommes ont été transférés du C.E.F.E.O., 20 000 mobilisés réguliers, 52 000 supplétifs) (Toinet, 1998, p. 141).

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