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par Jean-François Jagielski

« Décembre 1947 » : différence entre les versions

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Décembre 47 : '''Rupture définitive entre Bao Daï et le Vietminh''' qui le condamne à mort et le prive de la nationalité vietnamienne par un procès par contumace prononcé par une cour martiale improvisée.


6 - 8 décembre 47 : '''Rencontre entre Bollaert et Bao Daï en baie d’Along''' sur le ''Dugay-Touin''. Elle a lieu sous le signe d’une méfiance réciproque. Bollaert lui propose et proposera, les 6 décembre 1947 puis le 5 juin 1948, de devenir chef d’État du Vietnam, dans des conditions propices à un très hypothétique ralliement du Vietminh. Selon Messmer, présent lors de l’entretien, « Bao Daï se méfie du Haut-Commissaire, qui a d’abord cherché la paix avec le Vietminh […] » (Messmer, 1992, p. 186). Un procès-verbal des discussions est produit mais surtout '''un protocole secret qui, pour la première fois, stipule que « sous les conditions prévues ci-dessous et dans le cadre de l’Union française, la France reconnaît l’indépendance du Vietnam. »''' (protocole cité ''in extenso in'' Devillers, 2010, pp. 449-451) Mais Bao Daï refuse de le signer jugeant qu’il limite par de multiples et réelles restrictions la notion même d’indépendance, notamment au niveau diplomatique. L’ex-empereur l’a simplement paraphé d’un « Vinh Thuy ». Bollaert se prévaut de ce simple paraphe et s’envole immédiatement pour Paris, ce qui rend le premier furieux. En fait, les deux hommes ne voient pas les choses de la même façon : Bao Daï est favorable à l’indépendance, à un statut de dominion pour le Vietnam et l’a fait savoir ; Bollaert reste l’homme d’une stricte Union française dans laquelle le Vietnam resterait plus ou moins subordonné à la France. Et c’est d’ailleurs ce que veut l’actuel gouvernement français. Bao Daï multipliera alors les atermoiements, « bouderies » et surenchères, redoutant par-dessus-tout la puissance du Vietminh qui l’a condamné à mort (voir décembre). Selon Messmer, il part pour « Hong-Kong, bien décidé à ne revenir que s’il obtient beaucoup plus, comme le lui recommande Ngo Dinh Diem, à l’époque son principal conseiller. » (Messmer, 1992, p. 187) La « solution Bao Daï » ne s’enclenche pas.
9 décembre 47 : Bollaert estime l’effectif français à 90 000 hommes pour 1948. On est loin des demandes de Valluy de janvier (115 000 hommes). Faute de disponibilités en métropole et surtout de budget, seul l’effectif des supplétifs est augmenté. Il passe de 22 000 à 40 000 (Bodinier, 1989, p. 76).
10 décembre 47 : Arrêt progressif de l’opération ''Ceinture''. Les groupements Beaufre et Sauvagnac se replient sur Hanoi. Cet échec – ou demi-échec – est gommé des rapports produits par Valluy, Salan et Sauvagnac s’illusionnent et analysent comme victoires les esquives voulues par la tactique du VM. Ces rapports masquent la vérité et gomment volontairement l’efficacité de la stratégie du VM qui est de durer longtemps en ménageant ses pertes (Vallette, 2010, p. 73). Seul le colonel Beaufre fera preuve d’un esprit plus critique. Il écrit à la fin de l’opération ''Léa'' que la population ne s’est ralliée « que par endroits » et que la « situation est très précaire ». Son groupement n’a fait que « traverser le pays », est demeuré le long des routes, laissant « derrière lui que des garnisons insuffisantes ». Selon le même, « les forces vietminh n’ont pas évacué le pays ni relâché leur emprise sur la population. » (cité ''in'' Vallette, 2010, p. 79)
19 décembre 47 : Pour le premier anniversaire de l’attaque du VM sur Hanoi. Maurice Schumann, président du Conseil M.R.P., écrit dans ''L’Aube'' : « L’Histoire dira le rôle que – dans les conseils de gouvernement comme en Indochine même – jouèrent les hommes de notre esprit ; sans eux – nous pouvons le dire – n’aurait pas été formulée, ni surtout répétée la double affirmation de solidarité et de continuité qu’ont si bien mérité d’entendre les artisans et les bénéficiaires de la paix française en Asie. » (cité in Dalloz, 1996, p. 107) L’Indochine n’a donc pas été abandonnée…
Gaston Palewski (R.P.F.), au cours d’une réunion au Vélodrome d’Hiver, s’en prend aux accords de la Baie d’Along et à la « solution Bao Daï » qui, à ses yeux, n’en est pas une. Le gouvernement a montré « dans tout cela une hâte incroyable et assez inexplicable. » Il interpelle son auditoire sur l’intérêt d’un tel accord. Il conclut son intervention en déclarant : « Je déclare ici hautement, en pesant mes mots, au nom du Rassemblement pour le Peuple français, je déclare que nous estimons qu’un gouvernement de minorités issu d’une Chambre qui n’est plus l’expression de la volonté nationale, n’a pas qualité pour disposer  d’une parcelle de la République française, et qu’en cette matière – comme en d’autres – nous ne considérons pas que la signature de ce gouvernement engage la parole de la France. » (cité ''in'' Turpin, 2005, p. 340) Le R.P.F. est alors ressenti par de nombreux Français ou élites de l’Union française comme un parti conservateur, voire réactionnaire, en matière coloniale.
Après sa période républicaine où il espérait rallier les 3 ''Ky'' à sa cause mais sans y parvenir, le général Xuan (président de la République du Sud-Vietnam) part pour Hong-Kong rencontrer Bao Daï reparti volontairement en exil. Il devient alors fervent monarchiste, faisant publiquement l’éloge de l’intelligence et de la clairvoyance politique de l’ex-empereur  (Boyer de la Tour, 1962, p. 75).
20 décembre 47 : Fin de l’opération ''Ceinture'' dont le succès est à nouveau très mitigé. Les objectifs n’ont pas tous été atteints, loin s’en faut. La dispersion et l’éclatement des organismes gouvernementaux du VM a porté ses fruits. Aucun d’entre eux n’a été capturé. Et l’A.P.V. n’a pas été anéantie, opérant ses habituels et habiles décrochages pour limiter ses pertes (Gras, 1979, pp. 201-205). Selon les estimations des rapports français, ''Léa'' a occasionné 1 200 morts et 200 prisonniers, ce qui est peu rapporté aux 8 000 soldats vietnamiens présents dans le secteur attaqué par les Français. L’opération ''Ceinture'' aurait occasionné quant à elle 2 805 tués et 800 prisonniers. Un rapport français empreint d’optimisme établi au 22 décembre dénombre pour les deux opérations ''Léa'' et ''Ceinture'' 7 200 morts, 1 000 prisonniers et un nombre inconnu de blessés (Bodinier, 1989, p. 341). Certes un coup réel a été porté contre le VM. Un message de Giap intercepté affirme : « Nous avons perdu les deux tiers de nos ateliers et dépôts [voir Bodinier, 1989, p. 342], le gros de nos force est intact. » (cité ''in'' Vallette, 2010, p. 75) La question des pertes françaises paraît nettement  sous-estimée : 242 tués, 2 noyés, 41 disparus, 586 blessés selon les chiffres officiels produits par l’armée française (Bodinier, ibid.). D'après Salan, les pertes françaises seraient  presqu’insignifiantes : le bilan combiné des deux opérations comptabiliserait 40 tués, 40 disparus et 580 blessés (Salan 2, 1970, p. 113). Gras n’avance pas de chiffres précis tout en les minimisant encore : les pertes en morts et blessés ont été faibles, une cinquantaine de tués et 191 blessés. Tous ces chiffres paraissent nettement surestimés côté des pertes vietnamiennes et sous-estimés côté des pertes françaises. Ce qui donne au corps expéditionnaire un sentiment de victoire non pas totalement fictif mais trompeur. Optimiste et toujours persuadé que le militaire sert le politique, Valluy observe à l’issue des deux opérations que désormais « la politique du gouvernement français doit s’en trouver considérablement facilitée. » (Gras, 1979, pp. 206-207)
Émile Bollaert repart pour Paris pour aller rendre compte de la dernière entrevue avec Bao Daï en baie d’Along.
21 décembre 47 : Au Cambodge, des élections législatives sont organisées (voir 31 décembre). Majorité absolue au parti démocrate avec 73 % des voix, le parti des élites, au grand déplaisir de Sihanouk.
21 - 26 décembre 47 : Bao Daï, de retour à Hong-Kong voit Diem, Tran Van Ly et le général Xuan (président du gouvernement de Cochinchine depuis le 29 septembre). Il n’évoque pas explicitement le protocole secret signé avec Bollaert lors des accords de la baie d’Along. Pour Diem et Ly, seul un statut de dominion est satisfaisant. En l’état, les propositions françaises actuel sont jugées insuffisantes par tous (voir 22 mars 1948). Bao Daï s’envole pour l’Europe à bord d’un avion britannique.
Même le très profrançais général Xuan fait savoir par voie de presse dès le 21 que « si le discours d’Hadong n’est pas à retenir [voir 26 septembre], les propositions faites par le haut-commissaire Bollaert dans la baie d’Along ne le sont pas d’avantage [voir 6 - 8 septembre]. » (cité ''in'' Gras, 1979, pp. 200-201). Les Français sont à nouveau dans une impasse politique  totale.
23 décembre 47 : Bollaert arrive à Paris pour rendre compte de l’entrevue en baie d’Along avec Bao Daï (voir 6 - 8 décembre). En conseil des ministres, l’approbation gouvernementale sur son action  n’est que partielle. Devant les réticences d’Auriol face à ce qui lui est rapporté, Bollaert, pour se défendre, prétend qu’HCM a récemment adhéré à un Kominform asiatique, ce qui est faux. Le gouvernement Schuman donne cependant « plein mandat au haut-commissaire […] pour poursuivre, en dehors du Vietminh, toutes les actions et négociations nécessaires au rétablissement de la paix et la liberté dans les pays vietnamiens. » Il choisit donc la voie Bao Daï et celle de ne pas négocier avec le VM alors que ce dernier est le seul à être en position de force militaire (voir 20 décembre) (Gras, 1979, p. 201).
26 décembre 47 : Bao Daï s’est envolé pour l’Europe dans l’espoir d’obtenir en France ce qu’il n’a pas eu à Saigon. Après avoir consulté, il cherche à faire marche arrière. Sur invitation de Bidault (Affaires étrangères), il quitte Hong-Kong et se rend à Londres puis Genève. Arrivé en France, il déclare è Schuman « être venu à titre personnel pour s’informer de la position du gouvernement français dont il attend des propositions nouvelles. » (voir 7 - 13 janvier 1948)
29 décembre 47 : Lors d’une conférence de presse à Saigon, le général Xuan qui se voit toujours comme un recours, dévoile les intentions de Bao Daï qui, selon ses propos, ne veut pas traiter avec la France.
31 décembre 47 : Au Cambodge, des élections législatives ont eu lieu à partir du 21. C’est un scrutin uninominal majoritaire à un tour. Sur 782 000 électeurs inscrits, 464 000 ont voté     (59 %). Les démocrates ont obtenu 65 % des voix, les libéraux 32 %. Pour autant, la clarté de ces résultats n’assurent pas une stabilité gouvernementale. Des querelles de personnes et de clans feront qu’aucun gouvernement ne parviendra à tenir dans le temps plus de 7 mois d’affilée (Cambacérès, 2013, pp. 64-65).

Dernière version du 31 mai 2025 à 12:58

Décembre 47 : Rupture définitive entre Bao Daï et le Vietminh qui le condamne à mort et le prive de la nationalité vietnamienne par un procès par contumace prononcé par une cour martiale improvisée.


6 - 8 décembre 47 : Rencontre entre Bollaert et Bao Daï en baie d’Along sur le Dugay-Touin. Elle a lieu sous le signe d’une méfiance réciproque. Bollaert lui propose et proposera, les 6 décembre 1947 puis le 5 juin 1948, de devenir chef d’État du Vietnam, dans des conditions propices à un très hypothétique ralliement du Vietminh. Selon Messmer, présent lors de l’entretien, « Bao Daï se méfie du Haut-Commissaire, qui a d’abord cherché la paix avec le Vietminh […] » (Messmer, 1992, p. 186). Un procès-verbal des discussions est produit mais surtout un protocole secret qui, pour la première fois, stipule que « sous les conditions prévues ci-dessous et dans le cadre de l’Union française, la France reconnaît l’indépendance du Vietnam. » (protocole cité in extenso in Devillers, 2010, pp. 449-451) Mais Bao Daï refuse de le signer jugeant qu’il limite par de multiples et réelles restrictions la notion même d’indépendance, notamment au niveau diplomatique. L’ex-empereur l’a simplement paraphé d’un « Vinh Thuy ». Bollaert se prévaut de ce simple paraphe et s’envole immédiatement pour Paris, ce qui rend le premier furieux. En fait, les deux hommes ne voient pas les choses de la même façon : Bao Daï est favorable à l’indépendance, à un statut de dominion pour le Vietnam et l’a fait savoir ; Bollaert reste l’homme d’une stricte Union française dans laquelle le Vietnam resterait plus ou moins subordonné à la France. Et c’est d’ailleurs ce que veut l’actuel gouvernement français. Bao Daï multipliera alors les atermoiements, « bouderies » et surenchères, redoutant par-dessus-tout la puissance du Vietminh qui l’a condamné à mort (voir décembre). Selon Messmer, il part pour « Hong-Kong, bien décidé à ne revenir que s’il obtient beaucoup plus, comme le lui recommande Ngo Dinh Diem, à l’époque son principal conseiller. » (Messmer, 1992, p. 187) La « solution Bao Daï » ne s’enclenche pas.


9 décembre 47 : Bollaert estime l’effectif français à 90 000 hommes pour 1948. On est loin des demandes de Valluy de janvier (115 000 hommes). Faute de disponibilités en métropole et surtout de budget, seul l’effectif des supplétifs est augmenté. Il passe de 22 000 à 40 000 (Bodinier, 1989, p. 76).


10 décembre 47 : Arrêt progressif de l’opération Ceinture. Les groupements Beaufre et Sauvagnac se replient sur Hanoi. Cet échec – ou demi-échec – est gommé des rapports produits par Valluy, Salan et Sauvagnac s’illusionnent et analysent comme victoires les esquives voulues par la tactique du VM. Ces rapports masquent la vérité et gomment volontairement l’efficacité de la stratégie du VM qui est de durer longtemps en ménageant ses pertes (Vallette, 2010, p. 73). Seul le colonel Beaufre fera preuve d’un esprit plus critique. Il écrit à la fin de l’opération Léa que la population ne s’est ralliée « que par endroits » et que la « situation est très précaire ». Son groupement n’a fait que « traverser le pays », est demeuré le long des routes, laissant « derrière lui que des garnisons insuffisantes ». Selon le même, « les forces vietminh n’ont pas évacué le pays ni relâché leur emprise sur la population. » (cité in Vallette, 2010, p. 79)


19 décembre 47 : Pour le premier anniversaire de l’attaque du VM sur Hanoi. Maurice Schumann, président du Conseil M.R.P., écrit dans L’Aube : « L’Histoire dira le rôle que – dans les conseils de gouvernement comme en Indochine même – jouèrent les hommes de notre esprit ; sans eux – nous pouvons le dire – n’aurait pas été formulée, ni surtout répétée la double affirmation de solidarité et de continuité qu’ont si bien mérité d’entendre les artisans et les bénéficiaires de la paix française en Asie. » (cité in Dalloz, 1996, p. 107) L’Indochine n’a donc pas été abandonnée…

Gaston Palewski (R.P.F.), au cours d’une réunion au Vélodrome d’Hiver, s’en prend aux accords de la Baie d’Along et à la « solution Bao Daï » qui, à ses yeux, n’en est pas une. Le gouvernement a montré « dans tout cela une hâte incroyable et assez inexplicable. » Il interpelle son auditoire sur l’intérêt d’un tel accord. Il conclut son intervention en déclarant : « Je déclare ici hautement, en pesant mes mots, au nom du Rassemblement pour le Peuple français, je déclare que nous estimons qu’un gouvernement de minorités issu d’une Chambre qui n’est plus l’expression de la volonté nationale, n’a pas qualité pour disposer  d’une parcelle de la République française, et qu’en cette matière – comme en d’autres – nous ne considérons pas que la signature de ce gouvernement engage la parole de la France. » (cité in Turpin, 2005, p. 340) Le R.P.F. est alors ressenti par de nombreux Français ou élites de l’Union française comme un parti conservateur, voire réactionnaire, en matière coloniale.

Après sa période républicaine où il espérait rallier les 3 Ky à sa cause mais sans y parvenir, le général Xuan (président de la République du Sud-Vietnam) part pour Hong-Kong rencontrer Bao Daï reparti volontairement en exil. Il devient alors fervent monarchiste, faisant publiquement l’éloge de l’intelligence et de la clairvoyance politique de l’ex-empereur  (Boyer de la Tour, 1962, p. 75).


20 décembre 47 : Fin de l’opération Ceinture dont le succès est à nouveau très mitigé. Les objectifs n’ont pas tous été atteints, loin s’en faut. La dispersion et l’éclatement des organismes gouvernementaux du VM a porté ses fruits. Aucun d’entre eux n’a été capturé. Et l’A.P.V. n’a pas été anéantie, opérant ses habituels et habiles décrochages pour limiter ses pertes (Gras, 1979, pp. 201-205). Selon les estimations des rapports français, Léa a occasionné 1 200 morts et 200 prisonniers, ce qui est peu rapporté aux 8 000 soldats vietnamiens présents dans le secteur attaqué par les Français. L’opération Ceinture aurait occasionné quant à elle 2 805 tués et 800 prisonniers. Un rapport français empreint d’optimisme établi au 22 décembre dénombre pour les deux opérations Léa et Ceinture 7 200 morts, 1 000 prisonniers et un nombre inconnu de blessés (Bodinier, 1989, p. 341). Certes un coup réel a été porté contre le VM. Un message de Giap intercepté affirme : « Nous avons perdu les deux tiers de nos ateliers et dépôts [voir Bodinier, 1989, p. 342], le gros de nos force est intact. » (cité in Vallette, 2010, p. 75) La question des pertes françaises paraît nettement  sous-estimée : 242 tués, 2 noyés, 41 disparus, 586 blessés selon les chiffres officiels produits par l’armée française (Bodinier, ibid.). D'après Salan, les pertes françaises seraient  presqu’insignifiantes : le bilan combiné des deux opérations comptabiliserait 40 tués, 40 disparus et 580 blessés (Salan 2, 1970, p. 113). Gras n’avance pas de chiffres précis tout en les minimisant encore : les pertes en morts et blessés ont été faibles, une cinquantaine de tués et 191 blessés. Tous ces chiffres paraissent nettement surestimés côté des pertes vietnamiennes et sous-estimés côté des pertes françaises. Ce qui donne au corps expéditionnaire un sentiment de victoire non pas totalement fictif mais trompeur. Optimiste et toujours persuadé que le militaire sert le politique, Valluy observe à l’issue des deux opérations que désormais « la politique du gouvernement français doit s’en trouver considérablement facilitée. » (Gras, 1979, pp. 206-207)

Émile Bollaert repart pour Paris pour aller rendre compte de la dernière entrevue avec Bao Daï en baie d’Along.


21 décembre 47 : Au Cambodge, des élections législatives sont organisées (voir 31 décembre). Majorité absolue au parti démocrate avec 73 % des voix, le parti des élites, au grand déplaisir de Sihanouk.


21 - 26 décembre 47 : Bao Daï, de retour à Hong-Kong voit Diem, Tran Van Ly et le général Xuan (président du gouvernement de Cochinchine depuis le 29 septembre). Il n’évoque pas explicitement le protocole secret signé avec Bollaert lors des accords de la baie d’Along. Pour Diem et Ly, seul un statut de dominion est satisfaisant. En l’état, les propositions françaises actuel sont jugées insuffisantes par tous (voir 22 mars 1948). Bao Daï s’envole pour l’Europe à bord d’un avion britannique.

Même le très profrançais général Xuan fait savoir par voie de presse dès le 21 que « si le discours d’Hadong n’est pas à retenir [voir 26 septembre], les propositions faites par le haut-commissaire Bollaert dans la baie d’Along ne le sont pas d’avantage [voir 6 - 8 septembre]. » (cité in Gras, 1979, pp. 200-201). Les Français sont à nouveau dans une impasse politique  totale.


23 décembre 47 : Bollaert arrive à Paris pour rendre compte de l’entrevue en baie d’Along avec Bao Daï (voir 6 - 8 décembre). En conseil des ministres, l’approbation gouvernementale sur son action  n’est que partielle. Devant les réticences d’Auriol face à ce qui lui est rapporté, Bollaert, pour se défendre, prétend qu’HCM a récemment adhéré à un Kominform asiatique, ce qui est faux. Le gouvernement Schuman donne cependant « plein mandat au haut-commissaire […] pour poursuivre, en dehors du Vietminh, toutes les actions et négociations nécessaires au rétablissement de la paix et la liberté dans les pays vietnamiens. » Il choisit donc la voie Bao Daï et celle de ne pas négocier avec le VM alors que ce dernier est le seul à être en position de force militaire (voir 20 décembre) (Gras, 1979, p. 201).


26 décembre 47 : Bao Daï s’est envolé pour l’Europe dans l’espoir d’obtenir en France ce qu’il n’a pas eu à Saigon. Après avoir consulté, il cherche à faire marche arrière. Sur invitation de Bidault (Affaires étrangères), il quitte Hong-Kong et se rend à Londres puis Genève. Arrivé en France, il déclare è Schuman « être venu à titre personnel pour s’informer de la position du gouvernement français dont il attend des propositions nouvelles. » (voir 7 - 13 janvier 1948)


29 décembre 47 : Lors d’une conférence de presse à Saigon, le général Xuan qui se voit toujours comme un recours, dévoile les intentions de Bao Daï qui, selon ses propos, ne veut pas traiter avec la France.


31 décembre 47 : Au Cambodge, des élections législatives ont eu lieu à partir du 21. C’est un scrutin uninominal majoritaire à un tour. Sur 782 000 électeurs inscrits, 464 000 ont voté     (59 %). Les démocrates ont obtenu 65 % des voix, les libéraux 32 %. Pour autant, la clarté de ces résultats n’assurent pas une stabilité gouvernementale. Des querelles de personnes et de clans feront qu’aucun gouvernement ne parviendra à tenir dans le temps plus de 7 mois d’affilée (Cambacérès, 2013, pp. 64-65).

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