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Thieu et Ky arrivent dans l’après-midi du 6 et sont accueillis par LBJ. La réunion commence le 7 au matin au Q.G. des forces du Pacifique de l’île. Le premier volet concerne l’avenir du S-V. Soudain devenu faussement démocrate sous la pression américaine, Ky commence par une autocritique du régime en déclarant s’être trop longtemps focalisé sur la guerre et avoir jusque-là ignoré le lien entre celle-ci et les problèmes politiques et sociaux du pays. Il préconise désormais « un programme visant à l’avènement d’une société meilleure » comportant « un gouvernement véritablement démocratique, émanant du peuple et ayant sa confiance ». | Thieu et Ky arrivent dans l’après-midi du 6 et sont accueillis par LBJ. La réunion commence le 7 au matin au Q.G. des forces du Pacifique de l’île. Le premier volet concerne l’avenir du S-V. Soudain devenu faussement démocrate sous la pression américaine, Ky commence par une autocritique du régime en déclarant s’être trop longtemps focalisé sur la guerre et avoir jusque-là ignoré le lien entre celle-ci et les problèmes politiques et sociaux du pays. Il préconise désormais « un programme visant à l’avènement d’une société meilleure » comportant « un gouvernement véritablement démocratique, émanant du peuple et ayant sa confiance ». | ||
Puis les conseillers des | Puis les conseillers des 2 délégations se répartissent en groupes spécialisés autour des thèmes du comment parvenir à une négociation, comment améliorer la pacification et le développement rural, comment renforcer et stabiliser l’économie, la santé, l’éducation. Au matin du 8, on présente des projets autour de ces thèmes. L’ambassadeur Lodge, satisfait de la tournure des travaux déclare : « Nous venons ici de faire un pas dans la lutte pour améliorer le sort du petit homme tout en bas de l’échelle. C’était là notre objectif. » Réclamant des bilans dans 4 à 6 mois, LBJ explique à ses collaborateurs qu’il veut voir des progrès et non des rapports, non pas des paroles mais des actes. | ||
La conférence aboutit à la rédaction d’un communiqué en 5 points et une proclamation diplomatique auxquels ont adhéré d’un commun accord Vietnamiens et Américains : vaincre le Vietcong ; éliminer l’injustice sociale ; créer une économie stable et offrir une meilleure existence matérielle au peuple s-v ; instituer une véritable démocratie ; rédiger « dans les prochains mois » une constitution (Johnson, 1972, pp. 297-299). | La conférence aboutit à la rédaction d’un communiqué en 5 points et une proclamation diplomatique auxquels ont adhéré d’un commun accord Vietnamiens et Américains : vaincre le Vietcong ; éliminer l’injustice sociale ; créer une économie stable et offrir une meilleure existence matérielle au peuple s-v ; instituer une véritable démocratie ; rédiger « dans les prochains mois » une constitution (Johnson, 1972, pp. 297-299). | ||
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28 février 66 : '''McGeorge Bundy (Secrétaire d’État à la Sécurité nationale) quitte son poste''' pour rejoindre la présidence de la fondation Ford. Il est temporairement remplacé par Robert W. Komer jusqu’à la nomination Walt Rostow le 1<sup>er</sup> avril (McNamara, 1996, p. 230-231). | |||
'''Un sondage Louis Harris aux U.S.A. montre qu’il existe dans le pays un « consensus »''' : « le peuple américain aspire à une fin honorable des hostilités ». Deux tiers des Américains estiment qu’il faut rester au Vietnam et aller jusqu’au bout. | '''Un sondage Louis Harris aux U.S.A. montre qu’il existe dans le pays un « consensus »''' : « le peuple américain aspire à une fin honorable des hostilités ». Deux tiers des Américains estiment qu’il faut rester au Vietnam et aller jusqu’au bout. | ||
McN note cependant dans ses mémoires que « le peuple américain se divise entre ceux qui préconisent un effort militaire maximal pour abréger la guerre et ceux qui préfèrent les négociations aux risques de l’escalade. » Il conclut : « S’il y a une évolution de l’opinion dans le pays, elle va dans le sens de la recherche d’une solution militaire à ce qui est généralement perçu comme une impasse désespérante. » (McNamara, 1996, p. 246). | McN note cependant dans ses mémoires que « le peuple américain se divise entre ceux qui préconisent un effort militaire maximal pour abréger la guerre et ceux qui préfèrent les négociations aux risques de l’escalade. » Il conclut : « S’il y a une évolution de l’opinion dans le pays, elle va dans le sens de la recherche d’une solution militaire à ce qui est généralement perçu comme une impasse désespérante. » (McNamara, 1996, p. 246). |
Dernière version du 8 juillet 2025 à 22:53
Février 66 : La 1st Cav est déployée le long de la côte dans la province de Binh Dinh dans le cadre de l’opération Masher White Wing.
Le sénateur Fulbright, président de la commission des Affaires étrangère au Sénat, organise une série d’auditions du gouvernement au sujet de sa politique vietnamienne. Elles sont au début diffusées sur les grandes chaînes de télévision mais ne seront pas jusqu’à leur achèvement.
Le ton demeure mesuré mais certains représentants de l’administration éprouvent des difficultés à justifier des opérations sans résultats apparents. Au cours de ces auditions, une violente altercation a par exemple lieu entre le sénateur Wayne Morse (qui fait partie des 2 seuls sénateurs à n’avoir pas voté la résolution du Tonkin) et l’ex-ambassadeur à Saigon, actuel conseiller présidentiel, Maxwell Taylor, venu défendre la politique gouvernementale devant la commission. Morse déclare : « Je maintiens le point de vue qu'il ne faudra pas longtemps avant que le peuple américain, en tant que peuple, répudie notre guerre en Asie du Sud-est ». En réponse, Taylor lui répond ironiquement : « C'est bien sûr une bonne nouvelle pour Hanoï, sénateur ». Morse lui rétorque furieusement : « Je sais que c'est la diffamation que vous, les militaristes, donnez à ceux d'entre nous qui ont d'honnêtes divergences d'opinion avec vous, mais je n'ai pas l'intention de descendre dans le caniveau avec vous et de m'engager dans ce genre de débat, général. » En confirmant la sécession de certains sénateurs d’avec les choix de l’administration, ces auditions ne remettent pas pour autant en cause la position du président (Portes, 2008, pp. 151-152).
Premières manifestations dans la rue aux U.S.A. nommément dirigées contre LBJ et sa politique menée au Vietnam. C’est à cette période que le président s’en prend avec condescendance aux dirigeants de ces mouvements de contestation en les nommant « nervous nellies » (« vielles filles sensibles ») (Portes, 2008, p 158).
2 février 66 : Le conseil des ministres français exprime sa réprobation au moment même de la reprise des bombardements américains (De Quirielle, 1992, p. 187).
5 février 66 : Au Cambodge, les bureaux de l'organisation américaine Asia Foundation réputée proche de la C.I.A., sont fermés.
5 - 8 février 66 : Conférence d’Honolulu. Y assistent : côté américain, McN (secrétaire d’État à la Défense), McGeorge Bundy (conseiller à la Sécurité nationale), McNaughton (sous-secrétaire d’État à la Défense, adjoint de McN), Earle Wheeler (président des chefs d’état-major interarmes), Sharp (commandant en chef des Forces du Pacifique), Maxell Taylor (ancien ambassadeur à Saigon devenu conseiller spécial du président), Wesmoreland (commandant en chef au Vietnam), Freeman (secrétaire d’État à l’agriculture), Gardner (secrétaire d’État à la Santé, à l’Éducation et aux Affaires sociales), Bell (directeur de l’Agence pour le développement international), Cabot Lodge (ambassadeur à Saigon). Côté s-v : Nguyen Van Thieu (président) et Nguyen Cao Ky (premier ministre).
Le 5, la conférence aborde un volet militaire délicat que Johnson se garde bien d’évoquer dans ses mémoires. Selon Halberstam, « pour la première fois, Westmoreland était le principal personnage. Il n’était plus numéro deux à Saigon, assis derrière Taylor. Maintenant c’était à lui de jouer et il allait se révéler un joueur très fort, qui savait ce qu’il voulait, combien demander et combien ne pas demander. »
Il demande des troupes (sans en préciser le nombre pour ne pas effrayer les conseillers civils) mais cède provisoirement en stratégie sur la théorie des enclaves chères à Taylor. Il obtient plus qu’il ne demande : 33 500 hommes deviennent 40 000 avec possibilité de renforts supplémentaires. On se met d’accord sur la stratégie des enclaves. Sharp, Wheeler et Westmoreland veulent une stratégie plus agressive mais laissée à l’état de projet pour l’instant. On convient que la guerre durera plus longtemps que prévu initialement.
Selon Halberstam, au cours de cette conférence rien n’est véritablement tranché quant à la stratégie à adopter : « […] Taylor tenait bon, mais c’était une ligne bien fragile. Rien donc n’avait été résolu mais c’était la dernière fois que Max Taylor jouait un rôle important, en fait c’étaient ses adieux. » (Halberstam, 1974, pp. 526-527).
Thieu et Ky arrivent dans l’après-midi du 6 et sont accueillis par LBJ. La réunion commence le 7 au matin au Q.G. des forces du Pacifique de l’île. Le premier volet concerne l’avenir du S-V. Soudain devenu faussement démocrate sous la pression américaine, Ky commence par une autocritique du régime en déclarant s’être trop longtemps focalisé sur la guerre et avoir jusque-là ignoré le lien entre celle-ci et les problèmes politiques et sociaux du pays. Il préconise désormais « un programme visant à l’avènement d’une société meilleure » comportant « un gouvernement véritablement démocratique, émanant du peuple et ayant sa confiance ».
Puis les conseillers des 2 délégations se répartissent en groupes spécialisés autour des thèmes du comment parvenir à une négociation, comment améliorer la pacification et le développement rural, comment renforcer et stabiliser l’économie, la santé, l’éducation. Au matin du 8, on présente des projets autour de ces thèmes. L’ambassadeur Lodge, satisfait de la tournure des travaux déclare : « Nous venons ici de faire un pas dans la lutte pour améliorer le sort du petit homme tout en bas de l’échelle. C’était là notre objectif. » Réclamant des bilans dans 4 à 6 mois, LBJ explique à ses collaborateurs qu’il veut voir des progrès et non des rapports, non pas des paroles mais des actes.
La conférence aboutit à la rédaction d’un communiqué en 5 points et une proclamation diplomatique auxquels ont adhéré d’un commun accord Vietnamiens et Américains : vaincre le Vietcong ; éliminer l’injustice sociale ; créer une économie stable et offrir une meilleure existence matérielle au peuple s-v ; instituer une véritable démocratie ; rédiger « dans les prochains mois » une constitution (Johnson, 1972, pp. 297-299).
Côté sécurité, on promet : de faire passer de 20 à 40 % les zones qui sont interdites au VM ; d’accroître de 30 à 50 % les routes et chemins de fer accessibles ; de faire passer de 50 à 60 % les zones où la population sera en sécurité (Portes, 2008, p. 120).
8 février 66 : Suite à la trêve des bombardements américains entre le 24 décembre 1965 et le 31 janvier, LBJ donne l’ordre de les suspendre à nouveau pour une courte durée si les N-V cessent les infiltrations. Il adresse un courrier à HCM en ce sens. Ce dernier lui répondra que les bombardements doivent cesser sans condition préalable : « Le peuple vietnamien ne cédera jamais à la force ni n’acceptera de pourparlers sous la menace des bombes. » (cité in Wainstock, Miller, 2019, p. 220).
Lors de la conférence d’Honolulu, puisque les Américains se sont engagés à aider les S-V, LBJ confie à son chargé d’Affaires au Vietnam, William J. Porter, de superviser les décisions prises lors de cette rencontre. LBJ charge Robert W. Komer (membre du C.N.S.) de devenir son assistant spécial chargé de la pacification car, selon le Komer report on pacification (un rapport technocratique établi avec des moyens informatiques), 32 % des routes du S-V sont considérées comme « sûres », 41 % « peu sûres » et 27 % aux mains du Vietcong.
Réponse courtoise (et presque repentante) de De Gaulle à HCM suite à sa lettre du 24 janvier : « Vous ne pouvez douter, Monsieur le Président, de la vigilance et de la sympathie avec lesquelles, depuis l’origine, et plus encore depuis un certain temps, la France suit le drame vietnamien, attachée qu’elle reste au Vietnam par l’histoire, les affinités humaines et par les liens de toutes sortes qui subsistent entre elle et lui, et convaincue qu’une meilleure compréhension entre Vietnamiens et Français, au lendemain de la guerre mondiale, aurait prévenu les cruels événements qui déchirent votre pays. »
Cette réponse sera rendue publique le 15 et interprétée par la presse (France-Asie) comme une offre de médiation puisque le Général se déclare prêt à maintenir des contacts utiles avec le gouvernement de la R.D.V. par le biais de Quirielle, nouvellement nommé à la tête de la délégation française à Hanoi (voir 6 janvier) et de Mai Van Bo, futur consul général du N-V à Paris. Côté n-v, selon De Quirielle, « […] cette lettre comblait les dirigeants vietnamiens. Ils le manifestèrent en lui donnant un traitement de faveur », notamment en la publiant en première page dans le quotidien du parti, Nham Dan (Journoud, 2011, pp. 219-220 ; De Quirielle, 1992, pp. 71-72).
9 février 66 : Lors d’une réunion, LBJ considère le communiqué de la conférence d’Honolulu (voir 5 – 8 février) comme « une sorte de Bible que nous allons avoir à suivre. » Il s’adresse aux « ministres et membres des cabinets ministériels de l’un ou l’autre gouvernement [celui de Kennedy] » et ajoute : « Gardez présent à l’esprit que nous allons vous faire passer des examens et que les questions porteront exactement sur ce que vous avez fait ! » (cité in Francini 2, 1988, p. 311).
Il est désormais question de « démocratie rurale », d’amélioration de l’économie et des finances du S-V, de santé publique et d’éducation. Curieusement, d’où peut-être omission dans ses mémoires, LBJ déclare que « la réunion d’Honolulu n’a pas été une conférence militaire. » Il s’est refusé à y aborder les questions d’effectifs « pour additionner X divisions, Y bataillons ou Z régiments ou D dollars, parce que la question qui se pose : ces milliards de dollars que nous sommes en train de dépenser peuvent nous amener à une crise d’inflation pire que celle dont nous parlons pour le Vietnam. Nous voulons étudier la question ailleurs, tranquillement, dans notre bureau, après que vous nous aurez présenté vos recommandations général Wheeler, amiral Sharp, quand vous viendrez nous voir. » (cité in Le dossier du Pentagone, 1971, pp. 526-528)
19 février 66 : Le sénateur démocrate Robert Kennedy fait une proposition de compromis politique qui prévoit que le Vietcong soit admis à « partager le pouvoir et la responsabilité à Saigon ». Elle est immédiatement rejetée par le vice-président Humphrey qui déclare que cela équivaudrait « à faire entrer un renard dans un poulailler » (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 551).
26 février 66 : LBJ déclare à la presse : « Nous n’avons actuellement aucune demande non satisfaite du général Westmoreland sur mon bureau. » 230 000 hommes sont actuellement au Vietnam. Le jeu prudent des demandes par « petits paquets » se poursuit pour satisfaire le commandant du M.A.C.V. (Le dossier du Pentagone, 1971, p. 498).
28 février 66 : McGeorge Bundy (Secrétaire d’État à la Sécurité nationale) quitte son poste pour rejoindre la présidence de la fondation Ford. Il est temporairement remplacé par Robert W. Komer jusqu’à la nomination Walt Rostow le 1er avril (McNamara, 1996, p. 230-231).
Un sondage Louis Harris aux U.S.A. montre qu’il existe dans le pays un « consensus » : « le peuple américain aspire à une fin honorable des hostilités ». Deux tiers des Américains estiment qu’il faut rester au Vietnam et aller jusqu’au bout.
McN note cependant dans ses mémoires que « le peuple américain se divise entre ceux qui préconisent un effort militaire maximal pour abréger la guerre et ceux qui préfèrent les négociations aux risques de l’escalade. » Il conclut : « S’il y a une évolution de l’opinion dans le pays, elle va dans le sens de la recherche d’une solution militaire à ce qui est généralement perçu comme une impasse désespérante. » (McNamara, 1996, p. 246).