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par Jean-François Jagielski

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Début juillet 51 : '''Nguyen Binh''' avait mené contre le général Chanson (commandant des forces terrestres au S-V) des opérations classiques qui se sont soldées par des échecs militaires au Sud (Goscha, 2002, pp. 54-57). La direction du Lao Dong le lui reproche. Il est jugé trop indépendant, peu fidèle aux directives de soumission du Lao Dong et est donc évincé puis remplacé au Sud par '''Le Duan''', un orthodoxe, qui plus est, premier secrétaire du parti. Les derniers nationalistes sont repris en main du fait de l’alignement du parti sur la ligne Moscou-Pékin. Évincé, Binh reçoit l’ordre de rejoindre le Viet Bac au Tonkin et d’étudier en chemin un axe de liaison à travers le Cambodge du Nord-Est. C’est là qu’il trouvera la mort (voir 29 septembre) (Gras, 1979, pp. 417-418).


1<sup>er</sup> juillet 51 : Naissance de l’aviation militaire vietnamienne. L’armée française cède quelques avions aux jeunes pilotes vietnamiens formés dans des écoles françaises. Ils seront par la suite formé au Centre d’instruction de Nhatrang qui ouvrira ses portes en mai 1952 (Maigre, 1994, pp. 30-31).
Au N-V, un décret est promulgué concernant les « dispositions organisant provisoirement l’impôt agricole ». Il est considéré comme un progrès par rapport à l’ancien système d’impôts proportionnels. La principale innovation consiste à diviser la totalité de la récolte par le nombre de membres d’une famille vivant sur une exploitation et à imposer chacun sur sa quote-part « quel que soit son sexe ou son âge » (article 2). Fall, par des exemples, démontre combien ce nouveau système est désavantageux aux contribuables (Fall, 1960, pp. 248-249).
6 juillet 51 : Tran Van Huu se décide à mobiliser le pays (voir 15 juillet).
10 juillet 51 : Des pourparlers s’engagent en Corée pour étudier les conditions d’un armistice. Cette éventualité inquiète. Notamment De Lattre, qui craint un retour massif des troupes chinoises à la frontière du Tonkin. Il a prévenu Vincent Auriol qu’il démissionnerait s’il recevait l’ordre d’ouvrir des pourparlers de paix avec le VM. C’est aussi ce qui le motive à aller sonder l’intention des Américains en cas de paix en Corée mais également à activer leur aide qui tarde à venir, tant pour l’armée française que vietnamienne (De Folin, 1993, p. 214 ; De Lattre, 1988, pp. 307-310, Gras, 1979, p. 413).
Démission du gouvernement Queuille. Avec cette démission, les socialistes mettent fin à l’exercice du pouvoir.
11 juillet 51 : '''Allocution de De Lattre au lycée Chasseloup-Laubat de Saigon.''' Le texte a été longuement pensé et rédigé par Jean Dannaud, directeur des services d’information civils et militaires du haut-commissaire (Pouget, 2024, p. 64). Le commandant en chef invite les communistes et les nationalistes à rejoindre leurs rangs respectifs, arguant du fait que l’avenir du Vietnam ne dépend plus de la France (Dalloz, 1987, pp. 192-193). Il engage les jeunes lycéens à prendre parti, après avoir condamné l’attentisme ambiant : « Soyez des hommes, c'est-à-dire : si vous êtes communistes, rejoignez le Vietminh ; il y a là-bas des individus qui se battent bien pour une cause mauvaise. Mais si vous êtes des patriotes, combattez pour votre patrie, car cette guerre est la vôtre. Elle ne concerne plus la France que dans la limite de ses promesses envers le Vietnam et de la part qu’elle doit prendre à la défense de l’univers libre […] L’armée nationale est l’expression même de l’indépendance du Vietnam. Or, son développement est essentiellement conditionné par la multiplication des cadres que vous seuls pouvez fournir [...] Vous êtes les privilégiés de la culture, vous devez aussi revendiquer le privilège de la première place au combat. » (cité ''in'' Gras, 1979, p. 412 et ''in'' Férier, 1993, p. 32)
14 juillet 51 : Bao Daï et Nguyen Huu Tri (gouverneur du Tonkin) acceptent l’invitation de De Lattre pour une revue des troupes du Tonkin à Hanoi parmi lesquelles se trouvent des troupes vietnamiennes. 120 000 personnes sont venues assister au défilé, tout comme cela avait été le cas à Saïgon (voir 6 juin), malgré les menaces du VM. C’est un succès psychologique qui montre un certain « réveil » de la population vietnamienne tant attendu par De Lattre (voir 6 juin) (De Folin, 1993, p. 213 ; De Lattre, 1988, pp. 292-294).
15 juillet 51 : Bao Daï décrète par ordonnance la « mobilisation générale » au Vietnam qui a pour conséquence l’appel de 60 000 recrues. De Lattre sait toutefois qu’il faut les former (De Folin, 1993, p. 213). La guerre semble devenir une affaire vietnamienne et le gouvernement semble désormais assumer un peu plus ses responsabilités : 40 % du budget de l’État vietnamien est consacré à la défense nationale (Toinet, 1998, p. 141). Toutefois, la mesure n’aura qu’une portée limitée : des milliers d’appelés ne se présenteront pas aux bureaux de recrutement et les passe-droits, dont peuvent bénéficier les fils de notables ou de fonctionnaires, sont légion (Cadeau, 2019, p. 369).
Signe d’une meilleure implication dans les affaires, Bao Daï quitte Dalat où il était installé depuis son retour au Vietnam et occupe désormais le palais Pugnier à Hanoi.
24 juillet 51 : Après avoir prononcé un discours la veille sur l’amitié franco-américaine, De Lattre rencontre l’influent gouverneur de l’État de New-York, Thomas Dewey, en visite en Indochine. L’entretien porte sur la Corée et sur les conséquences qu’auraient une invasion de l’Indochine par les troupes chinoises.
26 juillet 51 : Au Cambodge, Sihanouk attribue aux militants issarak la dénomination de         « Khmers Viet-Minh ».
28 juillet 51 : De Lattre s’envole pour Paris afin d’aller y préparer sa visite aux U.S.A. qui aura lieu du 13 au 18 septembre. Son voyage a été retardé par une énième crise gouvernementale vietnamienne. Il paraît fatigué et doit voir ses médecins qui ont diagnostiqué un cancer à la hanche. A ce moment, personne ne sait qu’il ne reviendra que pour quelques semaines au Vietnam le 20 octobre.
29 juillet 51 : Le président de la République Vincent Auriol se demande : « Nous, que faisons-nous là-bas ? Je ne vois pas de solution militaire, il n’y a qu’une solution politique. » (cité ''in'' Gras, 1979, p. 436) Elle se résume à une seule expression : négocier avec le VM… Ce que De Lattre ne veut accepter sans avoir pris militairement le dessus.
31 juillet 51 : Assassinat du gouverneur du S-V Thaï Lap Than et du général Chanson (commissaire de la République et commandant des forces terrestres au S-V), responsable et bon gestionnaire militaire de la Cochinchine, dans un attentat à la grenade qui a lieu à Sadec. Non du fait du VM mais probablement de celui d’un caodaïste dissident proche de Trinh Minh The (voir 7 juin) (Gras, 1979, p. 417). Giap l’attribue à « un détachement de commandos de la province de Sadec (Giap 2, 2004, p. 168). Le général Chanson sera remplacé par intérim par le général Bondis.

Version du 6 juin 2025 à 19:32

Début juillet 51 : Nguyen Binh avait mené contre le général Chanson (commandant des forces terrestres au S-V) des opérations classiques qui se sont soldées par des échecs militaires au Sud (Goscha, 2002, pp. 54-57). La direction du Lao Dong le lui reproche. Il est jugé trop indépendant, peu fidèle aux directives de soumission du Lao Dong et est donc évincé puis remplacé au Sud par Le Duan, un orthodoxe, qui plus est, premier secrétaire du parti. Les derniers nationalistes sont repris en main du fait de l’alignement du parti sur la ligne Moscou-Pékin. Évincé, Binh reçoit l’ordre de rejoindre le Viet Bac au Tonkin et d’étudier en chemin un axe de liaison à travers le Cambodge du Nord-Est. C’est là qu’il trouvera la mort (voir 29 septembre) (Gras, 1979, pp. 417-418).


1er juillet 51 : Naissance de l’aviation militaire vietnamienne. L’armée française cède quelques avions aux jeunes pilotes vietnamiens formés dans des écoles françaises. Ils seront par la suite formé au Centre d’instruction de Nhatrang qui ouvrira ses portes en mai 1952 (Maigre, 1994, pp. 30-31).

Au N-V, un décret est promulgué concernant les « dispositions organisant provisoirement l’impôt agricole ». Il est considéré comme un progrès par rapport à l’ancien système d’impôts proportionnels. La principale innovation consiste à diviser la totalité de la récolte par le nombre de membres d’une famille vivant sur une exploitation et à imposer chacun sur sa quote-part « quel que soit son sexe ou son âge » (article 2). Fall, par des exemples, démontre combien ce nouveau système est désavantageux aux contribuables (Fall, 1960, pp. 248-249).


6 juillet 51 : Tran Van Huu se décide à mobiliser le pays (voir 15 juillet).


10 juillet 51 : Des pourparlers s’engagent en Corée pour étudier les conditions d’un armistice. Cette éventualité inquiète. Notamment De Lattre, qui craint un retour massif des troupes chinoises à la frontière du Tonkin. Il a prévenu Vincent Auriol qu’il démissionnerait s’il recevait l’ordre d’ouvrir des pourparlers de paix avec le VM. C’est aussi ce qui le motive à aller sonder l’intention des Américains en cas de paix en Corée mais également à activer leur aide qui tarde à venir, tant pour l’armée française que vietnamienne (De Folin, 1993, p. 214 ; De Lattre, 1988, pp. 307-310, Gras, 1979, p. 413).

Démission du gouvernement Queuille. Avec cette démission, les socialistes mettent fin à l’exercice du pouvoir.


11 juillet 51 : Allocution de De Lattre au lycée Chasseloup-Laubat de Saigon. Le texte a été longuement pensé et rédigé par Jean Dannaud, directeur des services d’information civils et militaires du haut-commissaire (Pouget, 2024, p. 64). Le commandant en chef invite les communistes et les nationalistes à rejoindre leurs rangs respectifs, arguant du fait que l’avenir du Vietnam ne dépend plus de la France (Dalloz, 1987, pp. 192-193). Il engage les jeunes lycéens à prendre parti, après avoir condamné l’attentisme ambiant : « Soyez des hommes, c'est-à-dire : si vous êtes communistes, rejoignez le Vietminh ; il y a là-bas des individus qui se battent bien pour une cause mauvaise. Mais si vous êtes des patriotes, combattez pour votre patrie, car cette guerre est la vôtre. Elle ne concerne plus la France que dans la limite de ses promesses envers le Vietnam et de la part qu’elle doit prendre à la défense de l’univers libre […] L’armée nationale est l’expression même de l’indépendance du Vietnam. Or, son développement est essentiellement conditionné par la multiplication des cadres que vous seuls pouvez fournir [...] Vous êtes les privilégiés de la culture, vous devez aussi revendiquer le privilège de la première place au combat. » (cité in Gras, 1979, p. 412 et in Férier, 1993, p. 32)


14 juillet 51 : Bao Daï et Nguyen Huu Tri (gouverneur du Tonkin) acceptent l’invitation de De Lattre pour une revue des troupes du Tonkin à Hanoi parmi lesquelles se trouvent des troupes vietnamiennes. 120 000 personnes sont venues assister au défilé, tout comme cela avait été le cas à Saïgon (voir 6 juin), malgré les menaces du VM. C’est un succès psychologique qui montre un certain « réveil » de la population vietnamienne tant attendu par De Lattre (voir 6 juin) (De Folin, 1993, p. 213 ; De Lattre, 1988, pp. 292-294).


15 juillet 51 : Bao Daï décrète par ordonnance la « mobilisation générale » au Vietnam qui a pour conséquence l’appel de 60 000 recrues. De Lattre sait toutefois qu’il faut les former (De Folin, 1993, p. 213). La guerre semble devenir une affaire vietnamienne et le gouvernement semble désormais assumer un peu plus ses responsabilités : 40 % du budget de l’État vietnamien est consacré à la défense nationale (Toinet, 1998, p. 141). Toutefois, la mesure n’aura qu’une portée limitée : des milliers d’appelés ne se présenteront pas aux bureaux de recrutement et les passe-droits, dont peuvent bénéficier les fils de notables ou de fonctionnaires, sont légion (Cadeau, 2019, p. 369).

Signe d’une meilleure implication dans les affaires, Bao Daï quitte Dalat où il était installé depuis son retour au Vietnam et occupe désormais le palais Pugnier à Hanoi.


24 juillet 51 : Après avoir prononcé un discours la veille sur l’amitié franco-américaine, De Lattre rencontre l’influent gouverneur de l’État de New-York, Thomas Dewey, en visite en Indochine. L’entretien porte sur la Corée et sur les conséquences qu’auraient une invasion de l’Indochine par les troupes chinoises.


26 juillet 51 : Au Cambodge, Sihanouk attribue aux militants issarak la dénomination de         « Khmers Viet-Minh ».


28 juillet 51 : De Lattre s’envole pour Paris afin d’aller y préparer sa visite aux U.S.A. qui aura lieu du 13 au 18 septembre. Son voyage a été retardé par une énième crise gouvernementale vietnamienne. Il paraît fatigué et doit voir ses médecins qui ont diagnostiqué un cancer à la hanche. A ce moment, personne ne sait qu’il ne reviendra que pour quelques semaines au Vietnam le 20 octobre.


29 juillet 51 : Le président de la République Vincent Auriol se demande : « Nous, que faisons-nous là-bas ? Je ne vois pas de solution militaire, il n’y a qu’une solution politique. » (cité in Gras, 1979, p. 436) Elle se résume à une seule expression : négocier avec le VM… Ce que De Lattre ne veut accepter sans avoir pris militairement le dessus.


31 juillet 51 : Assassinat du gouverneur du S-V Thaï Lap Than et du général Chanson (commissaire de la République et commandant des forces terrestres au S-V), responsable et bon gestionnaire militaire de la Cochinchine, dans un attentat à la grenade qui a lieu à Sadec. Non du fait du VM mais probablement de celui d’un caodaïste dissident proche de Trinh Minh The (voir 7 juin) (Gras, 1979, p. 417). Giap l’attribue à « un détachement de commandos de la province de Sadec (Giap 2, 2004, p. 168). Le général Chanson sera remplacé par intérim par le général Bondis.

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