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Septembre 49 : Saloth Sar (le futur Pol Pot) se rend en France avec plusieurs autres boursiers cambodgiens (Deron, 2009, p. 143). | |||
''Les Cahiers du Communisme'' (« Revue théorique et politique mensuelle du Comité Central ») font paraître un article de Jean Guillon. Celui-ci déplore un manque d’engagement concret du P.C.F. dans la guerre d’Indochine : « […] Une deuxième constatation : si le mot d’ordre de paix au Vietnam est un mot d’ordre large, populaire, qui touche de plus en plus les grandes masses du peuple français, il reste trop souvent en l’air, sans se réaliser dans des actions multiples et efficaces qui seules donneront à notre lutte contre la guerre du Vietnam un contenu réel. Il ne faut pas en rester au seul stade de la propagande et de l’agitation […] L’ensemble du Parti doit se mobiliser afin de diriger et d’organiser les actions qui contribueront concrètement au rétablissement de la paix. » (cité ''in'' Ruscio, 1985, p. 244) Une réunion du Kominform qui doit avoir lieu à Matra (Hongrie) dans la deuxième quinzaine de novembre ira dans le même sens. | |||
2 septembre 49 : '''Suite aux dissensions avec le haut-commissaire Pignon, remplacement du général Blaizot par le général Carpentier au poste de commandant en chef'''. Carpentier est un « marocain » qui ne connaît rien à l’Indochine mais est un protégé du chef d’état-major de l’armée française, le général Juin. Le remplacement de Blaizot sera effectif le 10 et la prise de poste Carpentier aura lieu le 20. Blaizot était dans l’ensemble favorable au contenu du rapport Revers (voir 18 septembre) et donc au retrait de la région de Cao Bang, mais l’auteur du rapport lui a reproché de n’avoir pas « su affirmer son autorité. » De Plus, Blaizot était entré rapidement en conflit ouvert avec le haut-commissaire Pignon, son supérieur hiérarchique. En juillet, ce dernier l’a empêché de préparer un retrait au sud de la R.C. 4. Pignon entretiendra d’ailleurs à partir de ce moment des relations de plus en plus tendues avec les militaires (De Folin, 1993, p. 199). Le repli a donc été retardé au moment où il était encore presque possible de par la volonté du haut-commissaire. | |||
3 septembre 49 : Poursuite des harcèlements ponctuels sur la R.C. 4 (voir 3 mars). Un convoi français est attaqué pour la quatrième fois au col de Lung Phaï (entre That Khe et Dong Khe). La moitié de ses véhicules sont détruits et l’on déplore 23 morts, 18 disparus, 5 blessés retrouvés (Bodin, 2009, p. 140). Cadeau évoque quant à lui des chiffres plus importants : plus d’une centaine de tués, de disparus et de prisonniers et la destruction d’une cinquantaine de véhicules sur la centaine que comptait le convoi. Le colonel vietminh Dang Van Viet qui a participé à ces combats écrit : « Pour nous, ce fut une grande victoire, jamais auparavant nous n’avions détruit autant d’engins, capturant autant de prisonniers sur la route n° 4. » Un an plus tard, en octobre 1950, un membre de la colonne Le Page, le lieutenant Lepage, officier d’état-major du 1<sup>er</sup> B.E.P., décrit ces destructions sur la route montant vers le col : « Des carcasses calcinées de camions civils et militaires la bordent sur des kilomètres. » (cité ''in'' Cadeau, 2022, p. 144) A partir de cette attaque les Français abandonneront totalement le ravitaillement de Cao Bang par voie terrestre entre Na Sam et Cao Bang. Selon les mémoires du colonel Dang Van Viet, commandant le régiment 174, « après cette embuscade, l’ennemi abandonna le mode de ravitaillement par convoi. A la place, ils employèrent l’aviation pour parachuter vivres et munitions, ce moyen coûtait cher à l’ennemi [qui] ne pouvait prolonger plus longtemps ce mode de ravitaillement. Nous avions accompli la tâche que le Haut-Commandement nous avait confiée, « couper la R.C. 4 » » (Dang Van Viet, 2006, p. 118 ; carte de l’opération p. 119). | |||
12 septembre 49 : Du fait de la menace chinoise aux abords de la R.C. 4, le nouveau commandant en chef, le général Charpentier, décide de surseoir à l’évacuation de That Khe et Cao Bang, décision soutenue et approuvée par le haut-commissaire Pignon. Carpentier informe le gouvernement français de cette décision le 22 septembre. Pignon en fera autant auprès de Coste-Floret (F.O.M.) le 28 octobre (Cadeau, 2020, p. 116). | |||
18 septembre 49 : Début de ce qui va être '''l’affaire du rapport Revers''' : suite à une querelle entre un militaire rapatrié du corps expéditionnaire, le soldat Perez, en convalescence, et deux Indochinois se trouvent sur la plateforme d’un autobus parisien devant la gare de Lyon, la police procède à des interpellations et découvre dans un porte-document en cuir noir complaisamment exhibé une copie du rapport secret du général Revers et un carnet comprenant une longue liste d'adresses. | |||
Au Cambodge, Sihanouk dissout l’Assemblée Nationale et repousse ''sine die'' les élections prévues en novembre. Le pouvoir du roi devient de plus en plus autocratique. | |||
19 septembre 49 : Des perquisitions sont faites. On découvre que des dizaines d’exemplaires du rapport Revers sont entre les mains de la D.S.T. On en trouve même 38 exemplaires à la délégation vietnamienne de Paris. On découvre également un carnet de chèques appartenant à un dénommé Van Co, représentant en France du général Xuan, président du Conseil (et ennemi…) de Bao Daï. Ce carnet de chèques a servi à « arroser » des politiques, des militaires et des hommes d’affaires français. Perez (S.D.E.C.E.) lâche au cours d’un interrogatoire que « cet argent [lui] a servi à acheter les consciences ». A la question de savoir pourquoi il est en possession du rapport Revers, il répond : « C'est Roger Peyré qui me l'a remis, un ami personnel des généraux Revers et Mast. » Peyré est en fait l’agent électoral du général Mast (ancien résident général en Tunisie et directeur de l’Institut des hautes études de Défense nationale) qui aspire à devenir haut-commissaire en Indochine, en partie pour des raisons pécuniaires liées au cours de la piastre, et soutenu par Revers qui lui avait confié un exemplaire dont il n’aurait pas dû être destinataire… De ce fait, beaucoup de choses à ne pas ébruiter l’ont été… | |||
20 septembre 49 : '''Prise de poste du général Carpentier au poste de commandant en chef du C.E.F.E.O.''' (jusqu’au 15 décembre 1950). Il est le cinquième commandant en chef nommé depuis le début du conflit indochinois… Après Blaizot, c’est au tour des généraux Carpentier et Alessandri (commandant des forces du Tonkin) d’entrer rapidement en conflit avec le haut-commissaire Pignon au sujet du Tonkin. Pignon, bon fonctionnaire suivant les ordres du gouvernement, veut lâcher la zone de la R.C. 4 mais progressivement. Carpentier et Alessandri veulent s’y maintenir coûte que coûte mais avec des conceptions divergentes et des ambitions concurrentielles personnelles : Alessandri vise le poste de son supérieur (qu’il n’a pu obtenir lors de sa récente nomination). L’un comme l’autre semblent ignorer les nets progrès de l’armée vietnamienne que ce soit en tactique ou en armement du fait des potentiels futurs apports provenant de la Chine communiste. Carpentier n’a accepté ce poste qu’à contrecœur, sur les conseils de Juin. Il ne connaît rien à l’Indochine qu’il n’aime pas. Il déclarera plus tard : « Quand j’ai été nommé, mon premier soin a été d’acheter à Paris, dans une librairie, une carte de l’Indochine. » (cité ''in'' Bodard, 1997, p. 541) Il change l’organisation du haut-commandement (voir 28 novembre) et prend à lui-seul la direction des forces terrestres, ce qu’avait d’ailleurs préconisé Revers dans son rapport. | |||
Au Cambodge, mise en place d’un bref gouvernement Ieu Koeus, responsable uniquement devant le Roi (voir 18 septembre). Il demeurera en place jusqu’au 28 (Jennar, 1995, p. 144). | |||
22 septembre 49 : Dès que les résultats de l’enquête sur l’affaire Revers sont connus, Queuille (président du Conseil), Ramadier (Défense) et Moch se réunissent en conseil interministériel pour définir la conduite à tenir, sans toutefois y inviter Coste-Floret (F.O.M.) dont ils savent qu’il ne sera pas de leur avis. Ils se mettent d’accord pour ne pas accuser Revers d’avoir compromis des secrets de Défense nationale. Et ce, afin de ne pas ébranler les Américains et les Alliés de l’O.T.A.N. au moment où se déroulent à Washington des négociations militaires importantes. On cherche à étouffer l’affaire en n’ouvrant pas immédiatement d’instruction judiciaire civile (Gras, 1979, p. 278). | |||
Selon un document du Comité de Défense national allant dans le sens de Pignon, Charpentier estime « qu’à son avis, il faut rester à Cao Bang, moyennant certaines mesures qu’il a prescrites. Il n’envisage pas d’ailleurs de modifier son point de vue suivant l’évolution de la situation. » (cité ''in'' Turpin, 2000, p. 30) | |||
24 septembre 49 : Le juge militaire chargé de l’affaire Revers prononce un non-lieu. Le gouvernement pense avoir ainsi étouffé l’affaire en évinçant Coste-Floret (Gras, 1979, p. 278). C’est une erreur (voir 27 septembre). | |||
25 septembre 49 : Truman annonce que l’U.R.S.S. a effectué un premier tir d’une bombe nucléaire en Sibérie. | |||
27 septembre 49 : Dans une interview, Bao Daï affirme son anticommunisme et sa détestation du VM. | |||
Coste-Floret qui avait été volontairement évincé du conseil interministériel (voir 22 septembre) adresse un rapport à Queuille (président du Conseil) pour protester contre le non-lieu prononcé par un jugement militaire et affirme que Revers est l’auteur des fuites. Dans cette affaire, la presse française est pour l’instant muselée par une pression gouvernementale (Gras, 1979, p. 278). | |||
28 septembre 49 : Bao Daï annonce l’envoi de représentants de son gouvernement au Haut-Conseil et à l’Assemblée de l’Union française. | |||
29 septembre 49 : Au Cambodge, mise en place d’un gouvernement Yem Sambaur qui demeurera en place jusqu’au 2 mai 1950 (Jennar, 1995, p. 144). | |||
30 septembre 49 : L’Union des Femmes françaises, de mouvance communiste et opposée au conflit indochinois, demande à être reçue au ministère de la Guerre. Selon une des participantes, la délégation était uniquement composée de veuves, de mères ou de sœurs de soldats tués en Indochine. Ramadier refuse de les recevoir et la police charge le rassemblement (Ruscio, 1985, p. 240). | |||
Fin septembre 49 : Une vingtaine d’étudiants cambodgiens débarquent à Marseille à bord du ''Jamaïque''. Parmi eux un dénommé Saloth Sar, le futur '''Pol Pot'''. Ce dernier rejoint Paris pour y mener ses études de radioélectricité qu’il mènera avec une certaine désinvolture durant plus de trois ans. Faute de passer ses examens et du fait de ses fréquentions politiques d’extrême gauche, il se verra retirer sa bourse (Chandler, 1993, pp. 52-53 ; Richer, 2009, p. 19). Il adhèrera au P.C.F. probablement en 1952 (Deron, 2009, p. 262). |
Dernière version du 2 juin 2025 à 18:40
Septembre 49 : Saloth Sar (le futur Pol Pot) se rend en France avec plusieurs autres boursiers cambodgiens (Deron, 2009, p. 143).
Les Cahiers du Communisme (« Revue théorique et politique mensuelle du Comité Central ») font paraître un article de Jean Guillon. Celui-ci déplore un manque d’engagement concret du P.C.F. dans la guerre d’Indochine : « […] Une deuxième constatation : si le mot d’ordre de paix au Vietnam est un mot d’ordre large, populaire, qui touche de plus en plus les grandes masses du peuple français, il reste trop souvent en l’air, sans se réaliser dans des actions multiples et efficaces qui seules donneront à notre lutte contre la guerre du Vietnam un contenu réel. Il ne faut pas en rester au seul stade de la propagande et de l’agitation […] L’ensemble du Parti doit se mobiliser afin de diriger et d’organiser les actions qui contribueront concrètement au rétablissement de la paix. » (cité in Ruscio, 1985, p. 244) Une réunion du Kominform qui doit avoir lieu à Matra (Hongrie) dans la deuxième quinzaine de novembre ira dans le même sens.
2 septembre 49 : Suite aux dissensions avec le haut-commissaire Pignon, remplacement du général Blaizot par le général Carpentier au poste de commandant en chef. Carpentier est un « marocain » qui ne connaît rien à l’Indochine mais est un protégé du chef d’état-major de l’armée française, le général Juin. Le remplacement de Blaizot sera effectif le 10 et la prise de poste Carpentier aura lieu le 20. Blaizot était dans l’ensemble favorable au contenu du rapport Revers (voir 18 septembre) et donc au retrait de la région de Cao Bang, mais l’auteur du rapport lui a reproché de n’avoir pas « su affirmer son autorité. » De Plus, Blaizot était entré rapidement en conflit ouvert avec le haut-commissaire Pignon, son supérieur hiérarchique. En juillet, ce dernier l’a empêché de préparer un retrait au sud de la R.C. 4. Pignon entretiendra d’ailleurs à partir de ce moment des relations de plus en plus tendues avec les militaires (De Folin, 1993, p. 199). Le repli a donc été retardé au moment où il était encore presque possible de par la volonté du haut-commissaire.
3 septembre 49 : Poursuite des harcèlements ponctuels sur la R.C. 4 (voir 3 mars). Un convoi français est attaqué pour la quatrième fois au col de Lung Phaï (entre That Khe et Dong Khe). La moitié de ses véhicules sont détruits et l’on déplore 23 morts, 18 disparus, 5 blessés retrouvés (Bodin, 2009, p. 140). Cadeau évoque quant à lui des chiffres plus importants : plus d’une centaine de tués, de disparus et de prisonniers et la destruction d’une cinquantaine de véhicules sur la centaine que comptait le convoi. Le colonel vietminh Dang Van Viet qui a participé à ces combats écrit : « Pour nous, ce fut une grande victoire, jamais auparavant nous n’avions détruit autant d’engins, capturant autant de prisonniers sur la route n° 4. » Un an plus tard, en octobre 1950, un membre de la colonne Le Page, le lieutenant Lepage, officier d’état-major du 1er B.E.P., décrit ces destructions sur la route montant vers le col : « Des carcasses calcinées de camions civils et militaires la bordent sur des kilomètres. » (cité in Cadeau, 2022, p. 144) A partir de cette attaque les Français abandonneront totalement le ravitaillement de Cao Bang par voie terrestre entre Na Sam et Cao Bang. Selon les mémoires du colonel Dang Van Viet, commandant le régiment 174, « après cette embuscade, l’ennemi abandonna le mode de ravitaillement par convoi. A la place, ils employèrent l’aviation pour parachuter vivres et munitions, ce moyen coûtait cher à l’ennemi [qui] ne pouvait prolonger plus longtemps ce mode de ravitaillement. Nous avions accompli la tâche que le Haut-Commandement nous avait confiée, « couper la R.C. 4 » » (Dang Van Viet, 2006, p. 118 ; carte de l’opération p. 119).
12 septembre 49 : Du fait de la menace chinoise aux abords de la R.C. 4, le nouveau commandant en chef, le général Charpentier, décide de surseoir à l’évacuation de That Khe et Cao Bang, décision soutenue et approuvée par le haut-commissaire Pignon. Carpentier informe le gouvernement français de cette décision le 22 septembre. Pignon en fera autant auprès de Coste-Floret (F.O.M.) le 28 octobre (Cadeau, 2020, p. 116).
18 septembre 49 : Début de ce qui va être l’affaire du rapport Revers : suite à une querelle entre un militaire rapatrié du corps expéditionnaire, le soldat Perez, en convalescence, et deux Indochinois se trouvent sur la plateforme d’un autobus parisien devant la gare de Lyon, la police procède à des interpellations et découvre dans un porte-document en cuir noir complaisamment exhibé une copie du rapport secret du général Revers et un carnet comprenant une longue liste d'adresses.
Au Cambodge, Sihanouk dissout l’Assemblée Nationale et repousse sine die les élections prévues en novembre. Le pouvoir du roi devient de plus en plus autocratique.
19 septembre 49 : Des perquisitions sont faites. On découvre que des dizaines d’exemplaires du rapport Revers sont entre les mains de la D.S.T. On en trouve même 38 exemplaires à la délégation vietnamienne de Paris. On découvre également un carnet de chèques appartenant à un dénommé Van Co, représentant en France du général Xuan, président du Conseil (et ennemi…) de Bao Daï. Ce carnet de chèques a servi à « arroser » des politiques, des militaires et des hommes d’affaires français. Perez (S.D.E.C.E.) lâche au cours d’un interrogatoire que « cet argent [lui] a servi à acheter les consciences ». A la question de savoir pourquoi il est en possession du rapport Revers, il répond : « C'est Roger Peyré qui me l'a remis, un ami personnel des généraux Revers et Mast. » Peyré est en fait l’agent électoral du général Mast (ancien résident général en Tunisie et directeur de l’Institut des hautes études de Défense nationale) qui aspire à devenir haut-commissaire en Indochine, en partie pour des raisons pécuniaires liées au cours de la piastre, et soutenu par Revers qui lui avait confié un exemplaire dont il n’aurait pas dû être destinataire… De ce fait, beaucoup de choses à ne pas ébruiter l’ont été…
20 septembre 49 : Prise de poste du général Carpentier au poste de commandant en chef du C.E.F.E.O. (jusqu’au 15 décembre 1950). Il est le cinquième commandant en chef nommé depuis le début du conflit indochinois… Après Blaizot, c’est au tour des généraux Carpentier et Alessandri (commandant des forces du Tonkin) d’entrer rapidement en conflit avec le haut-commissaire Pignon au sujet du Tonkin. Pignon, bon fonctionnaire suivant les ordres du gouvernement, veut lâcher la zone de la R.C. 4 mais progressivement. Carpentier et Alessandri veulent s’y maintenir coûte que coûte mais avec des conceptions divergentes et des ambitions concurrentielles personnelles : Alessandri vise le poste de son supérieur (qu’il n’a pu obtenir lors de sa récente nomination). L’un comme l’autre semblent ignorer les nets progrès de l’armée vietnamienne que ce soit en tactique ou en armement du fait des potentiels futurs apports provenant de la Chine communiste. Carpentier n’a accepté ce poste qu’à contrecœur, sur les conseils de Juin. Il ne connaît rien à l’Indochine qu’il n’aime pas. Il déclarera plus tard : « Quand j’ai été nommé, mon premier soin a été d’acheter à Paris, dans une librairie, une carte de l’Indochine. » (cité in Bodard, 1997, p. 541) Il change l’organisation du haut-commandement (voir 28 novembre) et prend à lui-seul la direction des forces terrestres, ce qu’avait d’ailleurs préconisé Revers dans son rapport.
Au Cambodge, mise en place d’un bref gouvernement Ieu Koeus, responsable uniquement devant le Roi (voir 18 septembre). Il demeurera en place jusqu’au 28 (Jennar, 1995, p. 144).
22 septembre 49 : Dès que les résultats de l’enquête sur l’affaire Revers sont connus, Queuille (président du Conseil), Ramadier (Défense) et Moch se réunissent en conseil interministériel pour définir la conduite à tenir, sans toutefois y inviter Coste-Floret (F.O.M.) dont ils savent qu’il ne sera pas de leur avis. Ils se mettent d’accord pour ne pas accuser Revers d’avoir compromis des secrets de Défense nationale. Et ce, afin de ne pas ébranler les Américains et les Alliés de l’O.T.A.N. au moment où se déroulent à Washington des négociations militaires importantes. On cherche à étouffer l’affaire en n’ouvrant pas immédiatement d’instruction judiciaire civile (Gras, 1979, p. 278).
Selon un document du Comité de Défense national allant dans le sens de Pignon, Charpentier estime « qu’à son avis, il faut rester à Cao Bang, moyennant certaines mesures qu’il a prescrites. Il n’envisage pas d’ailleurs de modifier son point de vue suivant l’évolution de la situation. » (cité in Turpin, 2000, p. 30)
24 septembre 49 : Le juge militaire chargé de l’affaire Revers prononce un non-lieu. Le gouvernement pense avoir ainsi étouffé l’affaire en évinçant Coste-Floret (Gras, 1979, p. 278). C’est une erreur (voir 27 septembre).
25 septembre 49 : Truman annonce que l’U.R.S.S. a effectué un premier tir d’une bombe nucléaire en Sibérie.
27 septembre 49 : Dans une interview, Bao Daï affirme son anticommunisme et sa détestation du VM.
Coste-Floret qui avait été volontairement évincé du conseil interministériel (voir 22 septembre) adresse un rapport à Queuille (président du Conseil) pour protester contre le non-lieu prononcé par un jugement militaire et affirme que Revers est l’auteur des fuites. Dans cette affaire, la presse française est pour l’instant muselée par une pression gouvernementale (Gras, 1979, p. 278).
28 septembre 49 : Bao Daï annonce l’envoi de représentants de son gouvernement au Haut-Conseil et à l’Assemblée de l’Union française.
29 septembre 49 : Au Cambodge, mise en place d’un gouvernement Yem Sambaur qui demeurera en place jusqu’au 2 mai 1950 (Jennar, 1995, p. 144).
30 septembre 49 : L’Union des Femmes françaises, de mouvance communiste et opposée au conflit indochinois, demande à être reçue au ministère de la Guerre. Selon une des participantes, la délégation était uniquement composée de veuves, de mères ou de sœurs de soldats tués en Indochine. Ramadier refuse de les recevoir et la police charge le rassemblement (Ruscio, 1985, p. 240).
Fin septembre 49 : Une vingtaine d’étudiants cambodgiens débarquent à Marseille à bord du Jamaïque. Parmi eux un dénommé Saloth Sar, le futur Pol Pot. Ce dernier rejoint Paris pour y mener ses études de radioélectricité qu’il mènera avec une certaine désinvolture durant plus de trois ans. Faute de passer ses examens et du fait de ses fréquentions politiques d’extrême gauche, il se verra retirer sa bourse (Chandler, 1993, pp. 52-53 ; Richer, 2009, p. 19). Il adhèrera au P.C.F. probablement en 1952 (Deron, 2009, p. 262).