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par Jean-François Jagielski

Mars 1950

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Mars 50 : Truman approuve le mémorandum 64 du C.N.S. américain qui proclame que les zones de l’Indochine française et le Sud-Est asiatique risquent de tomber dans le giron communiste. Les États-Unis estiment devoir réagir contre cette menace par une aide en faveur du gouvernement de Bao Daï, notamment en créant le M.A.A.G. à partir de septembre. Les Français voient cependant d’un assez mauvais œil cette immixtion américaine dans leurs affaires. L’Indochine demeure plus que jamais une chasse gardée française  (Spencer, Tucker, 2000, p. 267).

Opération Danaë. Elle chasse le régiment 42 de la région de Phu Ly entre le Fleuve Rouge et la rivière Day (Cadeau, 2019, p. 292).


3 mars 50 : Un convoi de 84 chevaux et 31 coolies part pour Nghia Do récupérer les parachutes des troupes aéroportées venues secourir le poste, servitude des parachutistes qui ne disparaitra qu’en juillet 1953 (Cadeau, 2019, p. 281).


8 mars 50 : Après les échauffourées du 3 à l’Assemblée nationale française (expulsion manu militari de deux députés communistes), les débats se terminent en un pugilat général particulièrement violent (Gras, 1979, p. 289 ; Le Monde du 9 mars 1950).


10 mars 50 : Abandon par les Français de la vallée du fait de la perte des 2 postes de Phu Lu et Nghia Do (Cadeau, 2019, pp. 281-282).

Remaniement de la 304e division vietminh constituée du 66e régiment régulier (issu de la IIIe interzone) et des 57e et 9e régiments (issus de la IVe interzone) (Giap 1, 2003, p. 282).

Au Cambodge, grandes grèves dans les plantations de Chup.


12 - 22 mars 50 : Séminaire réunissant à Ha Tien (Sud-Vietnam) une délégation de communistes cambodgiens conduite par Son Ngoc Minh et une délégation de communistes vietnamiens conduite par Le Duc Tho. C’est à cette occasion que s’ébauche l’existence d’un parti communiste au Cambodge.


14 mars 50 : En France, début de l’affaire Henri Martin, second-maître communiste dans la marine nationale. Il est arrêté par la police militaire. C’est le début de l’une des plus grande affaires de la guerre d’Indochine où le P.C.F. s’investit dans la défense de l’un de ses proches. Condamné par un tribunal militaire, il ne sera libéré par grâce présidentielle que le 2 août 1953 (Ruscio, 1985, pp. 266-287).


15 mars 50 : Le commandement du VM produit les instructions 62HI/A3 concernant les tâches militaires dans la 3e interzone pour l’année en cours. Le delta du Fleuve Rouge est défini comme devant constituer une source principale d’approvisionnement de la résistance en forces humaines et en matériel. On prévoit des combats rudes et des difficultés pour les troupes comme pour les habitants. 3 régiments de cette interzone doivent fusionner dans la nouvelle 320e division à l’aide d’un autre régiment venu de la 4e interzone (Giap 2, 2004, pp. 141-142).


16 mars 50 : L’aide américaine commence à se manifester concrètement. Une escadre de la Marine américaine composée de trois navires de la 7e flotte fait escale dans le port de Saigon pour apporter son soutien au régime de Bao Daï et témoigner du soutien matériel que les États-Unis entendent apporter à la France (Chaffard, 1969, p. 244).


17 - 19 avril 50 : A Kompong Som Loeu (Cambodge), premier congrès de la résistance khmère. 200 militants dont 105 moines bouddhistes décident la création d'un Front Uni Issarak (F.U.I.), présidé par Son Ngoc Minh. Une structure à vocation gouvernementale, le Comité Central provisoire de Libération du Peuple (C.C.L.P.), est également créée. Elle est présidée par Son Ngoc Minh avec Chan Samay (vice-président), Sieu Heng (vice-président et ministre de la Défense), Tou Samouth (vice-président), Son Phuoc Rattana et Non Suon. Un drapeau rouge frappé en son centre, en jaune, du temple d'Angkor Vat avec 5 tours est adopté comme symbole du F.U.I. Un symbole qui sera partiellement repris par les futurs KR.


18 mars 50 : Suite à la visite de l’ambassadeur américain Greffins, le comité vietminh de Saigon-Cholon lance des grenades sur la façade de l’hôtel Continental où réside le représentant américain. Les volontaires de la mort de Nguyen Binh  effectuent quant à eux des tirs de mortier dans la zone portuaire où sont ancrés les navires américains (Giap 1, 2003, p. 294).

En France est votée par tous les groupes, à l’exception des communistes, une « loi de répression du sabotage » (texte in L’année politique 1950, p. 281).


19 mars 50 : Une manifestation pro-vietminh est organisée pour protester contre la présence américaine à Saigon depuis le 16. Le futur dirigeant du F.L.N., Nguyen Huu Tho, y participe et sera arrêté le lendemain. Du fait de sa notoriété dans l’intelligentsia saïgonnaise, il est envoyé en résidence surveillée dans la région de Lai Chau en Haute-Région où il demeurera 2 ans. Giap qualifie dans ses mémoires ce rassemblement de « première confrontation du peuple vietnamien avec l’impérialisme américain. » Le 19 mars deviendra par la suite la « journée nationale anti-américaine » (Chaffard, 1969, pp. 244-245 ; Giap 1, 2003, p. 294).


20 mars 50 : Lors d’un Conseil de défense d’Indochine, ses membres réfléchissent à la vietnamisation du conflit en équipant dès que possible 8 bataillons, même si on est conscient que cette solution mettra du temps à se réaliser (formation des cadres, arrivée des équipements américains). Le général Carpentier, commandant en chef du corps expéditionnaire français, préconise une simple pacification des territoires contrôlés jusqu’à un éventuel règlement politique vietnamien qui manquera toujours cruellement aux Français. Le commandant en chef est pessimiste, contrairement à son adjoint, le général Alessandri. Pour autant, Carpentier le laisse faire et ne fait pas part de son inquiétude au gouvernement (voir 14 novembre 1949).

Proclamation de la loi martiale à Saigon : répression dans les milieux étudiants et lycéens dont les établissements sont fermés. Des journaux sont suspendus. Depuis janvier règne dans la capitale une fermentation révolutionnaire estudiantine (Devillers, 2010, pp. 287-288).


21 mars 50 : Le général Carpentier, commandant en chef du corps expéditionnaire français, écrit dans une instruction secrète : « La situation au Tonkin s’est nettement éclaircie depuis plusieurs mois. » (citée in Bodard, 1997, p. 524) On retrouve dans ses propos une forme caractérisée de faux optimisme qu’il transmet docilement à Paris.


22 mars 50 : Dans une lettre au ministre de la Défense, le général Léchères, chef d’état-major des Forces aériennes et président du Comité des chefs d’état-major, souligne le poids exorbitant du conflit indochinois : « […] le Comité des Chefs d’état-major généraux  appelle instamment votre attention sur la gravité du problème indochinois qui, en définitive, commande l’efficacité de l’ensemble de notre appareil de défense, et sur la nécessité, au cours de l’année 1950, d’un réaménagement de notre politique militaire en Indochine ». (cité in Turpin, 2000, p. 32)


23 mars 50 : Le général Carpentier (commandant en chef) adresse une lettre à Jean Letourneau  (ministre de la F.O.M.) évoquant « la fragilité du moral des cadres » dans l’armée (Turpin, 2000, p. 28).


27 mars 50 : Contrairement à ses propos du 21, Carpentier informe Alessandri et le colonel Constans (commandant la zone frontière du Nord-Est) que « les derniers renseignements concernant la Chine paraissent indiquer une aggravation sensible de la menace que font peser depuis plusieurs semaines les communistes chinois sur l’Indochine. Il n’est pas maintenant défendu d’envisager dans un avenir plus ou moins lointain une attaque de leur part sur le Tonkin. » Il ordonne à Alessandri d’envisager « dès maintenant » l’évacuation de Cao Bang et Dong Khe. Il entend se rendre bientôt au Tonkin pour « envisager les modalités de cette évacuation ». Alessandri confie au colonel Constans (commandant la zone frontière du Nord-Est) le soin de produire une étude sur les conditions d’un éventuel repli de Cao Bang. Cette étude aboutit à un rapport final qui sera établi le 16 mai et sera alors transmis à Carpentier. Mais ces dispositions resteront au final lettre-morte (Cadeau, 2022, pp. 122-123 et pp. 153-154).


Fin mars 50 : HCM, de retour de Chine, obtient les engagements tenus par son alliée (Giap 2, 2004, pp. 13-16).

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