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Décembre 69 : 55 % des Noirs trouvent la guerre immorale contre 35 % chez les Blancs (Porte, 2008, p. 282). | |||
Selon un sondage Louis Harris, 65 % des Américains estiment que des massacres comparables à celui de My Laï sont inévitables et n’impliquent pas que l’engagement des U.S.A. au Vietnam soit immoral. Seuls 24 % des sondés estiment ce conflit immoral. 39 % pensent qu’un soldat est un criminel de guerre s’il tue des civils innocents mais 66 % des sondés estiment que les soldats impliqués dans l’affaire doivent être déclarés innocents s’ils peuvent prouver qu’ils ont agi sur ordres de leurs supérieurs. 67 % des sondés estiment que les média n’auraient pas dû diffuser les témoignages des soldats impliqués avant la tenue de leurs procès respectifs (Carval ''in'' collectif, 1992, p. 224 et pp. 226-227). | |||
Au Cambodge, convoqué par Sihanouk, le congrès du Sangkum s’oppose au projet de dénationalisation voulu par Sirik Matak. | |||
Mise en place au niveau de l’armée américaine d’un système de tirage au sort visant à atténuer l’injustice au niveau du recrutement des soldats qui sont envoyés au Vietnam. Jusqu’alors ceux qui faisaient des études supérieures et appartenaient aux classes sociales les plus aisées bénéficiaient de sursis. La mise en place de cette procédure de tirages au sort n’exclut toutefois pas le maintien d’un système sursitaire. | |||
Décembre 69 – janvier 70 : La commission Peers (voir 26 novembre) procède à plus de quatre cents entretiens des principaux protagonistes de l’affaire de My Laï. La déposition du pilote d’hélicoptère Hugh Thompson est particulièrement examinée et retenue. La commission l’érige en témoin moral du massacre en raison de sa défense de civils vietnamiens contre les forces américaines (Huret, 2008, p. 134). Des membres de la commission se rendront à Son My pour enquêter sur place et entendre des témoins vietnamiens. Toutefois, selon Huret, « les entretiens conduits par la commission Peers avec les habitants de My Laï sont extrêmement courts et les réponses fort laconiques. » (Huret, 2008, p. 144) | |||
3 décembre 69 : Nixon dévoile dans un message à la nation son programme de '''vietnamisation de la guerre''', le retrait ordonné des troupes, la libération des prisonniers détenus par les N-V aussi prompte que possible. | |||
5 décembre 69 : ''Life Magazine'' publie à son tour les photographies du massacre de My Laï faites par Ronald L. Haeberle (négociées contre 25 000 dollars) dans un article intitulé : « The Massacre at My Lai : Exclusive pictures and eyewitness accounts confirm the story of American atrocities in a Vietnam village ». L’affaire est désormais évoquée par de grands médias. | |||
Le magazine ''Time'' estime dans un article intitulé « My Lai : an american tragedy » : « My Lai a remis en question la mission des États-Unis au Viêt Nam d'une manière que tous les manifestants anti-guerre n'auraient jamais pu faire. » (Carval ''in'' collectif, 1992, p. 223) | |||
8 décembre 69 : Première réaction publique de Nixon après la révélation de l’affaire de My Laï dans la presse. Selon Huret, « […] le président Richard Nixon déclare que le massacre de My Laï est un « incident isolé » et rappelle que plus d’un million d’Américains ont combattu au Vietnam. L’engouement médiatique pour les civils vietnamiens ne doit pas faire oublier les 40 000 soldats américains morts au combat. Nixon estime inutile la création d’une commission d’enquête présidentielle, en dépit des conseils donnés en ce sens par certains de ses conseillers, notamment Daniel Patrick Moynihan. » (Huret, 2008, p. 132) Il concède cependant : « Ce qui apparaît est certainement un massacre et en aucun cas il n'est justifié. » (cité ''in'' Carval ''in'' collectif, 1992, p. 224) | |||
9 décembre 69 : Selon Huret, dans l’affaire de My Laï, « L. Mendel Rivers [président de la commission des forces armées de la chambre des Représentants] convoque ainsi le 9 décembre William Peers dans son bureau pour lui exprimer sa crainte d’un manque de partialité de la part de la commission militaire : « Vous savez que nos gars (''boys'') ne feraient jamais un truc pareil », lui dit-il. » (cité ''in'' Huret, 2008, p. 133) | |||
Une réelle rivalité se dessinera entre les deux commissions : dans un souci d’objectivité, Peers demandera à ce que les témoins qu’il entend auditionner ne le soient pas au préalable par la commission Hebert, instituée par la chambre des Représentants sur une suggestion de Nixon (voir 13 décembre). Cette dernière refusera d’avaliser cet accord. Les membres de la commission Peers vont se heurter au silence des militaires, notamment celui des gradés. La commission Hébert, créée pour les soutenir, bénéficiera de plus d’indulgence de leur part. Selon Huret, elle « se transforme rapidement en tribune de défense des soldats et de la hiérarchie militaire. » (Huret, 2008, p. 135). Seul point de convergence, les deux commissions reconnaitront au final l’existence d’un massacre à Son My le 16 mars 1968. | |||
11 décembre 69 : Nouveau mémorandum de Kissinger adressé à Nixon qui souligne que les U.S.A. courent à l’échec (Kissinger 1, 1979, pp. 296-297, note citée partiellement p. 716). | |||
12 décembre 69 : Nouvelle réunion du C.N.S. américain. Kissinger y prend peu la parole mais déclare à sa fin : « Ce qu’il nous faut, c’est organiser la fin de la guerre et pas seulement le retrait de nos troupes. C’est cela que l’on attend de nous. » (Kissinger 1, 1979, p. 296) | |||
13 décembre 69 : Sur une suggestion de Nixon, la commission chargée des affaires militaires de la chambre des Représentants (''House Committee on the Armed Services'') attribue à F. Edward Hebert, un élu de Louisiane, la direction des interrogatoires sur la réalité du massacre de My Laï. | |||
L’institution de la commission Hebert est une réponse politique à la commission Peers (voir 26 novembre) dont le gouvernement américain craint les conclusions. Composée d’élus favorables à la guerre du Vietnam, Hebert ayant lui-même réclamé l’année précédente l’utilisation de l’arme atomique contre les Vietcongs, la commission du Congrès craint que la celle dirigée par Peers ne salisse l’honneur et la réputation de l’armée américaine. Contrairement à la commission Peers, cette deuxième commission met, du moins au départ, en doute l’existence réelle du massacre (voir 9 décembre) (Huret, 2008, pp. 131-132). | |||
15 décembre 69 : Nixon annonce un retrait de 50 000 hommes supplémentaires d'ici au 15 avril 1970. Ce retrait s’ajoute aux 115 000 qui ont déjà été retirés. Ces retraits affaiblissent de plus en plus les Américains dans le cadre de leurs négociations avec le N-V. Cette annonce donne cependant une certaine latitude à Nixon pour réduire et moduler les retraits en fonction des actions de l’ennemi (Kissinger 1, 1979, pp. 491-492). | |||
Le président de la commission des Affaires étrangères au Sénat, le sénateur Fullbright, exige que l’administration Nixon lève le voile du secret sur ce qui se passe au Laos et qui n’a été révélé jusque-ici ni au Congrès ni à l’opinion publique américaine. Des incursions de forces armées venant de Thaïlande entrent au Laos par le biais de 36 000 mercenaires méo placés sous le commandement du général Vang Pao dont le Q.G. est installé à Udon, au sud de Vientiane. Ces troupes sont armées, entraînées, transportées et épaulées par les Américains (Pentagone et C.I.A.) pour combattre les forces du Pathet Lao. Elles bénéficient d’un appui aérien massif issu des bases américaines situées en Thaïlande. Le gouvernement laotien semble mis devant un fait accompli. | |||
Des journalistes américains présents sur le terrain confirment cette situation. Fullbright déclare : « Il ne s’agit pas là, à mon avis, d’une affaire menée par la seule C.I.A. La C.I.A. agit sur les ordres du Conseil national de sécurité et d’un comité nommé par ce Conseil, qui dépend directement du président. » Pour être tout à fait juste, il ajoute que les administrations Kennedy et Johnson avaient agi de même (Burchett, 1970, pp. 114-115). | |||
18 décembre 69 : La Russie, la Chine, la Mongolie, la Corée du Nord et le Vietnam du Nord concluent un traité affirmant que l’U.R.S.S. et la Chine continueront à supporter le N-V malgré leurs discordances idéologiques. Ce qui remet en question la « doctrine Nixon ». | |||
En même temps, faisant écho à une interview de Nixon au ''Time Magazine'' dans laquelle il fait connaître son désir de connaître la Chine, Mao lui répond par le biais du journaliste Edgar Snow (voir 1<sup>er</sup> avril) en affirmant que Nixon serait le bienvenu en Chine « comme touriste ou comme Président » (Nguyen Phu Duc, 1996, p. 266). | |||
20 décembre 69 : Au Cambodge, la radio nationale khmère diffuse le message suivant : « Les agressions des forces américano-sud-vietnamiennes contre le territoire khmer se sont multipliées au cours des dernières semaines et marquent une importante recrudescence. Elles se produisent actuellement d’une manière de plus en plus fréquente, causant de nouvelles victimes et de nouveaux dommages matériels de notre côté. » (Sihanouk, 1979, p. 251). | |||
27 décembre 69 : Au 28<sup>e</sup> congrès du Sangkum, Sihanouk, opposé à la politique de Lon Lol, lance une vive mise en garde contre la « libéralisation trop hâtive » du secteur bancaire. Il recommande au gouvernement « d’avancer lentement et prudemment dans la voie de la libéralisation » (Sihanouk, 1979, p. 251). | |||
30 décembre 69 : Déclaration de Sihanouk au 28<sup>e</sup> congrès du Sangkum : « Les berges du Grand Lac [le Tonlé Sap] sont envahies actuellement par des Vietnamiens, des réfugiés ayant fui leur pays en guerre. Cette population étrangère échappe aux autorités des provinces limitrophes du lac. Certains Vietnamiens sont allés même jusqu’à menacer et frapper nos autorités lorsqu’elles se présentaient à eux. » (Sihanouk, 1979, p. 251). | |||
31 décembre 69 : Les effectifs américains sont de 475 000 hommes en Indochine. Les pertes de l’armée américaine en 1969 sont de 9 414 hommes (40 024 depuis 1960) et 62 946 blessés (270 441 depuis 1960). | |||
Les effectifs de l’armée s-v s’élèvent à une fourchette évoluant entre 897 000 et 1 000 000 d’hommes. Leurs pertes s’élèvent en 1969 à 62 946 hommes (110 176 depuis 1965). | |||
Les pertes des N-V en 1969 s’élèvent à plus de 45 000 hommes (plus de 400 000 depuis 1965) (Burns Siger, 1992, p. 111). | |||
Fin 69 : Nixon se retrouve dans la même situation que ses prédécesseurs : les négociations n’avancent pas ou très peu alors que l’armée n-v reconstruit ses forces. La seule réponse possible, vu le retrait en cours des troupes américaines, est de ralentir l’avancée des troupes n-v jusqu’à ce que l’A.R.V.N. soit capable de prendre la relève. Les Américains ont alors perdu depuis le début de la guerre 40 000 hommes et le conflit coûte au budget américain environ 30 milliards de dollars par an (Wainstock, Miller, 2019, p. 249). | |||
En se rendant en France pour se faire soigner, Sihanouk se rend à Rome. Il y est rejoint par Lon Lol de retour de son séjour médical français. On évoque la gravité de la situation au Cambodge mais Sihanouk est rassurant : rien de grave ne peut se passer en son absence… Or c’est tout le contraire qui est en train de s’y passer avec l’exaspération de la population cambodgienne confrontée à l’occupation vietnamienne. On tente d’en avertir Sihanouk mais, contrairement à d’habitude, il entend cette fois laisser sa porte close à ces voix (Tong, 1972, pp. 157-159). | |||
Sirik Matak et Khek Vandi (un proche de Sihanouk) se rendent en France pour rendre visite au chef de l’État cambodgien qui séjourne à l’hôpital Calmette. Sihanouk refuse dans un premier temps de recevoir son cousin puis cède. C’est lors d’une visite que Matak assure à son parent : « Je ne vous trahirai jamais. Je ne ferai rien contre vous et la princesse Monique. » L’avenir prouvera tout le contraire (Cambacérès, 2013, p. 153). |
Dernière version du 19 juillet 2025 à 08:11
Décembre 69 : 55 % des Noirs trouvent la guerre immorale contre 35 % chez les Blancs (Porte, 2008, p. 282).
Selon un sondage Louis Harris, 65 % des Américains estiment que des massacres comparables à celui de My Laï sont inévitables et n’impliquent pas que l’engagement des U.S.A. au Vietnam soit immoral. Seuls 24 % des sondés estiment ce conflit immoral. 39 % pensent qu’un soldat est un criminel de guerre s’il tue des civils innocents mais 66 % des sondés estiment que les soldats impliqués dans l’affaire doivent être déclarés innocents s’ils peuvent prouver qu’ils ont agi sur ordres de leurs supérieurs. 67 % des sondés estiment que les média n’auraient pas dû diffuser les témoignages des soldats impliqués avant la tenue de leurs procès respectifs (Carval in collectif, 1992, p. 224 et pp. 226-227).
Au Cambodge, convoqué par Sihanouk, le congrès du Sangkum s’oppose au projet de dénationalisation voulu par Sirik Matak.
Mise en place au niveau de l’armée américaine d’un système de tirage au sort visant à atténuer l’injustice au niveau du recrutement des soldats qui sont envoyés au Vietnam. Jusqu’alors ceux qui faisaient des études supérieures et appartenaient aux classes sociales les plus aisées bénéficiaient de sursis. La mise en place de cette procédure de tirages au sort n’exclut toutefois pas le maintien d’un système sursitaire.
Décembre 69 – janvier 70 : La commission Peers (voir 26 novembre) procède à plus de quatre cents entretiens des principaux protagonistes de l’affaire de My Laï. La déposition du pilote d’hélicoptère Hugh Thompson est particulièrement examinée et retenue. La commission l’érige en témoin moral du massacre en raison de sa défense de civils vietnamiens contre les forces américaines (Huret, 2008, p. 134). Des membres de la commission se rendront à Son My pour enquêter sur place et entendre des témoins vietnamiens. Toutefois, selon Huret, « les entretiens conduits par la commission Peers avec les habitants de My Laï sont extrêmement courts et les réponses fort laconiques. » (Huret, 2008, p. 144)
3 décembre 69 : Nixon dévoile dans un message à la nation son programme de vietnamisation de la guerre, le retrait ordonné des troupes, la libération des prisonniers détenus par les N-V aussi prompte que possible.
5 décembre 69 : Life Magazine publie à son tour les photographies du massacre de My Laï faites par Ronald L. Haeberle (négociées contre 25 000 dollars) dans un article intitulé : « The Massacre at My Lai : Exclusive pictures and eyewitness accounts confirm the story of American atrocities in a Vietnam village ». L’affaire est désormais évoquée par de grands médias.
Le magazine Time estime dans un article intitulé « My Lai : an american tragedy » : « My Lai a remis en question la mission des États-Unis au Viêt Nam d'une manière que tous les manifestants anti-guerre n'auraient jamais pu faire. » (Carval in collectif, 1992, p. 223)
8 décembre 69 : Première réaction publique de Nixon après la révélation de l’affaire de My Laï dans la presse. Selon Huret, « […] le président Richard Nixon déclare que le massacre de My Laï est un « incident isolé » et rappelle que plus d’un million d’Américains ont combattu au Vietnam. L’engouement médiatique pour les civils vietnamiens ne doit pas faire oublier les 40 000 soldats américains morts au combat. Nixon estime inutile la création d’une commission d’enquête présidentielle, en dépit des conseils donnés en ce sens par certains de ses conseillers, notamment Daniel Patrick Moynihan. » (Huret, 2008, p. 132) Il concède cependant : « Ce qui apparaît est certainement un massacre et en aucun cas il n'est justifié. » (cité in Carval in collectif, 1992, p. 224)
9 décembre 69 : Selon Huret, dans l’affaire de My Laï, « L. Mendel Rivers [président de la commission des forces armées de la chambre des Représentants] convoque ainsi le 9 décembre William Peers dans son bureau pour lui exprimer sa crainte d’un manque de partialité de la part de la commission militaire : « Vous savez que nos gars (boys) ne feraient jamais un truc pareil », lui dit-il. » (cité in Huret, 2008, p. 133)
Une réelle rivalité se dessinera entre les deux commissions : dans un souci d’objectivité, Peers demandera à ce que les témoins qu’il entend auditionner ne le soient pas au préalable par la commission Hebert, instituée par la chambre des Représentants sur une suggestion de Nixon (voir 13 décembre). Cette dernière refusera d’avaliser cet accord. Les membres de la commission Peers vont se heurter au silence des militaires, notamment celui des gradés. La commission Hébert, créée pour les soutenir, bénéficiera de plus d’indulgence de leur part. Selon Huret, elle « se transforme rapidement en tribune de défense des soldats et de la hiérarchie militaire. » (Huret, 2008, p. 135). Seul point de convergence, les deux commissions reconnaitront au final l’existence d’un massacre à Son My le 16 mars 1968.
11 décembre 69 : Nouveau mémorandum de Kissinger adressé à Nixon qui souligne que les U.S.A. courent à l’échec (Kissinger 1, 1979, pp. 296-297, note citée partiellement p. 716).
12 décembre 69 : Nouvelle réunion du C.N.S. américain. Kissinger y prend peu la parole mais déclare à sa fin : « Ce qu’il nous faut, c’est organiser la fin de la guerre et pas seulement le retrait de nos troupes. C’est cela que l’on attend de nous. » (Kissinger 1, 1979, p. 296)
13 décembre 69 : Sur une suggestion de Nixon, la commission chargée des affaires militaires de la chambre des Représentants (House Committee on the Armed Services) attribue à F. Edward Hebert, un élu de Louisiane, la direction des interrogatoires sur la réalité du massacre de My Laï.
L’institution de la commission Hebert est une réponse politique à la commission Peers (voir 26 novembre) dont le gouvernement américain craint les conclusions. Composée d’élus favorables à la guerre du Vietnam, Hebert ayant lui-même réclamé l’année précédente l’utilisation de l’arme atomique contre les Vietcongs, la commission du Congrès craint que la celle dirigée par Peers ne salisse l’honneur et la réputation de l’armée américaine. Contrairement à la commission Peers, cette deuxième commission met, du moins au départ, en doute l’existence réelle du massacre (voir 9 décembre) (Huret, 2008, pp. 131-132).
15 décembre 69 : Nixon annonce un retrait de 50 000 hommes supplémentaires d'ici au 15 avril 1970. Ce retrait s’ajoute aux 115 000 qui ont déjà été retirés. Ces retraits affaiblissent de plus en plus les Américains dans le cadre de leurs négociations avec le N-V. Cette annonce donne cependant une certaine latitude à Nixon pour réduire et moduler les retraits en fonction des actions de l’ennemi (Kissinger 1, 1979, pp. 491-492).
Le président de la commission des Affaires étrangères au Sénat, le sénateur Fullbright, exige que l’administration Nixon lève le voile du secret sur ce qui se passe au Laos et qui n’a été révélé jusque-ici ni au Congrès ni à l’opinion publique américaine. Des incursions de forces armées venant de Thaïlande entrent au Laos par le biais de 36 000 mercenaires méo placés sous le commandement du général Vang Pao dont le Q.G. est installé à Udon, au sud de Vientiane. Ces troupes sont armées, entraînées, transportées et épaulées par les Américains (Pentagone et C.I.A.) pour combattre les forces du Pathet Lao. Elles bénéficient d’un appui aérien massif issu des bases américaines situées en Thaïlande. Le gouvernement laotien semble mis devant un fait accompli.
Des journalistes américains présents sur le terrain confirment cette situation. Fullbright déclare : « Il ne s’agit pas là, à mon avis, d’une affaire menée par la seule C.I.A. La C.I.A. agit sur les ordres du Conseil national de sécurité et d’un comité nommé par ce Conseil, qui dépend directement du président. » Pour être tout à fait juste, il ajoute que les administrations Kennedy et Johnson avaient agi de même (Burchett, 1970, pp. 114-115).
18 décembre 69 : La Russie, la Chine, la Mongolie, la Corée du Nord et le Vietnam du Nord concluent un traité affirmant que l’U.R.S.S. et la Chine continueront à supporter le N-V malgré leurs discordances idéologiques. Ce qui remet en question la « doctrine Nixon ».
En même temps, faisant écho à une interview de Nixon au Time Magazine dans laquelle il fait connaître son désir de connaître la Chine, Mao lui répond par le biais du journaliste Edgar Snow (voir 1er avril) en affirmant que Nixon serait le bienvenu en Chine « comme touriste ou comme Président » (Nguyen Phu Duc, 1996, p. 266).
20 décembre 69 : Au Cambodge, la radio nationale khmère diffuse le message suivant : « Les agressions des forces américano-sud-vietnamiennes contre le territoire khmer se sont multipliées au cours des dernières semaines et marquent une importante recrudescence. Elles se produisent actuellement d’une manière de plus en plus fréquente, causant de nouvelles victimes et de nouveaux dommages matériels de notre côté. » (Sihanouk, 1979, p. 251).
27 décembre 69 : Au 28e congrès du Sangkum, Sihanouk, opposé à la politique de Lon Lol, lance une vive mise en garde contre la « libéralisation trop hâtive » du secteur bancaire. Il recommande au gouvernement « d’avancer lentement et prudemment dans la voie de la libéralisation » (Sihanouk, 1979, p. 251).
30 décembre 69 : Déclaration de Sihanouk au 28e congrès du Sangkum : « Les berges du Grand Lac [le Tonlé Sap] sont envahies actuellement par des Vietnamiens, des réfugiés ayant fui leur pays en guerre. Cette population étrangère échappe aux autorités des provinces limitrophes du lac. Certains Vietnamiens sont allés même jusqu’à menacer et frapper nos autorités lorsqu’elles se présentaient à eux. » (Sihanouk, 1979, p. 251).
31 décembre 69 : Les effectifs américains sont de 475 000 hommes en Indochine. Les pertes de l’armée américaine en 1969 sont de 9 414 hommes (40 024 depuis 1960) et 62 946 blessés (270 441 depuis 1960).
Les effectifs de l’armée s-v s’élèvent à une fourchette évoluant entre 897 000 et 1 000 000 d’hommes. Leurs pertes s’élèvent en 1969 à 62 946 hommes (110 176 depuis 1965).
Les pertes des N-V en 1969 s’élèvent à plus de 45 000 hommes (plus de 400 000 depuis 1965) (Burns Siger, 1992, p. 111).
Fin 69 : Nixon se retrouve dans la même situation que ses prédécesseurs : les négociations n’avancent pas ou très peu alors que l’armée n-v reconstruit ses forces. La seule réponse possible, vu le retrait en cours des troupes américaines, est de ralentir l’avancée des troupes n-v jusqu’à ce que l’A.R.V.N. soit capable de prendre la relève. Les Américains ont alors perdu depuis le début de la guerre 40 000 hommes et le conflit coûte au budget américain environ 30 milliards de dollars par an (Wainstock, Miller, 2019, p. 249).
En se rendant en France pour se faire soigner, Sihanouk se rend à Rome. Il y est rejoint par Lon Lol de retour de son séjour médical français. On évoque la gravité de la situation au Cambodge mais Sihanouk est rassurant : rien de grave ne peut se passer en son absence… Or c’est tout le contraire qui est en train de s’y passer avec l’exaspération de la population cambodgienne confrontée à l’occupation vietnamienne. On tente d’en avertir Sihanouk mais, contrairement à d’habitude, il entend cette fois laisser sa porte close à ces voix (Tong, 1972, pp. 157-159).
Sirik Matak et Khek Vandi (un proche de Sihanouk) se rendent en France pour rendre visite au chef de l’État cambodgien qui séjourne à l’hôpital Calmette. Sihanouk refuse dans un premier temps de recevoir son cousin puis cède. C’est lors d’une visite que Matak assure à son parent : « Je ne vous trahirai jamais. Je ne ferai rien contre vous et la princesse Monique. » L’avenir prouvera tout le contraire (Cambacérès, 2013, p. 153).