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1<sup>er</sup> janvier 79 : L’artillerie vietnamienne est audible aux abords de Phnom Penh. Évacuation du Cambodge d’une partie des conseillers chinois par voie de mer (Richer, 2009, p. 67). | |||
Du fait de la perte de Kompong Cham (nord-est de Phnom Penh), Pol Pot donne l’ordre d’évacuer Sihanouk, Penn Nouth et leurs familles vers Sisophon (nord-ouest du Cambodge, proche de la frontière thaïlandaise). Ils y arrivent le 2 au matin (Cambacérès, 2013, p. 259). | |||
Prise de Kratié par les troupes provietnamiennes du F.U.N.S.K. (Deron, 2009, p. 20). | |||
Congrès du F.U.N.S.K. | |||
2 janvier 79 : Khieu Samphan et Ieng Sary lancent un appel aux Nations unies pour obtenir une aide à repousser une « agression vietnamienne et soviétique » qu’ils n’obtiendront pas (Deron, 2009, p. 208). | |||
Un coup de main de commandos vietnamiens franchit sur des canots pneumatiques le Mékong pour tenter d’enlever Sihanouk dans sa résidence. Interceptés par les forces kr, la tentative échoue. Sihanouk a été évacué la veille (Richer, 2009, p. 67 ; Chandler, 1993, p. 253). | |||
3 janvier 79 : Khieu Samphan rejoint Sihanouk et Penn Nouth à Sisophon. Il les informe que l’offensive vietnamienne marque une pause et qu’ils devront retourner à Phnom Penh le lendemain. Sihanouk se verrait alors confier une mission à l’O.N.U. avec le titre de « haut représentant du Kampuchéa démocratique », à charge pour lui de défendre la cause du pays contre l’agression vietnamienne. Quant à Penn Nouth, il serait envoyé dans certains pays « amis » avec la même mission. Sihanouk est partagé. D’une part, il craint pour sa vie mais voit là une occasion de recouvrer sa liberté et celle du peuple cambodgien. De l’autre, il craint une occupation vietnamienne prolongée (Cambacérès, 2013, p. 259 ; Sihanouk, 1986, pp. 313-314). | |||
Prise par les Vietnamiens de la ville de Stung Treng (nord-est de Phnom Penh, sur le Mékong). | |||
Ieng Sary demande une réunion du Conseil de Sécurité de l’O.N.U. pour évoquer la situation au Cambodge. | |||
4 janvier 79 : Sihanouk repart pour Phnom Penh via Battambang (Sihanouk, 1986, p. 315). Penn Nouth l’accompagne. | |||
Heng Sarim, président du Front uni national pour le salut du Kampuchéa (F.U.N.S.K.), prend la présidence d’un Comité révolutionnaire populaire (provietnamien) qui va proclamer la République populaire du Kampuchéa le 12 (Richer, 2009, p. 73). | |||
Les Vietnamiens contrôlent toute la rive est du Mékong. | |||
5 janvier 79 : Arrivée de Sihanouk à Phnom Penh en fin d’après-midi. Khieu Samphan vient lui annoncer que Pol Pot désire le rencontrer en compagnie de Penn Nouth au palais du gouvernement pour prendre le thé. Sihanouk et Pol Pot ne se sont pas vus depuis le 23 mars 1973. | |||
L’attitude de Pol Pot à l’égard de son invité est inhabituelle : il vient l’accueillir sur le perron et lui fait un ''sâmpeah'' traditionnel avec les mains jointes accompagné d’ « une petite génuflexion ». C’est au cours de cette rencontre que « frère n° 1 » charge Sihanouk de représenter et défendre le KD à l’O.N.U. Puis il fait un point sur la situation militaire qui lui paraît excellente alors que la capitale cambodgienne est en train de tomber... Selon Pol Pot, les succès militaires alliés aux actions diplomatiques de Sihanouk et Penn Nouth assureront une victoire complète contre l’ennemi. Sihanouk n’en croit pas un mot mais joue le jeu (Cambacérès, 2013, p. 261 ; Sihanouk, 1986, pp. 316-321). | |||
Pol Pot fait un discours appelant « le peuple à une longue guerre [contre] l’expansionnisme soviétique international et le pacte de Varsovie » (Chandler, 1993, p. 253). | |||
Ayant fait retirer ce jour ses conseillers, Deng Xiaoping déclare que la Chine n’a pas l’intention d’envoyer des troupes ou de nouveaux conseillers militaires au Cambodge (Deron, 2009, p. 208). L’ambassadeur chinois et 27 de ses collaborateurs quittent Phnom Penh pour la Thaïlande (Biernan, 1998, p. 529). | |||
Prise par les Vietnamiens de Takeo. | |||
Les Vietnamiens sont à Neak Luong. | |||
A Mémot, les membres du F.U.N.S.K. tiennent un congrès qu’ils désignent comme le troisième congrès du mouvement communiste cambodgien. '''Ce congrès donne naissance au Parti révolutionnaire du peuple khmer (P.R.P.K., provietnamien). Pen Sovan en est le premier secrétaire.''' | |||
6 janvier 79 : Suite à la récente tentative d’enlèvement, Sihanouk, qui se trouvait en résidence surveillée depuis sa démission du poste de chef de l’État, est évacué de Phnom Penh in extremis au moyen d’un avion chinois. La piste n’a pas encore été bombardée par les Vietnamiens mais ce vol sera le tout dernier à partir. Pékin comprend alors que ses mises en garde face aux dérives du régime des KR sont restées lettres-mortes et ne pourra, au final, empêcher l’installation d’un gouvernement provietnamien à Phnom Penh. Ce gouvernement sera dirigé par Pen Sovan, Chea Sim et Heng Sarim. Il prendra provisoirement le nom de Conseil révolutionnaire du peuple du Kampuchéa (voir 10 janvier) (Richer, 2009, p. 67). | |||
Sihanouk arrive de nuit à Pékin avec son épouse, ses deux fils, ainsi que son ami Penn Nouth et sa femme. On apprendra alors que pendant la période khmère rouge la vie du prince et de sa famille la plus proche n’ont été épargnée que grâce à la pression de la Chine. Cependant, cinq de ses enfants, quatorze de ses petits-enfants, ainsi que d’autres de ses proches ont tous trouvé la mort entre 1975 et 1978. Sihanouk part mais, sous surveillance, accompagné d’une garde rapprochée kr. | |||
Il sera accueilli le jour même à Pékin par Deng Xiaoping et la presse internationale. Ce dernier lui assure intervenir auprès des KR pour libérer Sihanouk de sa protection rapprochée et lui faire recouvrir une pleine liberté de mouvement. Il est hébergé provisoirement à Dia Yu Dai, la cité des hôtes (Cambacérès, 2013, p. 261 ; Sihanouk, 1986, pp. 325-327). | |||
Pol Pot est évacué de toute urgence de la capitale par le biais d’un hélicoptère chinois vers la Thaïlande (Richer, 2009, p. 49). Il s’installera entre Trat (Thaïlande) puis à Pursat (Cambodge) (Deron, 2009, p. 263). | |||
Prise par les Vietnamiens de Kompong Chan (ex-Sihanoukville). | |||
7 janvier 79 : '''L’armée vietnamienne entre dans Phnom Penh qui n’est pas véritablement défendue'''. L’aéroport de Pochetong est atteint à l’aube, le Palais royal est pris à midi. La plupart des dirigeants kr ont quitté la capitale dans le plus grand secret (Férier, 1993, p. 145). Le régime des Khmers rouges aura duré 3 ans, 8 mois et 20 jours. 1 375 journées pendant lesquelles, chaque jour, en moyenne, 1 150 personnes sont décédées. Il faut souligner que près de 70 % du pays étaient sous le contrôle des Khmers rouges dès 1970, ce qui signifie, pour les habitants de ces régions, d’avoir dû supporter 9 ans de dictature. | |||
Non prévenu par Nuon Chea (n° 2 du régime kr) de l’arrivée imminente des Vietnamiens, Duch, toujours à la tête de S 21, fait exécuter en toute hâte les derniers prisonniers. Mais il est contraint d’abandonner les archives du centre de détention, environ 100 000 pages qui vont servir à instruire les procès contre les dirigeants du régime. Il parviendra à s’échapper de la capitale quelques jours après. | |||
L’ensemble des dirigeants kr se réfugient alors ou vers la frontière thaïlandaise ou se retranchent dans la montagne des Cardamones au sud-ouest du pays (Richer, 2009, p. 67). C’est Khieu Samphan qui est présenté comme le détenteur légitime de l’autorité de l’État cambodgien mais il ne dispose d’aucune marge de manœuvre dans les choix politiques ou tactiques pour mener la guérilla. Tout demeure en réalité dans les mains de Pol Pot. | |||
Sihanouk reçoit le matin à Pékin l’ambassadeur du KD. Le soir est organisé un banquet au palais du Peuple restreint aux seuls responsables chinois des affaires d’Indochine. La nouvelle de la chute de Phnom Penh tombe. Sihanouk en est informé (Cambacérès, 2013, p. 264 ; Sihanouk, 1986, pp. 327-328). | |||
Découverte à S 21 de quatre cadavres de prisonniers en putréfaction enchaînés à leur lit de torture et exécutés dans la précipitation avant l’arrivée des Vietnamiens. Les photographes de l’armée vietnamienne s’emparent de la scène macabre qui va servir leur propagande pour discréditer le régime de Pol Pot (Deron, 2009, p. 64). | |||
Bombardement par les Vietnamiens de Kompong Speu (sud-ouest de Phnom Penh). La ville est rasée par l’explosion d’un vaste dépôt de munitions (Biernan, 1998, p. 529). | |||
8 janvier 79 : '''Formation à Phnom Penh du gouvernement provietnamien de Heng Sarim qui devient chef de l’État.''' Ce gouvernement demeurera en place jusqu’au 2 juillet 1981 (Jennar, 1995, p. 170-171). | |||
Selon Bui Tin, « le principal responsable de notre politique au Cambodge était Le Duc Tho. Il avait été chargé par le Bureau politique de superviser la libération du pays et la mise en place de son nouveau Parti et de son appareil d’État. Avant même que nos forces aient atteint Phnom Penh, il présida dans la région frontalière du Bec de Canard, près de Snoul, une réunion destinée à nommer le Gouvernement cambodgien pour remplacer celui de Pol Pot. » Pen Sovan devient ministre de la Défense (il dirigeait depuis plusieurs années les émissions en langue khmère de ''La Voix du Vietnam'') (Bui Tin, 1999, pp. 203-204). | |||
Les Chinois ont organisé une importante conférence au palais du Peuple de Pékin en présence de Sihanouk. Il devait être question de condamner l’invasion vietnamienne. Mais la présence de 200 journalistes étrangers fait que les questions vont se concentrer sur une condamnation du régime kr. La conférence qui devait durer deux heures s’éternise pour dépasser finalement les six heures. Sihanouk doit s’expliquer sur les atrocités du régime qui commencent à être connues à travers les récits des réfugiés, sur sa vie en détention, sur sa démission en avril 1976, sur la disparition de ses enfants et petits-enfants. Parfois mis en cause pour avoir « défendu l’indéfendable », il se justifie tant bien que mal en condamnant l’invasion de son pays (Cambacérès, 2013, pp. 265-266 ; Sihanouk, 1986, pp. 328-331). | |||
Formation du Conseil Populaire révolutionnaire du Kampuchéa (C.R.P.K.) qui gouverne le pays sous la tutelle des Vietnamiens. Le président est Heng Samrin, le vice-président Pen Sovan. | |||
Poursuite du départ de 600 conseillers et techniciens chinois par la Thaïlande (Biernan, 1998, p. 529). | |||
Départ de Ieng Sary (Affaires étrangères) dans un convoi routier en direction des Cardamomes. L’avancée des Vietnamiens étant trop rapide, il sera obligé de revenir sur Phnom Penh pour finalement repartir en train vers le nord-ouest (Biernan, 1998, p. 529). | |||
9 janvier 79 : Sihanouk, en escale au Japon et à son arrivée à New-York, est très sollicité en réunions, conférences de presse, interviews et discours divers. Les médias internationaux en manque d’informations directes sur la situation intérieure au Cambodge l’assaillent de questions (Sihanouk, 1986, p. 337-338). On lui reproche à nouveau d’avoir couvert les exactions des KR. Excédé, Sihanouk se lâche et répond : « Pol Pot est peut-être un patriote, mais c’est aussi un boucher. Il traite le peuple cambodgien comme du bétail tout juste bon pour les travaux forcés, comme des porcs à l’abattoir. » (cité ''in'' Chanda, 1987, p. 299) | |||
11 janvier 79 : Sihanouk devient porte-parole du KD à l’O.N.U. et condamne aux côtés des KR l’invasion de son pays. Il demande le retrait des troupes vietnamiennes. Ce discours lui vaut la sympathie et un soutien général. Mais, au cours d’une séance, la condamnation du Vietnam se heurtera à un véto soviétique (Cambacérès, 2013, p. 266 ; Sihanouk, 1986, pp. 351-358). | |||
Ieng Sary (Affaires étrangères), Yun Yat (Information) et In Sopheap (cadre appartenant aux Affaires étrangères) se rendent en Chine (Sikoeun, 2013, p. 317). | |||
12 janvier 79 : Proclamation de la République populaire du Kampuchéa (R.P.K.) sous tutelle vietnamienne (Férier, 1993, p. 164). Heng Sarim est nommé chef d’État. Hun Sen (ancien KR qui a rejoint le Vietnam en avril 1977) devient ministre des Affaires étrangères et Pen Sovan prend le portefeuille de la Défense. La création de cet État fantoche est un moyen qui permet aux Vietnamiens de ne pas passer pour un occupant du Cambodge. | |||
Reste à faire accepter ce régime à des Cambodgiens divisés et à la communauté internationale. 10 années passeront sans pouvoir atteindre ces objectifs. Seuls l’U.R.S.S., le Vietnam et leurs alliés prosoviétiques reconnaissent immédiatement le nouveau gouvernement provietnamien (Richer, 2009, p. 73). | |||
13 janvier 79 : Le conseil de sécurité de l’O.N.U. condamne l’invasion vietnamienne au Cambodge et en appelle au « retrait des troupes étrangères » du pays. Il considère que l’actuel gouvernement est le seul représentant du KD, ce qui revient à légitimer le régime des KR (Cambacérès, 2013, p. 266). La France s’abstient de voter cette résolution, arguant du fait qu’elle ne peut se solidariser avec le régime déchu de Pol Pot. En même temps, elle se refuse à s’associer à un vote qui aboutirait à remplacer dans le siège du Cambodge à l’O.N.U. par un représentant du gouvernement provietnamien. | |||
Chinois, Américains, Japonais et les membres de l’Association des nations du Sud-Est asiatique (A.S.E.A.N.) lancent alors un embargo économique et un arrêt de l’aide internationale à un Vietnam économiquement assez exsangue qui sort, de plus, de quarante ans de guerre. Le pays est désormais diplomatiquement isolé. | |||
Nuit du 13 au 14 janvier 79 : Sihanouk est à New York, logé par les Chinois dans un grand hôtel. Il est atterré lorsqu’il apprend qu’il est chargé « par intérim » de mener la délégation du KD à la session de l’Assemblée générale en attendant l’arrivée de Ieng Sary qui sera « chef titulaire » de cette délégation. | |||
Il fait passer par le biais d’un policier américain chargé de sa protection un billet aux services secrets américains et à Andrew Young, ambassadeur américain à l’O.N.U. Il demande l’asile politique aux U.S.A. pour échapper aux KR. Il indique qu’il sortira de sa chambre d’hôtel à 2 heures du matin en faussant compagnie à sa garde rapprochée. Young prévient Cyrus Vance (secrétaire d’État) et Richard Holbrooke (assistant du secrétaire d'État pour l'Asie de l'Est et le Pacifique) qui montent une opération d’extraction bien embarrassante pour les États-Unis (Chanda, 1987, pp. 300-301 ; Sihanouk, 1986, pp. 340-344). | |||
14 janvier 79 : Andrew Young, ambassadeur américain à l’O.N.U., passe la matinée avec Sihanouk. Il reçoit son homologue chinois. Sihanouk lui explique qu’il entend provisoirement demander l’asile politique aux U.S.A. et déclare alors : « Je retournerai un jour vivre en Chine mais je suis sous le choc, à bout de force. Il faut que je rentre de toute urgence dans un hôpital de New-York pour récupérer. » | |||
Situation bien embarrassante pour l’administration américaine : la défection du prince prive le Cambodge d’un leader compétent sur la scène internationale, qui plus est, symbole d’unité ; les nouvelles relations américano-chinoises risquent d’être ternies car le voyage de Sihanouk avait été initié, autorisé et payé par la Chine ; de plus, une visite officielle de Deng Xiaoping aux U.S.A. est prévue dans les 15 jours à venir. Finalement Sihanouk est hospitalisé mais également étroitement surveillé, le temps que les Américains puissent trouver une parade diplomatique. On publie un communiqué (Chanda, 1987, pp. 301-302 ; Sihanouk, 1986, pp. 344-345). | |||
À Utapao, en Thaïlande, début de l’entente sino-thaï : '''accord secret entre Bangkok et Pékin en vue de soutenir les Khmers rouges.''' La Thaïlande autorise l’utilisation de son sol pour héberger les bases KD. Elle accorde toutes les facilités pour l’équipement et l’entraînement des forces kr. Elle fournit les moyens de transit, d’hébergement et de transport aux dirigeants du KD. L’ancienne base américaine de Takhli devient le centre opérationnel de la plus importante coopération stratégique de la Chine avec un pays d’Asie du Sud-Est (Deron, 2009, p. 211). | |||
Les Vietnamiens continuent d’explorer S 21 et y découvrent 11 corps torturés et exécutés par les KR. | |||
15 janvier 79 : Vote d’une résolution du Conseil de sécurité de l’O.N.U. réclamant le retrait de « toutes les forces étrangères du Kampuchéa démocratique » (13 pour et 2 contre, l’U.R.S.S. et la Tchécoslovaquie). L’U.R.S.S. la bloque en usant de son droit de véto (Deron, 2009, p. 211). | |||
16 janvier 79 : Les émissions radio de ''La Voix du Kampuchéa démocratique'', interrompues depuis le 7 janvier, reprennent à partir de la Chine. | |||
17 janvier 79 : L’armée vietnamienne atteint la frontière thaïlandaise. L’armée kr a alors perdu plus de 40 000 hommes. Elle se disperse dans les chaînes montagneuses des Dangrek et des Cardamomes. Elle a entraîné de force plus de 100 000 civils dans sa retraite. | |||
21 janvier 79 : la Thaïlande annonce qu’elle continue de reconnaître le seul KD. | |||
25 janvier 79 : Le nouveau gouvernement provietnamien accuse celui du KD de « génocide ». Il s’agit là de la deuxième évocation de ce terme (voir 21 juin 1978) (Deron, 2009, p. 211). | |||
De son côté, Sihanouk annonce officiellement qu’il a rompu avec les Khmers rouges. | |||
30 janvier 79 : Face à la demande de Sihanouk pour devenir réfugié politique en France, le président de la République, Valery Giscard d’Estaing, impose des conditions très restrictives à un éventuel asile politique. La France ne le lui refuse pas mais n’accordera un passeport qu’à son épouse (de père français) et exigera qu’il n’exerce en France aucune fonction politique et n’accorde aucune interview. | |||
31 janvier 79 : Deng Xiaoping (vice-premier ministre) est en visite officielle aux U.S.A. Sihanouk et son épouse se rendent dans la capitale des États-Unis, à Blair House, résidence des hôtes du gouvernement américain, pour un dîner privé. | |||
Deng conseille à Sihanouk de ne pas abandonner sa patrie. Ce dernier lui répond que sa patrie est le Cambodge et non le Kampuchéa démocratique où il n’est considéré que comme « un féodal » par les KR. Deng convient de la dureté du régime et tente d’expliquer que la Chine a tenté d’adoucir à maintes reprises le régime. Sans succès. Il demande à Sihanouk de revenir en Chine, l’assurant (faussement…) qu’il n’aura pas à collaborer avec les KR. | |||
Sihanouk, qui vient d’essuyer un demi-refus des Français concernant sa demande d’asile (voir 30 janvier), accepte. Il semble alors ignorer que des pressions et cajoleries vont être exercées sur lui pour que son personnage plein d’aura entre en lutte contre l’occupation vietnamienne (Chanda, 1987, pp. 301-302 ; Sihanouk, 1986, pp. 367-371). |
Dernière version du 8 août 2025 à 09:30
1er janvier 79 : L’artillerie vietnamienne est audible aux abords de Phnom Penh. Évacuation du Cambodge d’une partie des conseillers chinois par voie de mer (Richer, 2009, p. 67).
Du fait de la perte de Kompong Cham (nord-est de Phnom Penh), Pol Pot donne l’ordre d’évacuer Sihanouk, Penn Nouth et leurs familles vers Sisophon (nord-ouest du Cambodge, proche de la frontière thaïlandaise). Ils y arrivent le 2 au matin (Cambacérès, 2013, p. 259).
Prise de Kratié par les troupes provietnamiennes du F.U.N.S.K. (Deron, 2009, p. 20).
Congrès du F.U.N.S.K.
2 janvier 79 : Khieu Samphan et Ieng Sary lancent un appel aux Nations unies pour obtenir une aide à repousser une « agression vietnamienne et soviétique » qu’ils n’obtiendront pas (Deron, 2009, p. 208).
Un coup de main de commandos vietnamiens franchit sur des canots pneumatiques le Mékong pour tenter d’enlever Sihanouk dans sa résidence. Interceptés par les forces kr, la tentative échoue. Sihanouk a été évacué la veille (Richer, 2009, p. 67 ; Chandler, 1993, p. 253).
3 janvier 79 : Khieu Samphan rejoint Sihanouk et Penn Nouth à Sisophon. Il les informe que l’offensive vietnamienne marque une pause et qu’ils devront retourner à Phnom Penh le lendemain. Sihanouk se verrait alors confier une mission à l’O.N.U. avec le titre de « haut représentant du Kampuchéa démocratique », à charge pour lui de défendre la cause du pays contre l’agression vietnamienne. Quant à Penn Nouth, il serait envoyé dans certains pays « amis » avec la même mission. Sihanouk est partagé. D’une part, il craint pour sa vie mais voit là une occasion de recouvrer sa liberté et celle du peuple cambodgien. De l’autre, il craint une occupation vietnamienne prolongée (Cambacérès, 2013, p. 259 ; Sihanouk, 1986, pp. 313-314).
Prise par les Vietnamiens de la ville de Stung Treng (nord-est de Phnom Penh, sur le Mékong).
Ieng Sary demande une réunion du Conseil de Sécurité de l’O.N.U. pour évoquer la situation au Cambodge.
4 janvier 79 : Sihanouk repart pour Phnom Penh via Battambang (Sihanouk, 1986, p. 315). Penn Nouth l’accompagne.
Heng Sarim, président du Front uni national pour le salut du Kampuchéa (F.U.N.S.K.), prend la présidence d’un Comité révolutionnaire populaire (provietnamien) qui va proclamer la République populaire du Kampuchéa le 12 (Richer, 2009, p. 73).
Les Vietnamiens contrôlent toute la rive est du Mékong.
5 janvier 79 : Arrivée de Sihanouk à Phnom Penh en fin d’après-midi. Khieu Samphan vient lui annoncer que Pol Pot désire le rencontrer en compagnie de Penn Nouth au palais du gouvernement pour prendre le thé. Sihanouk et Pol Pot ne se sont pas vus depuis le 23 mars 1973.
L’attitude de Pol Pot à l’égard de son invité est inhabituelle : il vient l’accueillir sur le perron et lui fait un sâmpeah traditionnel avec les mains jointes accompagné d’ « une petite génuflexion ». C’est au cours de cette rencontre que « frère n° 1 » charge Sihanouk de représenter et défendre le KD à l’O.N.U. Puis il fait un point sur la situation militaire qui lui paraît excellente alors que la capitale cambodgienne est en train de tomber... Selon Pol Pot, les succès militaires alliés aux actions diplomatiques de Sihanouk et Penn Nouth assureront une victoire complète contre l’ennemi. Sihanouk n’en croit pas un mot mais joue le jeu (Cambacérès, 2013, p. 261 ; Sihanouk, 1986, pp. 316-321).
Pol Pot fait un discours appelant « le peuple à une longue guerre [contre] l’expansionnisme soviétique international et le pacte de Varsovie » (Chandler, 1993, p. 253).
Ayant fait retirer ce jour ses conseillers, Deng Xiaoping déclare que la Chine n’a pas l’intention d’envoyer des troupes ou de nouveaux conseillers militaires au Cambodge (Deron, 2009, p. 208). L’ambassadeur chinois et 27 de ses collaborateurs quittent Phnom Penh pour la Thaïlande (Biernan, 1998, p. 529).
Prise par les Vietnamiens de Takeo.
Les Vietnamiens sont à Neak Luong.
A Mémot, les membres du F.U.N.S.K. tiennent un congrès qu’ils désignent comme le troisième congrès du mouvement communiste cambodgien. Ce congrès donne naissance au Parti révolutionnaire du peuple khmer (P.R.P.K., provietnamien). Pen Sovan en est le premier secrétaire.
6 janvier 79 : Suite à la récente tentative d’enlèvement, Sihanouk, qui se trouvait en résidence surveillée depuis sa démission du poste de chef de l’État, est évacué de Phnom Penh in extremis au moyen d’un avion chinois. La piste n’a pas encore été bombardée par les Vietnamiens mais ce vol sera le tout dernier à partir. Pékin comprend alors que ses mises en garde face aux dérives du régime des KR sont restées lettres-mortes et ne pourra, au final, empêcher l’installation d’un gouvernement provietnamien à Phnom Penh. Ce gouvernement sera dirigé par Pen Sovan, Chea Sim et Heng Sarim. Il prendra provisoirement le nom de Conseil révolutionnaire du peuple du Kampuchéa (voir 10 janvier) (Richer, 2009, p. 67).
Sihanouk arrive de nuit à Pékin avec son épouse, ses deux fils, ainsi que son ami Penn Nouth et sa femme. On apprendra alors que pendant la période khmère rouge la vie du prince et de sa famille la plus proche n’ont été épargnée que grâce à la pression de la Chine. Cependant, cinq de ses enfants, quatorze de ses petits-enfants, ainsi que d’autres de ses proches ont tous trouvé la mort entre 1975 et 1978. Sihanouk part mais, sous surveillance, accompagné d’une garde rapprochée kr.
Il sera accueilli le jour même à Pékin par Deng Xiaoping et la presse internationale. Ce dernier lui assure intervenir auprès des KR pour libérer Sihanouk de sa protection rapprochée et lui faire recouvrir une pleine liberté de mouvement. Il est hébergé provisoirement à Dia Yu Dai, la cité des hôtes (Cambacérès, 2013, p. 261 ; Sihanouk, 1986, pp. 325-327).
Pol Pot est évacué de toute urgence de la capitale par le biais d’un hélicoptère chinois vers la Thaïlande (Richer, 2009, p. 49). Il s’installera entre Trat (Thaïlande) puis à Pursat (Cambodge) (Deron, 2009, p. 263).
Prise par les Vietnamiens de Kompong Chan (ex-Sihanoukville).
7 janvier 79 : L’armée vietnamienne entre dans Phnom Penh qui n’est pas véritablement défendue. L’aéroport de Pochetong est atteint à l’aube, le Palais royal est pris à midi. La plupart des dirigeants kr ont quitté la capitale dans le plus grand secret (Férier, 1993, p. 145). Le régime des Khmers rouges aura duré 3 ans, 8 mois et 20 jours. 1 375 journées pendant lesquelles, chaque jour, en moyenne, 1 150 personnes sont décédées. Il faut souligner que près de 70 % du pays étaient sous le contrôle des Khmers rouges dès 1970, ce qui signifie, pour les habitants de ces régions, d’avoir dû supporter 9 ans de dictature.
Non prévenu par Nuon Chea (n° 2 du régime kr) de l’arrivée imminente des Vietnamiens, Duch, toujours à la tête de S 21, fait exécuter en toute hâte les derniers prisonniers. Mais il est contraint d’abandonner les archives du centre de détention, environ 100 000 pages qui vont servir à instruire les procès contre les dirigeants du régime. Il parviendra à s’échapper de la capitale quelques jours après.
L’ensemble des dirigeants kr se réfugient alors ou vers la frontière thaïlandaise ou se retranchent dans la montagne des Cardamones au sud-ouest du pays (Richer, 2009, p. 67). C’est Khieu Samphan qui est présenté comme le détenteur légitime de l’autorité de l’État cambodgien mais il ne dispose d’aucune marge de manœuvre dans les choix politiques ou tactiques pour mener la guérilla. Tout demeure en réalité dans les mains de Pol Pot.
Sihanouk reçoit le matin à Pékin l’ambassadeur du KD. Le soir est organisé un banquet au palais du Peuple restreint aux seuls responsables chinois des affaires d’Indochine. La nouvelle de la chute de Phnom Penh tombe. Sihanouk en est informé (Cambacérès, 2013, p. 264 ; Sihanouk, 1986, pp. 327-328).
Découverte à S 21 de quatre cadavres de prisonniers en putréfaction enchaînés à leur lit de torture et exécutés dans la précipitation avant l’arrivée des Vietnamiens. Les photographes de l’armée vietnamienne s’emparent de la scène macabre qui va servir leur propagande pour discréditer le régime de Pol Pot (Deron, 2009, p. 64).
Bombardement par les Vietnamiens de Kompong Speu (sud-ouest de Phnom Penh). La ville est rasée par l’explosion d’un vaste dépôt de munitions (Biernan, 1998, p. 529).
8 janvier 79 : Formation à Phnom Penh du gouvernement provietnamien de Heng Sarim qui devient chef de l’État. Ce gouvernement demeurera en place jusqu’au 2 juillet 1981 (Jennar, 1995, p. 170-171).
Selon Bui Tin, « le principal responsable de notre politique au Cambodge était Le Duc Tho. Il avait été chargé par le Bureau politique de superviser la libération du pays et la mise en place de son nouveau Parti et de son appareil d’État. Avant même que nos forces aient atteint Phnom Penh, il présida dans la région frontalière du Bec de Canard, près de Snoul, une réunion destinée à nommer le Gouvernement cambodgien pour remplacer celui de Pol Pot. » Pen Sovan devient ministre de la Défense (il dirigeait depuis plusieurs années les émissions en langue khmère de La Voix du Vietnam) (Bui Tin, 1999, pp. 203-204).
Les Chinois ont organisé une importante conférence au palais du Peuple de Pékin en présence de Sihanouk. Il devait être question de condamner l’invasion vietnamienne. Mais la présence de 200 journalistes étrangers fait que les questions vont se concentrer sur une condamnation du régime kr. La conférence qui devait durer deux heures s’éternise pour dépasser finalement les six heures. Sihanouk doit s’expliquer sur les atrocités du régime qui commencent à être connues à travers les récits des réfugiés, sur sa vie en détention, sur sa démission en avril 1976, sur la disparition de ses enfants et petits-enfants. Parfois mis en cause pour avoir « défendu l’indéfendable », il se justifie tant bien que mal en condamnant l’invasion de son pays (Cambacérès, 2013, pp. 265-266 ; Sihanouk, 1986, pp. 328-331).
Formation du Conseil Populaire révolutionnaire du Kampuchéa (C.R.P.K.) qui gouverne le pays sous la tutelle des Vietnamiens. Le président est Heng Samrin, le vice-président Pen Sovan.
Poursuite du départ de 600 conseillers et techniciens chinois par la Thaïlande (Biernan, 1998, p. 529).
Départ de Ieng Sary (Affaires étrangères) dans un convoi routier en direction des Cardamomes. L’avancée des Vietnamiens étant trop rapide, il sera obligé de revenir sur Phnom Penh pour finalement repartir en train vers le nord-ouest (Biernan, 1998, p. 529).
9 janvier 79 : Sihanouk, en escale au Japon et à son arrivée à New-York, est très sollicité en réunions, conférences de presse, interviews et discours divers. Les médias internationaux en manque d’informations directes sur la situation intérieure au Cambodge l’assaillent de questions (Sihanouk, 1986, p. 337-338). On lui reproche à nouveau d’avoir couvert les exactions des KR. Excédé, Sihanouk se lâche et répond : « Pol Pot est peut-être un patriote, mais c’est aussi un boucher. Il traite le peuple cambodgien comme du bétail tout juste bon pour les travaux forcés, comme des porcs à l’abattoir. » (cité in Chanda, 1987, p. 299)
11 janvier 79 : Sihanouk devient porte-parole du KD à l’O.N.U. et condamne aux côtés des KR l’invasion de son pays. Il demande le retrait des troupes vietnamiennes. Ce discours lui vaut la sympathie et un soutien général. Mais, au cours d’une séance, la condamnation du Vietnam se heurtera à un véto soviétique (Cambacérès, 2013, p. 266 ; Sihanouk, 1986, pp. 351-358).
Ieng Sary (Affaires étrangères), Yun Yat (Information) et In Sopheap (cadre appartenant aux Affaires étrangères) se rendent en Chine (Sikoeun, 2013, p. 317).
12 janvier 79 : Proclamation de la République populaire du Kampuchéa (R.P.K.) sous tutelle vietnamienne (Férier, 1993, p. 164). Heng Sarim est nommé chef d’État. Hun Sen (ancien KR qui a rejoint le Vietnam en avril 1977) devient ministre des Affaires étrangères et Pen Sovan prend le portefeuille de la Défense. La création de cet État fantoche est un moyen qui permet aux Vietnamiens de ne pas passer pour un occupant du Cambodge.
Reste à faire accepter ce régime à des Cambodgiens divisés et à la communauté internationale. 10 années passeront sans pouvoir atteindre ces objectifs. Seuls l’U.R.S.S., le Vietnam et leurs alliés prosoviétiques reconnaissent immédiatement le nouveau gouvernement provietnamien (Richer, 2009, p. 73).
13 janvier 79 : Le conseil de sécurité de l’O.N.U. condamne l’invasion vietnamienne au Cambodge et en appelle au « retrait des troupes étrangères » du pays. Il considère que l’actuel gouvernement est le seul représentant du KD, ce qui revient à légitimer le régime des KR (Cambacérès, 2013, p. 266). La France s’abstient de voter cette résolution, arguant du fait qu’elle ne peut se solidariser avec le régime déchu de Pol Pot. En même temps, elle se refuse à s’associer à un vote qui aboutirait à remplacer dans le siège du Cambodge à l’O.N.U. par un représentant du gouvernement provietnamien.
Chinois, Américains, Japonais et les membres de l’Association des nations du Sud-Est asiatique (A.S.E.A.N.) lancent alors un embargo économique et un arrêt de l’aide internationale à un Vietnam économiquement assez exsangue qui sort, de plus, de quarante ans de guerre. Le pays est désormais diplomatiquement isolé.
Nuit du 13 au 14 janvier 79 : Sihanouk est à New York, logé par les Chinois dans un grand hôtel. Il est atterré lorsqu’il apprend qu’il est chargé « par intérim » de mener la délégation du KD à la session de l’Assemblée générale en attendant l’arrivée de Ieng Sary qui sera « chef titulaire » de cette délégation.
Il fait passer par le biais d’un policier américain chargé de sa protection un billet aux services secrets américains et à Andrew Young, ambassadeur américain à l’O.N.U. Il demande l’asile politique aux U.S.A. pour échapper aux KR. Il indique qu’il sortira de sa chambre d’hôtel à 2 heures du matin en faussant compagnie à sa garde rapprochée. Young prévient Cyrus Vance (secrétaire d’État) et Richard Holbrooke (assistant du secrétaire d'État pour l'Asie de l'Est et le Pacifique) qui montent une opération d’extraction bien embarrassante pour les États-Unis (Chanda, 1987, pp. 300-301 ; Sihanouk, 1986, pp. 340-344).
14 janvier 79 : Andrew Young, ambassadeur américain à l’O.N.U., passe la matinée avec Sihanouk. Il reçoit son homologue chinois. Sihanouk lui explique qu’il entend provisoirement demander l’asile politique aux U.S.A. et déclare alors : « Je retournerai un jour vivre en Chine mais je suis sous le choc, à bout de force. Il faut que je rentre de toute urgence dans un hôpital de New-York pour récupérer. »
Situation bien embarrassante pour l’administration américaine : la défection du prince prive le Cambodge d’un leader compétent sur la scène internationale, qui plus est, symbole d’unité ; les nouvelles relations américano-chinoises risquent d’être ternies car le voyage de Sihanouk avait été initié, autorisé et payé par la Chine ; de plus, une visite officielle de Deng Xiaoping aux U.S.A. est prévue dans les 15 jours à venir. Finalement Sihanouk est hospitalisé mais également étroitement surveillé, le temps que les Américains puissent trouver une parade diplomatique. On publie un communiqué (Chanda, 1987, pp. 301-302 ; Sihanouk, 1986, pp. 344-345).
À Utapao, en Thaïlande, début de l’entente sino-thaï : accord secret entre Bangkok et Pékin en vue de soutenir les Khmers rouges. La Thaïlande autorise l’utilisation de son sol pour héberger les bases KD. Elle accorde toutes les facilités pour l’équipement et l’entraînement des forces kr. Elle fournit les moyens de transit, d’hébergement et de transport aux dirigeants du KD. L’ancienne base américaine de Takhli devient le centre opérationnel de la plus importante coopération stratégique de la Chine avec un pays d’Asie du Sud-Est (Deron, 2009, p. 211).
Les Vietnamiens continuent d’explorer S 21 et y découvrent 11 corps torturés et exécutés par les KR.
15 janvier 79 : Vote d’une résolution du Conseil de sécurité de l’O.N.U. réclamant le retrait de « toutes les forces étrangères du Kampuchéa démocratique » (13 pour et 2 contre, l’U.R.S.S. et la Tchécoslovaquie). L’U.R.S.S. la bloque en usant de son droit de véto (Deron, 2009, p. 211).
16 janvier 79 : Les émissions radio de La Voix du Kampuchéa démocratique, interrompues depuis le 7 janvier, reprennent à partir de la Chine.
17 janvier 79 : L’armée vietnamienne atteint la frontière thaïlandaise. L’armée kr a alors perdu plus de 40 000 hommes. Elle se disperse dans les chaînes montagneuses des Dangrek et des Cardamomes. Elle a entraîné de force plus de 100 000 civils dans sa retraite.
21 janvier 79 : la Thaïlande annonce qu’elle continue de reconnaître le seul KD.
25 janvier 79 : Le nouveau gouvernement provietnamien accuse celui du KD de « génocide ». Il s’agit là de la deuxième évocation de ce terme (voir 21 juin 1978) (Deron, 2009, p. 211).
De son côté, Sihanouk annonce officiellement qu’il a rompu avec les Khmers rouges.
30 janvier 79 : Face à la demande de Sihanouk pour devenir réfugié politique en France, le président de la République, Valery Giscard d’Estaing, impose des conditions très restrictives à un éventuel asile politique. La France ne le lui refuse pas mais n’accordera un passeport qu’à son épouse (de père français) et exigera qu’il n’exerce en France aucune fonction politique et n’accorde aucune interview.
31 janvier 79 : Deng Xiaoping (vice-premier ministre) est en visite officielle aux U.S.A. Sihanouk et son épouse se rendent dans la capitale des États-Unis, à Blair House, résidence des hôtes du gouvernement américain, pour un dîner privé.
Deng conseille à Sihanouk de ne pas abandonner sa patrie. Ce dernier lui répond que sa patrie est le Cambodge et non le Kampuchéa démocratique où il n’est considéré que comme « un féodal » par les KR. Deng convient de la dureté du régime et tente d’expliquer que la Chine a tenté d’adoucir à maintes reprises le régime. Sans succès. Il demande à Sihanouk de revenir en Chine, l’assurant (faussement…) qu’il n’aura pas à collaborer avec les KR.
Sihanouk, qui vient d’essuyer un demi-refus des Français concernant sa demande d’asile (voir 30 janvier), accepte. Il semble alors ignorer que des pressions et cajoleries vont être exercées sur lui pour que son personnage plein d’aura entre en lutte contre l’occupation vietnamienne (Chanda, 1987, pp. 301-302 ; Sihanouk, 1986, pp. 367-371).