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par Jean-François Jagielski

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Mai 48 : En Cochinchine, le général Boyer De Latour (commandant les T.F.I.S.) a remplacé le général Nyo, qui a quitté, selon Salan, ses fonctions « assez écœuré ». Il y généralise le système des tours de surveillance pour contrôler les axes principaux (Salan 2, 1971, p. 130). Elles ont été inaugurées en 1947 dans le secteur de Vinh Long au sud-ouest de Saigon. Distantes d’environ un kilomètre les unes des autres, elles sont censées s’appuyer, donner l’alerte en cas d’embuscade ou de sabotage, protéger les ponts, les routes, les canaux. Dans un premier temps, aidées par des patrouilles de blindés, elles seront relativement efficaces pour sécuriser les axes de communication (Gras, 1979, pp. 227-228). Bodin en dénombre 450 au Sud (Bodin, 2009, p. 151). Giap voit leur nombre augmenter de 500 à 2 000 (Giap 1, 2003, pp. 199-200). Statiques, tout comme les plus gros postes dotés d’artillerie, elles permettent de s’adapter tant bien que mal à cette guerre sans front où les nuits appartiennent cependant à un VM hyper mobile qui trouvera rapidement la parade à ce dispositif statique.


Le VM déclenche une campagne baptisée « Première attaque générale sur la R.C. 5 » (axe Hanoi-Haïphong). Menée uniquement par des troupes régulières sans coordination locale, Giap reconnaît dans ses mémoires que « […] cette campagne ne remporta pas le succès escompté. »  (Giap 1, 2003, p. 183)
'''3 mai''' 48 : Bollaert accepte l’idée d’un gouvernement provisoire (voir 26 mars), à condition qu’il soit reconnu par Bao Daï et que la déclaration signée par ce gouvernement soit contresignée par lui-même.
5 mai 48 : Un télégramme de Coste-Floret (F.O.M.) adressé à Bollaert l’informe de la nomination de Blaizot au poste de commandant en chef. Le faux prétexte du non-maintien de Salan à ce poste est dû à « sa trop faible ancienneté et en dépit de ses grands mérites »… On lui propose le commandement des Troupes françaises en Indochine du Nord (T.F.I.N.) qu’il refuse. Il n’est pas dupe et écrit dans ses mémoires : « Je sais bien que le gouvernement a peu apprécié ma liberté d’esprit, et que ma dépêche et mes notes mettant le point sur les insuffisances de la métropole dans ce qu’elle doit à l’Indochine ont été jugées excessives et même déplacées. » (Salan 2, 1971, p. 149)
15 mai 48 : '''Arrivée et prise de fonction du général Blaizot à Saigon au poste de commandant en chef.''' La passation de pouvoir avec Salan aura lieu le 10 juin. Alessandri le rejoint au poste d’adjoint. Il entrera en fonction  le 12 juin
Dans une lettre, Bao Daï donne son accord à la formation d’un gouvernement central dans lequel les Français devront faire confiance au général Xuan pour transférer l’administration. Les partis nationalistes s’inclinent, bon an mal an (Devillers, 2010, p. 228).
18 mai 48 : Sur demande de Blaizot en conseil de Défense, on axe la stratégie à venir pour la campagne d’automne sur le Tonkin (Viet Bac) plutôt que sur la Cochinchine (contre l’avis de Boyer De Latour, commandant des T.F.I.S.). Les objectifs ne pourront être que limités vu les carences en effectifs et les turbulences politiques en métropole. Les choix à accomplir, organisés en 4 phases, dépendront des moyens (Gras, 1979, pp. 244-245). Dans les faits, seules des opérations limitées seront engagées et ces plans seront ultérieurement complètement contrecarrés par l’arrivée de Pignon au poste de haut-commissaire (voir 19 février 1949).
19 mai 48 : Nguyen Binh (VM) invite le chef des Binh Xuyen, Bay Vien, dans la Plaine des Joncs « pour une conversation franche et amicale ». Les deux hommes se détestent, Il s’agit donc d’un guet-apens. Méfiant, Bay Vien est venu avec une forte escorte armée et parvient à s’échapper à l’embuscade. Ce dernier n’a donc plus pour unique ressource que de se tourner vers les Français (Gras, 1979, p. 227).
20 mai 48 : Les représentants nationalistes des 3 ''Ky'' se réunissent à Saigon et, Ngo Dinh Diem s’étant désisté, confient au général Nguyen Van Xuan (ancien premier ministre du gouvernement autonome de la Cochinchine et ancien général de brigade de l’armée française) le soin de '''former un « Gouvernement central provisoire du Vietnam »'''. Sa mission est de liquider le séparatisme cochinchinois et d’obtenir le transfert des services (finances, police, justice, etc…) concrétisant ainsi l’autonomie interne du Vietnam.
A Saïgon, '''Tran Van Huu succède au général Xuan comme chef du gouvernement du Sud-Vietnam.'''
24 mai - 31 mai 48 : Nguyen Binh attaque dans le Sud les principales unités Binh Xuyen, faisant arrêter les « réactionnaires » et ceux qui travaillent comme « agents » pour le 2<sup>e</sup> Bureau français. Le Van Vien, chef des Binh Xuyen, rejoint le camp français et décide de se rallier à Bao Daï avec 500 de ses hommes. Toutefois, le reste de ses troupes passent au VM (Goscha, 2002, p. 53).
26 mai 48 : Xuan présente à Hong-Kong son cabinet à Bao Daï de retour d’Europe (Genève). Ce dernier n’est décidé à négocier avec les Français que s’il était certain qu’ils accordent au Vietnam une totale indépendance. Bao Daï se refuse de rejoindre son pays tant que les Français n’actent pas par écrit cette promesse.
27 mai 48 : Xuan prononce à Hong Kong un serment d’allégeance à Bao Daï et prend le rôle de premier ministre d’un futur gouvernement. Il quitte donc la direction du « gouvernement provisoire de la République du Sud-Vietnam » (voir 1<sup>er</sup> octobre 1947) et prend celle du '''« Gouvernement central provisoire du Vietnam »''' qui réunit quant à lui les anciens protectorats de l'Annam et du Tonkin. '''Cet acte correspond à la création d’un second État vietnamien, créé de toute pièce par les Français…''' Il n’a ni soutien populaire (voir 5 juin), ni constitution, ni assemblée (même consultative), ni armée, ni budget. Le protocole secret du 7 décembre 1947, bien que signé par Xuan, le demeure.
A Paris, le gouvernement Schuman est agacé par les multiples atermoiements de Bao Daï. Faute de mieux, on prend simplement acte de cette situation.
27 – 28 mai 48 : A l’occasion de la cérémonie marquant l’accession de Giap au grade de général d’armée (voir 21 janvier), HCM, le gouvernement du VM et le président de l’assemblée nationale trouvent là l’une des rares occasions  de se réunir. Selon les mémoires de Giap, « il fallait le point sur la physionomie générale de la guerre, évaluer le danger des entreprises de l’ennemi, surtout celles qui visaient à semer la dissension parmi nos rangs, et trouver les moyens d’y faire face. » Ils nomment également des fonctionnaires d’État appelé à remplacer ceux qui ont été mis en place par les Français. La séance ayant duré une partie de la nuit, la cérémonie en l’honneur de Giap doit être reportée au 28 (Giap 1, 2003, pp. 169-170).

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Mai 48 : En Cochinchine, le général Boyer De Latour (commandant les T.F.I.S.) a remplacé le général Nyo, qui a quitté, selon Salan, ses fonctions « assez écœuré ». Il y généralise le système des tours de surveillance pour contrôler les axes principaux (Salan 2, 1971, p. 130). Elles ont été inaugurées en 1947 dans le secteur de Vinh Long au sud-ouest de Saigon. Distantes d’environ un kilomètre les unes des autres, elles sont censées s’appuyer, donner l’alerte en cas d’embuscade ou de sabotage, protéger les ponts, les routes, les canaux. Dans un premier temps, aidées par des patrouilles de blindés, elles seront relativement efficaces pour sécuriser les axes de communication (Gras, 1979, pp. 227-228). Bodin en dénombre 450 au Sud (Bodin, 2009, p. 151). Giap voit leur nombre augmenter de 500 à 2 000 (Giap 1, 2003, pp. 199-200). Statiques, tout comme les plus gros postes dotés d’artillerie, elles permettent de s’adapter tant bien que mal à cette guerre sans front où les nuits appartiennent cependant à un VM hyper mobile qui trouvera rapidement la parade à ce dispositif statique.

Le VM déclenche une campagne baptisée « Première attaque générale sur la R.C. 5 » (axe Hanoi-Haïphong). Menée uniquement par des troupes régulières sans coordination locale, Giap reconnaît dans ses mémoires que « […] cette campagne ne remporta pas le succès escompté. »  (Giap 1, 2003, p. 183)


3 mai 48 : Bollaert accepte l’idée d’un gouvernement provisoire (voir 26 mars), à condition qu’il soit reconnu par Bao Daï et que la déclaration signée par ce gouvernement soit contresignée par lui-même.


5 mai 48 : Un télégramme de Coste-Floret (F.O.M.) adressé à Bollaert l’informe de la nomination de Blaizot au poste de commandant en chef. Le faux prétexte du non-maintien de Salan à ce poste est dû à « sa trop faible ancienneté et en dépit de ses grands mérites »… On lui propose le commandement des Troupes françaises en Indochine du Nord (T.F.I.N.) qu’il refuse. Il n’est pas dupe et écrit dans ses mémoires : « Je sais bien que le gouvernement a peu apprécié ma liberté d’esprit, et que ma dépêche et mes notes mettant le point sur les insuffisances de la métropole dans ce qu’elle doit à l’Indochine ont été jugées excessives et même déplacées. » (Salan 2, 1971, p. 149)


15 mai 48 : Arrivée et prise de fonction du général Blaizot à Saigon au poste de commandant en chef. La passation de pouvoir avec Salan aura lieu le 10 juin. Alessandri le rejoint au poste d’adjoint. Il entrera en fonction  le 12 juin

Dans une lettre, Bao Daï donne son accord à la formation d’un gouvernement central dans lequel les Français devront faire confiance au général Xuan pour transférer l’administration. Les partis nationalistes s’inclinent, bon an mal an (Devillers, 2010, p. 228).


18 mai 48 : Sur demande de Blaizot en conseil de Défense, on axe la stratégie à venir pour la campagne d’automne sur le Tonkin (Viet Bac) plutôt que sur la Cochinchine (contre l’avis de Boyer De Latour, commandant des T.F.I.S.). Les objectifs ne pourront être que limités vu les carences en effectifs et les turbulences politiques en métropole. Les choix à accomplir, organisés en 4 phases, dépendront des moyens (Gras, 1979, pp. 244-245). Dans les faits, seules des opérations limitées seront engagées et ces plans seront ultérieurement complètement contrecarrés par l’arrivée de Pignon au poste de haut-commissaire (voir 19 février 1949).


19 mai 48 : Nguyen Binh (VM) invite le chef des Binh Xuyen, Bay Vien, dans la Plaine des Joncs « pour une conversation franche et amicale ». Les deux hommes se détestent, Il s’agit donc d’un guet-apens. Méfiant, Bay Vien est venu avec une forte escorte armée et parvient à s’échapper à l’embuscade. Ce dernier n’a donc plus pour unique ressource que de se tourner vers les Français (Gras, 1979, p. 227).


20 mai 48 : Les représentants nationalistes des 3 Ky se réunissent à Saigon et, Ngo Dinh Diem s’étant désisté, confient au général Nguyen Van Xuan (ancien premier ministre du gouvernement autonome de la Cochinchine et ancien général de brigade de l’armée française) le soin de former un « Gouvernement central provisoire du Vietnam ». Sa mission est de liquider le séparatisme cochinchinois et d’obtenir le transfert des services (finances, police, justice, etc…) concrétisant ainsi l’autonomie interne du Vietnam.

A Saïgon, Tran Van Huu succède au général Xuan comme chef du gouvernement du Sud-Vietnam.


24 mai - 31 mai 48 : Nguyen Binh attaque dans le Sud les principales unités Binh Xuyen, faisant arrêter les « réactionnaires » et ceux qui travaillent comme « agents » pour le 2e Bureau français. Le Van Vien, chef des Binh Xuyen, rejoint le camp français et décide de se rallier à Bao Daï avec 500 de ses hommes. Toutefois, le reste de ses troupes passent au VM (Goscha, 2002, p. 53).


26 mai 48 : Xuan présente à Hong-Kong son cabinet à Bao Daï de retour d’Europe (Genève). Ce dernier n’est décidé à négocier avec les Français que s’il était certain qu’ils accordent au Vietnam une totale indépendance. Bao Daï se refuse de rejoindre son pays tant que les Français n’actent pas par écrit cette promesse.


27 mai 48 : Xuan prononce à Hong Kong un serment d’allégeance à Bao Daï et prend le rôle de premier ministre d’un futur gouvernement. Il quitte donc la direction du « gouvernement provisoire de la République du Sud-Vietnam » (voir 1er octobre 1947) et prend celle du « Gouvernement central provisoire du Vietnam » qui réunit quant à lui les anciens protectorats de l'Annam et du Tonkin. Cet acte correspond à la création d’un second État vietnamien, créé de toute pièce par les Français… Il n’a ni soutien populaire (voir 5 juin), ni constitution, ni assemblée (même consultative), ni armée, ni budget. Le protocole secret du 7 décembre 1947, bien que signé par Xuan, le demeure.

A Paris, le gouvernement Schuman est agacé par les multiples atermoiements de Bao Daï. Faute de mieux, on prend simplement acte de cette situation.


27 – 28 mai 48 : A l’occasion de la cérémonie marquant l’accession de Giap au grade de général d’armée (voir 21 janvier), HCM, le gouvernement du VM et le président de l’assemblée nationale trouvent là l’une des rares occasions  de se réunir. Selon les mémoires de Giap, « il fallait le point sur la physionomie générale de la guerre, évaluer le danger des entreprises de l’ennemi, surtout celles qui visaient à semer la dissension parmi nos rangs, et trouver les moyens d’y faire face. » Ils nomment également des fonctionnaires d’État appelé à remplacer ceux qui ont été mis en place par les Français. La séance ayant duré une partie de la nuit, la cérémonie en l’honneur de Giap doit être reportée au 28 (Giap 1, 2003, pp. 169-170).

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